<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Série d’été – 15 août 1944, le débarquement en Provence

9 août 2024

Temps de lecture : 4 minutes
Photo : Débarquement sur les côtes françaises en août 1944. (c) Wikipedia
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Série d’été – 15 août 1944, le débarquement en Provence

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Si l’on vient de fêter les 80 ans du Grand Débarquement, celui de Normandie, le débarquement de Provence est souvent délaissé et peu connu du grand public. Retour sur une opération d’une ampleur impressionnante au rôle stratégique déterminant. 

Créer un nouveau front

Le 6 juin 1944, l’opération Overlord est lancée et des centaines de milliers de soldats, chars et autres véhicules sont débarqués en Normandie, sur le territoire français. Au prix de nombreux efforts, les Alliés commencent à créer des brèches dans le front de l’Ouest. Début août, ils arrivent même à sortir de Normandie et à marcher en direction du bassin de la Ruhr. Or le flanc droit de la colonne n’est pas assuré et l’avancée progressive des troupes pose la question de la soutenabilité des moyens de logistique. 

Lancé en août 1944, l’objectif du débarquement en Provence est de créer un nouveau front en France et de détruire la XIXe armée allemande destinée à défendre le sud-est du pays. L’armée allemande, prise sur plusieurs fronts, ne pourra plus se concentrer sur un seul point et devrait battre en retraite en direction de Berlin. 

Pour les troupes alliées, l’objectif est clair : débarquer et constituer une ligne de front de vingt-cinq kilomètres de profondeur (la Blue Line), puis avancer vers la vallée du Rhône et prendre contact avec le 2e corps d’armée français. Du côté allemand, l’ouverture de ce troisième front, après celui de l’Est et de Normandie, précipite le repli pour éviter l’encerclement des forces du Troisième Reich. 

Un second D-Day

Dans la nuit du 14 au 15 août, les Forces françaises de l’Intérieur (FFI) reçoivent différents messages de Londres qui annoncent le début de l’opération Dragoon. 

Les forces alliées sont majoritairement composées d’éléments du 7e corps d’armée américain, sous les ordres du général Patch, et d’un composant de troupes françaises de l’Armée B, sous les ordres du général de Lattre de Tassigny. Le déploiement par la mer se fait via l’utilisation de 880 navires de guerre environ, ainsi que plus de 1 300 navires qui partent de Naples, d’Oran et/ou de Tarente. Se greffant sur l’exemple de l’opération Overlord, le plan de bataille prévoit le débarquement de différents groupes des forces alliées sur de multiples plages, chacune ayant un rôle précis. 

Une opération multiple 

D’abord surnommé Anvil, le débarquement en Provence gardera finalement le nom de code Dragoon. Il est appuyé par deux opérations, une première opération de déploiement de planeurs, l’opération Dove, et une opération de désinformation, l’opération Span. 

Dans la nuit du 14 au 15 août 1944, une grande opération aérienne est menée par les forces alliées afin de préparer le débarquement sur la côte varoise. Sur sept vagues différentes, 330 planeurs larguèrent plus de 2 200 soldats parachutistes, ainsi que des équipements, près de la Motte, dans le Var. En même temps, une seconde opération est menée sur les côtes françaises et italiennes. Celle-ci est en réalité une opération de désinformation, composée de simulations de débarquements afin de figer les troupes allemandes et éviter un trop rapide redéploiement des forces ennemies sur les côtes varoises. 

Un débarquement par forces

Les premiers groupements envoyés sur la côte varoise permettent de délimiter la zone de débarquement sur la côte provençale. À l’extrémité est, la Rosie Force, qui compte 67 hommes du Groupe Naval d’Assaut de la marine en Corse menés par le capitaine de frégate Sériot, permet de freiner l’arrivée des potentiels renforts allemands venant de l’est. En même temps, la Romeo Force, composée de 750 commandos d’Afrique sous les ordres du lieutenant-colonel Georges-Régis Bouvet, débarque sur la plage de Rayol-Canadel-sur-Mer et prend rapidement le Cap Nègre, conquérant notamment une tête de pont vitale autour du Lavandou. 

Pendant ce temps, le Special Service Force américain arrive à s’emparer des îles du Levant et ainsi limiter l’utilisation des lourdes batteries allemandes situées devant Hyères. 

À l’aube, un bombardement aérien et naval écrase les batteries allemandes, permettant de faire débarquer la majorité des troupes alliées, regroupées sous le nom de Kodak Force. Cette dernière est constituée de trois divisions de la VIIe armée américaine, les 3e, 36e et 45e divisions d’infanterie américaine, ainsi que la 1re division blindée (1re DB), commandée par le général Touzet du Vigier. La Kodak Force est répartie en trois secteurs entre les villes côtières de Cavalaire et de Saint-Raphaël : Alpha Beach, Delta Beach et Camel Beach. 

L’ensemble des troupes alliées débarquées dans les jours suivants sont alors couvertes par de larges opérations navales et aéronavales, ainsi qu’un parachutage constant d’équipements, de matériels, de véhicules et de soldats sur le territoire. 

Repousser l’ennemi commun 

À peine débarquées, les 3e et 45e divisions américaines, sous les ordres du général O’Daniel et Eagles, suivent leur objectif de pousser vers la vallée du Rhône, tandis que les forces françaises s’occupent de libérer les places fortes que sont les ports de Marseille et de Toulon. 

Le 20 août 1944, arrivées aux abords du port de Toulon, les troupes françaises de l’Armée B commencent à mettre en place l’assaut de la ville fortifiée. La résistance se joint au corps d’armée française et permet une libération rapide de la ville, en seulement quelques jours. La garnison allemande de Marseille tient à peine cinq jours de plus, avant de se rendre aux troupes du général de Lattre. Ces dernières, qui ont un mois d’avance sur les prévisions des Alliés, se redirigent alors vers le nord. 

Bilan 

Au total, le débarquement B, celui en Provence, aura été une éclatante réussite. Dès le premier jour, ce n’est pas loin de 100 000 personnes et 11 000 véhicules qui ont débarqué sur le territoire national en une journée. Fin septembre, le front comptabilise environ 400 000 soldats débarqués et 800 chars, pour plus de 2 200 navires. 

Carte du front au 1er septembre 1944. (c) Wikipedia

Du 15 au 29 août , les pertes de cette Armée B s’élèvent à 933 tués, 19 disparus et 3 732 blessés, les jours les plus terribles étant les 23 et 24 août. Du côté allemand, environ 35 000 soldats furent capturés.

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Côme du Cluzel

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