Livre – Une histoire mondiale de la paix

15 avril 2020

Temps de lecture : 3 minutes

Photo : Signature du traité de Versailles, dans la galerie des Glaces, le 28 juin 1919, Auteurs : E.R.L./SIPA, Numéro de reportage : 00286425_000001.

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Livre – Une histoire mondiale de la paix

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Objet de bien des écrits et de bien des utopies, la paix est, depuis les temps antiques, espérée, désirée mais ô combien difficile à entretenir. Philippe Moreau Desfarges nous offre son point de vue sur la recherche et l’obtention d’une telle paix qui ne pourrait se faire que dans un esprit de consensus inter voire supranational. 

Ancien diplomate, puis chercheur à l’Institut français des relations internationales (IFRI), Philippe Moreau Defarges a enseigné à Sciences Po (Paris) et codirigé le rapport RAMSÈS (IFRI). Auteur d’ouvrages d’histoire des relations internationales et de géopolitique, il revisite à son tour le problème qui n’a cessé d’hanter bien des consciences : celui de la paix. Dans un monde de concurrence exacerbée entre les grandes puissances, de compétition pour l’accès aux ressources, d’affrontements violents entre les civilisations et les religions, une nouvelle guerre mondiale est-elle vraiment improbable, voire impensable ? Si elle veut survivre, l’humanité est « condamnée » à la paix.

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Mais quelle paix ?  Bien des paix ont marqué la marche du temps. Paix de religion, qui ont occupé XVIe et XVIIe siècles. Paix de conquête, marquant l’assujettissement d’un pays à un autre, qui a mis du temps à s’éteindre. Paix de compromis ou d’équilibre, la plus souhaitée, la plus malaisée. Paix de lassitude, qui frappe constamment à nos portes. Depuis l’aube du néolithique, il n’y a eu de paix qu’impériale. Une telle paix ne saurait se réduire à l’exercice brutal d’une force arbitraire. Elle doit laisser aux populations dominées des zones d’autonomie, les persuader qu’il n’y a pas d’autre ordre possible. Or la Pax americana des années 1945-2003 a été la dernière paix impériale. La mondialisation, dynamique globale et conflictuelle, voue désormais toute ambition impériale planétaire, même celle d’une Chine réveillée, à l’échec. La seule paix mondiale possible doit reprendre le laborieux chemin de la paix contractuelle, démocratique et institutionnelle.

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Au moment où se négociait le Traité d’Utrecht de 1713, l’abbé de Saint-Pierre publiait son célèbre Projet pour rendre la Paix perpétuelle en Europe en trois volumes. Notre abbé visionnaire ne préconisait pas moins aux dix-huit puissances existantes en Europe, dont onze persistent toujours, de conclure entre elles un Traité d’Union et un Congrès, calqué sur le modèle des sept souverainetés de Hollande, ou des treize souverainetés de Suisse. A ses yeux, seule l’édification d’une « société européenne » apparaît comme la garantie de la paix, dans les États des « princes chrétiens » comme en dehors d’eux. Quelle ambition cela représentait, puisque même l’optimiste Jean-Jacques Rousseau écrit un demi-siècle plus tard dans son Extrait analytique (1761) : « C’eût été un homme très sage, s’il n’eût eu la folie de la raison. » Emmanuel Kant, dans son Essai de paix perpétuelle (1795), qui exposa avec clarté les données permanentes d’un problème essentiel : « L’état de paix parmi les hommes vivant les uns à côté des autres n’est pas un état de nature (status naturalis) : celui-ci est bien plutôt un état de guerre : même si les hostilités n’éclatent pas, elles constituent pourtant un danger permanent. L’état de paix doit donc être institué : car s’abstenir d’hostilités, ce n’est pas encore s’assurer la paix, et, sauf si celle-ci est garantie entre voisins (ce qui ne peut se produire dans un État légal), chacun peut traiter en ennemi celui qu’il a exhorté à cette fin. L‘état de paix ou de non-guerre n’est pas un fait de nature, mais de raison et de volonté. » Il préconise une fédération des républiques désarmées, la vérité guidée par la raison finira par prévaloir. L’œuvre de Kant représente sans doute, dans l’histoire de la philosophie, l’effort le plus lucide et le plus remarquable pour arracher l’homme à la guerre. Il a tenté de se garder de la fascination de l’utopie, même si l’espérance de la paix perpétuelle ressemble plus à un rêve qu’à une appréciation réaliste des choses. Il faudra bien bâtir la paix pour que notre terre ne devienne pas un enfer. Déjà, lors du débat de ratification du Traité de Versailles le 30 juin 1919, Clemenceau avait averti : « La paix générale ne serait que le fallacieux mirage d’un jour si nous n’étions pas capables de vivre d’abord en paix avec nous-mêmes, c’est-a-dire de donner comme fondement de la paix extérieure, la paix intérieure à notre propre pays. » Pour sa part, Philippe Moreau Defarges ne perd pas espoir. Il plaide pour l’instauration d’une citoyenneté planétaire, la mise en place d’Agences supranationales pour gérer les Biens communs et même d’une police mondiale. A l’heure où l’on voit comment la « communauté mondiale » gère en ordre dispersé la pandémie du Covid-19, on mesure le chemin qui reste à parcourir avant que la paix mondiale devienne à son tour un bien commun.

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Photo : Signature du traité de Versailles, dans la galerie des Glaces, le 28 juin 1919, Auteurs : E.R.L./SIPA, Numéro de reportage : 00286425_000001.

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À propos de l’auteur
Eugène Berg

Eugène Berg

Eugène Berg est diplomate et essayiste. Il a été ambassadeur de France aux îles Fidji et dans le Pacifique et il a occupé de nombreuses représentations diplomatiques.
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