Les années 1960 et 1970 ont connu une énergie abondante et peu chère. Les solutions et les réussites d’hier peuvent être des éléments d’innovation pour les problèmes de pénuries d’aujourd’hui.
Au début des années 1970, tout allait pour le mieux dans la Communauté européenne — comme on appelait alors l’UE. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la reconstruction d’une Europe meurtrie a été rendue possible grâce au plan Marshall, du nom du secrétaire d’État aux relations internationales du gouvernement américain. Une aide financière massive de 19 milliards de dollars a été distribuée aux États européens de l’OCDE, l’organisation créée en 1948. Le choix des entreprises bénéficiaires pour la fourniture des équipements était laissé aux seuls États, mais des comités de pilotage de l’aide définissaient les secteurs prioritaires.
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Grâce au plan Marshall, mais aussi au travail de la population européenne, qui aspirait à une bonne qualité de vie après les souffrances de la guerre, toute l’Europe occidentale redouble d’efforts au travail. La croissance du PIB entre 1950 et 1970 était d’environ 4 % par an. Ces années de prospérité dans tous les domaines industriels et domestiques sont appelées les « Trente Glorieuses ». Les femmes n’ont plus à faire la lessive à la main, la mécanisation de l’agriculture soulage les ouvriers agricoles, les loisirs deviennent possibles pour tous. Cela a également été rendu possible par l’énergie abondante et bon marché qui a fait tourner l’économie à plein régime. Ce plein emploi permettait de changer facilement de travail. Mon beau-frère explique qu’il était possible de changer d’emploi parce qu’un autre était proposé à quelques centimes de plus par heure.
À cette époque, le pétrole, bon marché et facile à utiliser, remplace le charbon. Lors de la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, en 1950, le charbon représentait 80 % de la consommation d’énergie des Six. Ce chiffre est tombé à 65 % en 1960 et à 30 % en 1970 (il est aujourd’hui de 12 %). La Communauté européenne, qui était indépendante sur le plan énergétique, devenait ainsi progressivement dépendante du monde extérieur, d’une nouvelle source d’énergie et d’une région du monde, le Moyen-Orient. Mais qui s’en souciait ? La sécurité de l’approvisionnement énergétique avait bien été évoquée en 1968 dans un premier document de la Commission européenne intitulé « Première orientation de la politique énergétique de la Communauté européenne ». Il proposait des prévisions et des orientations à moyen terme pour chaque source d’énergie, l’établissement d’un marché commun, ce qui implique la mise en œuvre de règles communes, la mise en œuvre d’une politique d’approvisionnement sûre et bon marché, et l’établissement de programmes de recherche et de développement dans le domaine des hydrocarbures (le traité CECA le prévoyait déjà pour le charbon et Euratom pour l’énergie nucléaire). Comme son titre l’indiquait, il ne s’agissait que d’orientations, il n’était pas question de mise en œuvre. Il a fallu le réveil brutal des chocs pétroliers pour que ces idées soient appliquées.
On notera que le terme « bon marché » apparaît à sept reprises dans ce document stratégique. Dans le droit fil de la résolution de Messine de juin 1955 dans laquelle a été inscrite la notion d’énergie abondante et bon marché, il constitue l’un des objectifs majeurs de la Communauté européenne : « La réalisation d’un approvisionnement à bon marché signifie la recherche du coût d’approvisionnement au niveau le plus bas, ce coût étant compris dans le sens large des dépenses que la collectivité doit consentir pour assurer la couverture de ses besoins en énergie. […] le consommateur a besoin d’indicateurs aussi clairs que possible qui, dans l’économie de marché, sont les prix ». C’est le contraire de ce que veulent les dirigeants européens d’aujourd’hui : une énergie chère pour limiter son utilisation afin de décarboner le monde. Les anciens de la Commission européenne ne la reconnaissent plus.
Les deux chocs pétroliers
La guerre des Six Jours de juin 1967 avait offert à Israël une nette victoire sur ses voisins arabes, l’emblème de cette guerre étant la prise de Jérusalem-Est et du Kotel. En guise de revanche, en 1973, le jour du jeûne de Yom Kippour, jour férié en Israël, qui coïncide en 1973 avec la période du ramadan, les Égyptiens et les Syriens attaquent par surprise de manière simultanée dans la péninsule du Sinaï et sur le plateau du Golan. Après avoir été surpris pendant plusieurs jours, Israël reprend le contrôle de la situation, reconquiert les hauteurs du Golan et fonce vers Damas et le Sinaï égyptien. À l’instigation du Libyen Mouammar Kadhafi, les autres pays arabes réagissent. Le colonel libyen est en difficulté dans son pays, car son coup d’État a fait fuir les compagnies pétrolières et les revenus sur lesquels il comptait pour réussir sa prise de pouvoir disparaissent. Il veut augmenter le prix du pétrole. Le 25 décembre (!) 1973, l’organisation arabe des pays exportateurs de pétrole (OAPEP) décide de limiter, dans un premier temps, ses exportations de pétrole de 5 % par mois pour tous les pays. Cependant, les pays « favorables à Israël », comme les États-Unis, les Pays-Bas et le Portugal, sont soumis à un embargo total.
L’impact sur l’économie de la Communauté européenne est considérable. La consommation de pétrole est rationnée et, symboliquement, les gouvernements de la Communauté décident d’organiser des « dimanches sans voiture », dont le premier a été organisé le 18 novembre 1973. À l’époque, un litre d’essence plombée coûtait environ un quart d’euro.
La croissance économique en a été durement affectée ; après 1973, elle est tombée à une moyenne de 2,5 % et n’a jamais retrouvé son niveau le plus élevé. Il n’était plus question d’énergie abondante et bon marché et donc plus de croissance soutenue. Il y a donc eu une crise des prix et une crise de l’offre, de plus cette crise, contrairement à aujourd’hui, était mondiale, puisque les décisions arabes ont perturbé le marché du pétrole, qui est unique pour le monde.
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Les pays de l’OCDE ne pouvaient tolérer ce contrôle à la fois sur leur économie et sur leurs relations internationales, car il s’agissait bien d’une tentative de sanctionner le soutien à Israël. Ils s’organisent rapidement. Henry Kissinger, qui était à l’époque le secrétaire d’État américain, propose la création d’une agence spécialisée dans l’énergie. Ses membres seront obligés de disposer de réserves de pétrole brut ou de produits pétroliers équivalentes à trois mois de consommation ou deux mois d’importations, ces réserves étant détenues en partie ou en totalité par l’État membre ou par des sociétés privées. Ces stocks stratégiques constituent une véritable arme de représailles et sont toujours en mesure de museler toute tentative d’embargo. En trois mois, les États membres ont le temps de s’organiser et les « dimanches sans voiture » sont un lointain souvenir que les jeunes d’aujourd’hui ne peuvent même pas imaginer.
Cette organisation, qui s’appelle l’Agence internationale de l’énergie (AIE), est connue outre-Atlantique comme le « chien de garde du pétrole ». Georges Brondel, qui était directeur de la direction générale de l’énergie de la Commission européenne, a convaincu les Américains de choisir Paris, qui était déjà le siège de l’OCDE, afin de ne pas donner à l’agence une image américaine. Il a également convaincu Washington d’ajouter au mandat de l’agence l’organisation du dialogue entre producteurs et consommateurs de pétrole. Pendant des années, l’AIE a été la référence en matière d’analyse de la situation énergétique mondiale. Ses perspectives énergétiques annuelles étaient une référence très appréciée.
L’Agence internationale de l’énergie a joué un rôle extraordinaire jusqu’à récemment. Cependant, ces dernières années, elle est devenue un des chantres de la décarbonation et plus particulièrement de la promotion des énergies renouvelables à tout prix. L’Agence internationale de l’énergie qui était le chien de garde du pétrole invite à présent les compagnies pétrolières à changer de métier, ni plus ni moins…
Les critiques commencent à se faire entendre, même si cela fait longtemps qu’elles existent en aparté. Standard and Poor’s rapporte que l’OPEP considère que « l’AIE a compromis son analyse technique pour l’adapter à son narratif ». Le think tank britannique, également appelé IEA, mais pour Institute of economic affairs[a], a publié un article au vitriol intitulé « La défunte Agence internationale de l’énergie » : « Pour être clair, d’un point de vue du marché libre ou de l’environnement, cette politique est insensée […]. Dire que l’AIE […] est un stéréotype d’élitistes mondiaux, c’est sous-estimer le problème. »
COCONUC, la triple réponse de la Communauté européenne
Le nucléaire
Le traité Euratom de 1958 a lancé l’aventure nucléaire dans l’UE. Au moment où les pays arabes lancent leur offensive, le nucléaire devient une réalité forte. Les stratèges arabes ne l’avaient pas prévu. Très vite, en France, en Allemagne, en Belgique, au Royaume-Uni, en Suède, etc., le pétrole utilisé pour produire de l’électricité a été remplacé par l’énergie nucléaire. Dans un chapitre que j’ai écrit pour un livre publié par le Centre commun de recherche de la Commission européenne, j’ai présenté le tableau suivant. Il montre l’extraordinaire réduction de la consommation de pétrole dans les centrales électriques. En neuf ans, la part du pétrole dans le bilan énergétique primaire est passée de 62 % à 50 %, mais surtout le pétrole, qui représentait 32 % de l’énergie primaire dans les centrales électriques, est tombé à 16 %. Le principal changement est la part de l’énergie nucléaire, qui est passée de 7 à 23 %. L’énergie nucléaire est arrivée au bon moment. Là, il y a eu transition énergétique !
Le gaz russe utilisé dans les centrales électriques pourrait également subir le même sort que le pétrole arabe dans les années 1970 et 1980, si l’on met de côté l’illusion que les énergies renouvelables peuvent conduire à la transition énergétique.
Le charbon
L’autre politique qui a contribué à nous remettre sur les rails est la promotion de la combustion du charbon. Cela faisait deux siècles que l’on brûlait du charbon, mais de manière rustique, avec un impact sur l’environnement qui était alors, et qui est aujourd’hui, considéré à juste titre comme inacceptable. Un vaste programme de combustion moderne du charbon appelé Clean Coal Technology a donc été lancé. J’ai eu le privilège d’être le responsable de ce programme qui a développé des technologies de charbon propre permettant de réduire considérablement tous les polluants atmosphériques (SO₂, NOx, poussières et cendres volantes) tout en diminuant les imbrûlés. C’était tellement avant-gardiste que les Chinois ont copié ces technologies et vendent maintenant de telles centrales en Afrique, en Asie et dans les Balkans.
Certains pourraient considérer cela comme une idée anachronique, mais ce n’est pas le cas. Cette énergie connaît une expansion considérable dans le monde : l’année de l’adoption de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Rio de Janeiro, 1992), le monde en a consommé 92 millions de tonnes. En 2021, la consommation est passée à 160 Mt. Les pays qui se soucient de leur population croissante en créant des emplois et de la valeur ajoutée utilisent cette énergie abondante et bon marché, contrairement à l’UE. Par exemple, aux portes de l’UE, les Balkans exploitent leurs réserves indigènes de charbon et de lignite : le charbon est la source quasi exclusive de la production d’électricité du Kosovo (95 %) ; la Serbie (70 %) et la Bosnie-Herzégovine (68 %) dépendent davantage du charbon pour leur production d’électricité que la Chine (61 %) !
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Les économies d’énergie
La mode de la sobriété énergétique n’est pas nouvelle. C’est seulement le nom qui est nouveau, en nous faisant croire que le comportement humain peut compenser l’inélasticité de la demande d’énergie. À l’époque, on parlait d’économie d’énergie avec un slogan bien connu « en France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées », c’est-à-dire des idées pour réaliser des économies d’énergie. Sympathiques et généreuses, ces méthodes n’ont pas permis de réduire la croissance de la demande énergétique. Certes, le paramètre qui compte — l’intensité énergétique, qui mesure la consommation d’énergie par unité de PIB produite — a baissé. Cela montre d’une part que c’est la technologie qui a permis de progresser et surtout que les entreprises ont mis en place des politiques d’efficacité énergétique non pas pour sauver la planète, mais pour réussir dans le monde de la compétitivité.
Les Anglais préféraient parler de « conservation de l’énergie » de sorte que la combinaison des mots charbon, conservation et nucléaire a permis de créer l’acronyme de la stratégie COCONUC.
Il y avait également un autre volet de la stratégie, moins connu, que nous aborderons dans la section suivante.
Le programme de démonstration « oil and gas »
Le programme communautaire de projets relatifs aux hydrocarbures a été l’une des premières réponses concrètes de la Communauté européenne à la crise d’approvisionnement énergétique de 1973. L’objectif de ce programme était d’encourager le développement de l’approvisionnement en pétrole et en gaz en subventionnant des projets de développement technologique dans le secteur de la production d’hydrocarbures. On savait que la mer du Nord contenait des hydrocarbures, mais il n’existait aucune technologie pour les exploiter. La production en mer aux États-Unis se faisait à des profondeurs de 25-30 mètres, alors que la mer du Nord a une profondeur d’environ 100 mètres. Le programme a donné lieu à de nombreuses avancées technologiques importantes, qui déterminent encore largement le niveau mondial de l’offre de pétrole et de gaz aujourd’hui. Ce programme a été caractérisé par le dynamisme des entreprises européennes, leur volonté et leur capacité à innover et à créer les technologies de pointe indispensables à l’exploitation des ressources en hydrocarbures. De 1974 à 1985, près de 500 millions d’euros ont été alloués à ce programme communautaire pour un investissement total de 3 milliards d’euros. Un soutien financier à la recherche, au développement et à la démonstration a été accordé dans les secteurs suivants :
– exploration, y compris la sismologie – forage
– production
– récupération assistée
– navires auxiliaires, submersibles et systèmes de navigation,
– robots pouvant travailler jusqu’à 500 mètres de profondeur
– pose de pipelines
– transport par pipeline
– transport par navire
– technologie du gaz – stockage
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On notera en particulier le développement du forage directionnel, c’est-à-dire qu’il n’est plus obligatoire de forer verticalement, mais il est devenu possible d’incliner le forage lorsqu’il est suffisamment profond pour qu’il pénètre horizontalement dans le réservoir et ainsi exploiter beaucoup plus le réservoir. Cela permet également d’atteindre des réservoirs qui ne sont pas récupérables à partir de la verticale. Par exemple, le premier projet de forage directionnel a été réalisé par la société ENI dans la mer Adriatique pour exploiter le gisement de Rospo Mare.
Toutes ces technologies sont aujourd’hui couramment appliquées dans le monde entier, y compris aux États-Unis pour l’exploitation des gaz et pétrole de schiste. Mais surtout, elles ont permis de produire des hydrocarbures européens et donc de réduire drastiquement les importations en provenance des pays de l’OPEP, avec des conséquences énormes comme nous le verrons dans la prochaine section. Grâce à ce programme, les entreprises européennes sont devenues des leaders mondiaux et le sont restées. Il suffit de penser aux prouesses technologiques des entreprises ENI ou TotalEnergies en Méditerranée orientale, dans les zones économiques exclusives d’Israël et d’Égypte. Il faut noter que les principaux bénéficiaires des fonds de recherche n’étaient pas les grands groupes pétroliers, mais des sociétés de services ou des organismes indépendants comme l’Institut français du pétrole (IFP).
Malheureusement, le traité de Maastricht a ouvert la voie aux écologistes de Strasbourg qui ont réussi à tuer ce programme qui avait pourtant créé des fleurons européens en matière de technologie pétrolière et gazière.
Le contre-choc pétrolier
Chacun de ces domaines de la stratégie a contribué à nous libérer de la géopolitique que les pays arabes tentaient de nous imposer. Les pays de l’OPEP ont, en effet, été les victimes de leur stratégie. À partir de 1981, les prix ont commencé à baisser pour atteindre 14 $/b en 1986 (34 en 2021 dollars). La figure suivante montre qu’à partir de 1979, la production pétrolière de l’OPEP a fortement diminué et n’a repris sa tendance à la hausse qu’en 1987. À l’inverse, la production hors OPEP a continué à croître fortement, de sorte que l’écart entre ces deux groupes de producteurs est devenu très important.
De plus, avec l’abondance du marché, le prix du pétrole brut a chuté, créant ce que l’on a appelé le contre-choc pétrolier. Ce fut une aubaine pour les pays de la CE, mais un désastre pour les pays de l’OPEP qui vendaient moins et moins cher, le prix du pétrole brut chutant brutalement de 37 à 14 dollars le baril.
Il n’est donc pas surprenant que l’ancien ministre saoudien du Pétrole, Ali Al-Naïmi, ait déclaré en 2002 « Le pétrole n’est pas un char. Le pétrole n’est pas un F-16. Le pétrole n’est pas un missile. Il ne sera pas utilisé comme une arme. Il est une source de prospérité ».
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Que pouvons-nous conclure pour notre situation en 2022 ?
Le slogan des fondateurs de l’UE, « Une énergie abondante et bon marché » doit redevenir une priorité ; le déni des dirigeants européens actuels est incompréhensible. Tout ce qui pénalise son prix doit être combattu avec détermination si l’on veut assurer la croissance, non pas en tant qu’objectif, mais parce que c’est le seul moyen d’assurer le plein emploi et de continuer à améliorer les conditions de vie et de santé. Lorsque l’on se plaint, à juste titre, des coûts élevés de la santé, il faut garder à l’esprit que leur réduction passe par la réduction des prix de l’énergie. L’énergie c’est la vie et l’énergie abondante et bon marché permet à tout le monde de mieux vivre. Il y a une forte dimension sociale dans l’énergie peu chère. La précarité énergétique dans l’UE existait avant l’actuelle crise et elle devient plus inadmissible.
Il convient que les États membres prennent des mesures sociales pour permettre aux citoyens et à l’industrie de ‘survivre’ après cette crise. Personne ne le conteste. Mais cela ne résoudra pas le problème. Cela ne ferait que le soigner.
Si la Commission européenne annonçait que les combustibles fossiles — principalement le gaz naturel — ne doivent plus être ostracisés comme elle le fait depuis quelques années, les prix chuteraient comme ils l’ont fait il y a 40 ans pour le pétrole. Nous avons vu à quelle vitesse cela s’est produit ; cela se produirait à nouveau maintenant. Si nous commençons à produire notre propre énergie, la liberté géopolitique serait restaurée, comme elle l’a été lors du contre-choc pétrolier. Il n’y a aucune raison de sombrer dans le désastre énergétique. Nous avons ce qu’il faut pour en sortir vainqueur.
Nous devons revenir rapidement et de manière dynamique à la promotion des technologies. Pour l’instant, l’UE ne finance que les énergies renouvelables et un peu l’efficacité énergétique. Les succès que nous avons présentés ont été possibles parce que la recherche européenne était libre et non bureaucratique. Aujourd’hui, ce sont les personnels d’agences qui imposent des sujets de recherche aux chercheurs et aux entreprises. Il faut rapidement libérer la recherche, comme je l’ai déjà demandé.
Il est nécessaire de balayer l’utopie européenne qui rêve que toute la production d’énergie doit rapidement être fournie par les énergies renouvelables. Elles ont leur place, mais elles resteront limitées. Alors que depuis 49 ans, bien avant que l’on parle de changement climatique, nous cherchons des solutions alternatives, les énergies éolienne et solaire ne représentent que 3 % de l’énergie primaire dans l’UE et dans le monde. Le reste du monde continue de s’appuyer sur les sources d’énergie que nous ne nous autorisons pas à utiliser : le charbon, le pétrole, le gaz et le nucléaire. Entre 2011 et 2021, dans les pays non membres de l’OCDE, seuls 20 % de la croissance de la demande d’énergie primaire ont été satisfaits par les énergies renouvelables, de sorte que l’écart entre les énergies conventionnelles et les énergies renouvelables se creuse ; contrairement à ce que suggèrent l’Agence internationale de l’énergie et la Commission européenne, le monde court après les énergies conventionnelles.
Mais alors qu’en est-il du changement climatique, me direz-vous ? Allez le demander à ceux qui n’ont pas cessé d’augmenter leurs émissions de CO2 depuis l’adoption de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Rio de Janeiro, 1992) : Monde : + 59 %, Amérique latine : + 73 %, Afrique +93 %, Non-OECD : +134 %, Inde +280 %, Chine + 311 %, Vietnam +1380 %. L’UE a peut-être réduit les siennes de 23 %, mais ce n’est manifestement pas le modèle que les autres ont l’intention de suivre.
L’UE va payer cher son désarmement énergétique unilatéral.
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Les derniers ouvrages de Samuele Furfari sont « Énergie tout va changer demain. Analyser le passé, comprendre l’avenir » et « L’utopie hydrogène ».
[a] ils ont presque la même adresse web : iea.org et iea.uk.org