L’Égypte construit un mur le long de la frontière avec Gaza pour se protéger des attaques terroristes. Une décision qui éloigne Le Caire des Palestiniens et qui témoigne de l’importance des enjeux sécuritaires dans la région.
Depuis 2014, l’Égypte construit une barrière à sa frontière avec la bande de Gaza. Le mur est régulièrement intensifié par de nouvelles phases de travaux pour répondre aux préoccupations de sécurité nationale. L’objectif de cette infrastructure est de contrôler la frontière et de neutraliser les réseaux de tunnels souterrains qui connectent Gaza à l’Égypte. Ces tunnels, essentiels pour les Gazaouis en raison du blocus israélien, permettent le transport de biens de première nécessité, mais sont aussi utilisés, selon les autorités égyptiennes, pour faire passer des armes et des combattants susceptibles de déstabiliser le Sinaï.
Démolition des tunnels de contrebande
En 2014, après plusieurs attaques terroristes dans le Sinaï par des groupes armés tel Ansar Beït al-Maqdis, affilié à Daech, l’Égypte accuse certains éléments de Gaza de soutenir ces groupes via les tunnels de contrebande. En réaction, elle lance une campagne de démolition de maisons dans la ville de Rafah, de son côté de la frontière, pour créer une zone tampon. Cette zone de sécurité permet de surveiller la frontière plus efficacement et de limiter l’activité des tunnels. Des centaines de maisons sont rasées, déplaçant des familles égyptiennes pour dégager l’espace nécessaire à cette zone militaire de sécurité. En parallèle, les forces égyptiennes commencent à localiser et à détruire les tunnels de manière systématique. Ces tunnels sont soit comblés, soit dynamités, avec des équipes spécialisées qui emploient des technologies de détection avancées pour identifier ces passages souterrains.
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Construction du mur
En 2020, l’Égypte entame une nouvelle phase de travaux, transformant l’infrastructure initiale en un mur de béton plus résistant, équipé de dispositifs de surveillance avancés. La barrière devient ainsi un obstacle physique plus difficile à franchir, conçu pour bloquer non seulement les passages en surface, mais aussi les tunnels souterrains. Des caméras, des radars et des capteurs de mouvement sont installés le long de la frontière pour détecter toute tentative de construction de nouveaux tunnels ou de passage clandestin. Ce renforcement marque une évolution dans la politique égyptienne, axée sur un contrôle total de la frontière pour réduire au maximum les infiltrations.
En février 2024, dans un contexte d’escalade du conflit entre Israël et Gaza, l’Égypte accélère les travaux et renforce encore la barrière, ajoutant de nouveaux segments de mur en béton armé et intensifiant la surveillance. Des images satellites révèlent des progrès significatifs dans la construction, avec un déploiement de systèmes électroniques de sécurité le long de cette frontière sensible. Cette phase de renforcement vise à contenir les risques d’un afflux de réfugiés gazaouis vers le Sinaï, territoire déjà sous pression militaire. Les autorités égyptiennes cherchent à prévenir toute forme d’exode massif et à protéger le Sinaï des retombées du conflit voisin.
Conséquences humanitaires et régionales
Les différentes phases de construction de cette barrière et la destruction des tunnels ont des conséquences graves pour les habitants de Gaza. Déjà isolés par le blocus israélien, les Gazaouis perdent un accès crucial à des ressources et des moyens de subsistance essentiels. Le mur restreint leurs possibilités de déplacement, ce qui aggrave la précarité économique et limite l’accès aux soins médicaux et aux biens de première nécessité, rendus encore plus rares et coûteux. Pour Gaza, cette barrière contribue ainsi à intensifier une crise humanitaire en ajoutant davantage d’isolement.
Pour l’Égypte, la barrière et la destruction des tunnels sont des mesures de stabilisation du Sinaï, où l’activité terroriste reste un défi majeur. Cependant, cette politique entraîne des conséquences diplomatiques : elle suscite des critiques dans le monde arabe, où elle est vue par certains comme une renonciation à la solidarité avec la Palestine. Elle pourrait aussi compliquer le rôle de l’Égypte comme médiateur dans le conflit israélo-palestinien.
Le gouvernement égyptien justifie ces mesures en invoquant des impératifs de sécurité, soulignant les menaces terroristes qui pèsent sur le Sinaï. Ce discours trouve un certain soutien auprès des alliés de l’Égypte, dont Israël, qui considère la barrière comme un prolongement de ses propres efforts de sécurisation de Gaza. En revanche, des organisations internationales, comme l’ONU et Human Rights Watch, dénoncent les conséquences humanitaires de cet isolement renforcé pour Gaza. Malgré les appels pour une ouverture de la frontière pour raisons humanitaires, l’Égypte maintient son contrôle strict et rejette toute concession, mettant en avant sa souveraineté et ses priorités de sécurité.
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Un isolement stratégique à double tranchant
La barrière entre l’Égypte et Gaza est un symbole des choix sécuritaires de l’Égypte dans une région sous haute tension. Si elle permet au Caire de contrôler plus efficacement sa frontière et de réduire les menaces terroristes, elle accentue également l’isolement de Gaza, aggravant la crise humanitaire qui y sévit. L’Égypte assume ici un choix difficile, cherchant à protéger sa stabilité nationale tout en risquant d’affaiblir son image de médiateur régional et de se distancier de la cause palestinienne. À terme, ce mur pourrait exacerber les tensions dans la région, démontrant les limites d’une politique strictement sécuritaire dans un contexte où les crises humanitaires et géopolitiques sont profondément interconnectées.