L’histoire de notre planète est jalonnée de nombreux événements : éruptions volcaniques, formation de montagnes, érosion, accumulation de sédiments, évolution du climat, fluctuations du niveau marin, apparitions d’espèces, crises biologiques majeures, voire chutes d’astéroïdes. Pour aider le grand public à comprendre cette histoire longue et accidentée, le BRGM propose une carte géologique sous forme de puzzle. De quoi voyager partout en France… et à travers les temps géologiques ! Visite guidée.
L’histoire de notre planète est jalonnée de nombreux événements : éruptions volcaniques, formation de montagnes, érosion, accumulation de sédiments, évolution du climat, fluctuations du niveau marin, apparitions d’espèces, crises biologiques majeures, voire chutes d’astéroïdes. Pour aider le grand public à comprendre cette histoire longue et accidentée, le BRGM propose une carte géologique sous forme de puzzle. De quoi voyager partout en France… et à travers les temps géologiques ! Visite guidée.
Au départ, il faut comprendre comment ont été établies les cartes géologiques dont le but principal est de comprendre l’organisation du sous-sol en trois dimensions. Il est donc fondamental de disposer de repères chonologiques. Pour déterminer la succession et la durée des événements, les géologues se sont d’abord attelés à étudier les traces de vie fossilisées dans les sédiments. Par la suite, d’autres techniques basées sur la physique et la chimie ont permis de quantifier et d’affiner l’échelle des temps.
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Initialement, il s’agissait surtout de repérer des substances utiles qu’offre la croûte terrestre : fer, charbon… D’abord indiquées de manière ponctuelle par de simples observations écrites, les représentations ont vite évolué vers des plages de couleur. Le plus simple était de reporter la véritable couleur des cailloux. Les premières sont l’œuvre d’ingénieurs des mines en Saxe à la fin du XVIIIe siècle.
Couleurs des roches, couleurs du temps
Le fait de représenter la véritable couleur des roches a continué au XIXe siècle.
Par exemple, le jaune généralement utilisé pour décrire le Miocène rappelle la pierre du Midi visible dans de nombreux monuments (remparts d’Aigues-Mortes, pont du Gard, Palais des Papes, arènes d’Arles…), le vert du Crétacé correspond aux sables verts situés dans l’Aube, le bleu du Jurassique fait écho aux marnes bleues du Jura, et le mauve du Trias se rapporte au grès des Vosges (utilisé pour la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg).
Pour sa part, le rouge du Permien concorde avec les argiles et grès rouges (maisons de Collonges-la-Rouge). Le Carbonifère, enfin, est représenté en gris pour rappeler les couches riches en carbone (charbon) qui sont abondantes pour cette période.
C’est bien l’accumulation de connaissances sur les fossiles qui a permis d’établir une chronologie entre les couches sédimentaires et de faire évoluer la représentation des roches sur les cartes. Pour les roches sans fossiles, c’est toutefois la nature des roches qui a été conservée. Ainsi, le mauve foncé rappelle la couleur des basaltes, et le rouge des granites a été choisi pour illustrer la fusion du magma dont il est issu.
Bien que l’on sache aujourd’hui dater des roches sans fossiles, on retrouve encore cette dichotomie entre représentation temporelle pour les roches qui ont des fossiles et représentation de la nature des roches pour celles qui n’en contiennent pas.
Les cartes géologiques sont donc des documents complexes dont la lecture nécessite des connaissances particulières. La forme du puzzle permet d’en rendre la lecture plus ludique.
Les roches les plus anciennes de France
Il faut dire que notre territoire métropolitain présente une diversité géologique remarquable. Âgées d’environ deux milliards d’années, les plus anciennes roches affleurent de la Bretagne à la Normandie en passant par les îles Anglo-Normandes.
Ensuite, les « vieux » vestiges suivants sont datés entre 600 et 250 millions d’années. Ces roches sont visibles dans les massifs dits « anciens », qui forment le « socle » (Massif armoricain, Massif central, cœur des Pyrénées, partie occidentale de la Corse, massif des Maures, certaines parties des Alpes, Vosges et Ardennes).
Ces roches sont principalement représentées dans des tons « chauds » (rouge, orange, rose), couleurs historiques pour rappeler le feu des magmas originels et sombres (marron, vert et gris) pour illustrer d’anciennes roches sédimentaires plus ou moins transformées.
Il existe aussi un vert plus lumineux qui correspond à des vestiges d’un ancien océan qui se trouvait avant la collision des plaques tectoniques. Ces chocs ont entraîné la formation des granites et la transformation de ces roches, le tout formant le socle. Ainsi, on peut retrouver en même temps, des roches déposées en surface et d’autres en cours de fusion dans les profondeurs.
Les grands bassins sédimentaires chamboulés par les Pyrénées et les Alpes
De manière chronologique viennent ensuite les grands bassins sédimentaires, notamment présents en Aquitaine, et sur une grande partie au centre du pays, de même que dans l’Est et au Nord en se prolongeant en Angleterre. Ils présentent tous la même succession d’auréoles de couleur mauve, bleu, vert, orange et jaune.
Le bassin du Sud-Est présente la même suite de couleurs, mais de manière plus désordonnée à cause des bouleversements tectoniques engendrés par les Pyrénées et les Alpes. En effet, ces montagnes, qui restent jeunes au plan géologique, ont permis de faire réapparaître le socle ancien.
Suite aux compressions qui ont donné naissance à ces reliefs, la croûte terrestre s’est étirée, principalement au cours de l’Oligocène (il y a 34 à 23 millions d’années), créant des fossés d’effondrement dans le Massif central (Limagnes et plaine du Forez), sur l’axe Saône-Rhône (Bresse) et dans la plaine d’Alsace.
D’autres phases de compression ont suivi, et les séismes contemporains, des Pyrénées aux Alpes démontrent que cela continue de bouger.
La tectonique à distance et en profondeur
Notre pays est jalonné de failles dont certaines se remarquent sur des centaines de kilomètres comme le Sillon houiller qui traverse le Massif central entre les départements de l’Aveyron et de l’Allier. Ces failles représentent des vestiges de déformations passées et certaines peuvent encore encaisser des mouvements.
Les chaînes de montagnes « jeunes » ne se limitent pas aux Pyrénées et aux Alpes, auquelles il faudrait d’ailleurs ajouter la Corse. Le résultat des déformations géologiques occasionnées s’observe à des centaines de kilomètres, comme en témoignent les plissements visibles dans le pays de Bray et dans le Boulonnais, où le Jurassique (bleu) refait surface !
Des vues en section (coupes) permettent de mieux comprendre l’organisation des roches en profondeur. Par exemple, les roches du socle sont présentes sur l’ensemble du territoire. Lorsqu’elles n’affleurent pas, elles se rencontrent en profondeur sous les bassins sédimentaires. Cela peut aller jusqu’à trois kilomètres sous Paris et un peu plus de 10 kilomètres dans le sud de l’Aquitaine ou bien dans le Vaucluse.
L’énigme des roches en position « anormale »
Revenons-en à nos sédiments. Il ne faut pas s’imaginer les accumulations sédimentaires de manière statique. Si l’on suit la succession temporelle du mauve au jaune, on pourrait penser que la mer s’est retirée de ces zones géographiques dans le passé, or c’est loin d’être le cas.
Pour ne donner qu’un seul exemple, au Crétacé (vert) la mer recouvrait entièrement le Massif armoricain et une bonne partie du Massif central. Ainsi, les limites des bassins sont des limites d’érosion (ce qu’il en reste après l’épreuve du temps) et non des limites d’extension des sédiments déposés.
Au nord-ouest de Toulon, une « tâche » mauve posée sur du vert représente en quelque sorte une anomalie, puisque dans une succession chronologique normale le vert (Crétacé, il y a 65 à 145 millions d’années) doit être au-dessus du bleu (Jurassique, -145 à -201 millions d’années) qui lui-même doit recouvrir du mauve (Trias, -201 à -252 millions d’années).
Cela a donné beaucoup de fil à retordre aux géologues, qui ont imaginé un îlot composé de roches du Trias (mauve) émergeant d’une mer du Crétacé, ou encore un pli en forme de champignon dans lequel le Trias aurait transpercé le Crétacé…
Finalement, c’est en progressant dans une mine de lignite (intermédiaire entre la tourbe et la houille) contenue dans des terrains du Crétacé que Marcel Bertrand (initiateur de la tectonique moderne) a réalisé qu’il y avait toujours du Trias au-dessus de lui. Pas l’îlot ou de pli en champignon, donc ! L’observation réalisée en 1884 montrait que le recouvrement de terrains par d’autres était possible. Ce charriage donnait une vision complètement nouvelle de la formation des montagnes.
La majorité des roches volcaniques jeunes se trouvent au centre de notre pays. Le massif du Cantal est le plus grand volcan d’Europe avec 60 kilomètres de diamètre. Si le Plomb du Cantal culmine aujourd’hui à 1 855 m d’altitude, le sommet du stratovolcan atteignait probablement 4 000 m il y a environ 8 millions d’années. De l’Auvergne au Languedoc, les manifestations volcaniques se sont étalées entre le Miocène et le Quaternaire. Le plus jeune volcan de France se trouve au lac Pavin en Auvergne (environ 6 000 ans avant notre ère).
Tombé du ciel !
La carte de France présente une auréole singulière dans le Limousin. Il s’agit des roches résultant de l’impact d’un astéroïde, il y a 207 millions d’années (Trias). Ces impactites, puisque tel est leur nom, sont présentes sur un diamètre d’une vingtaine de kilomètres. L’astéroïde, qui mesurait environ un kilomètre et demi de diamètre (six milliards de tonnes !) est arrivé à la vitesse de 20 kilomètres par seconde. Cela a déformé les roches sur plus de cinq kilomètres de profondeur et perturbé les environnements de l’époque sur de très grandes distances.
Assembler le puzzle de 1 000 pièces de la carte de France métropolitaine permet de toucher du doigt la géologie de notre pays. Cela permet également de percevoir la diversité des roches qui composent nos paysages ainsi que nos monuments et maisons composées de vieilles pierres. À vous de juger sur pièces…
Frédéric Simien, Responsable des Éditions, BRGM
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.