<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Nucléaire : 40 ans, le bel âge !  En route pour 80 ans ?

9 mai 2022

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Nucléaire : 40 ans, le bel âge ! En route pour 80 ans ?

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Contrairement à une croyance répandue, la technologie des centrales nucléaires électrogènes en France a globalement peu varié depuis les premiers chantiers en série des réacteurs dits « à eau pressurisée » (REP) dans les années 1970. Et elle ne variera pas avec les nouveaux réacteurs EPR (European Pressurized Reactor) pour le siècle en cours. En effet, la filière est éprouvée, sûre, et fiable, en attendant la technologie des surgénérateurs pour la fin du siècle, ou celle de la fusion nucléaire pour le siècle prochain ou peut-être jamais !

Bien sûr, l’informatique et l’électronique ont beaucoup évolué, notamment dans la partie visible des salles de commandes. Des améliorations techniques sur l’entretien, le pilotage, l’efficacité énergétique et la sécurité ont aussi été apportées, mais la technologie de base sur laquelle repose la filière REP actuelle tirant parti de la chaleur émise par la fission du combustible uranium est la même depuis cinquante ans.

L’informatique et l’électronique

Et elle restera sensiblement la même pendant la durée de fonctionnement prévue des nouveaux EPR et EPR 2 (soixante ans) qui seront mis en service à partir de 2035, et probablement jusqu’au-delà de 2050, et qui fonctionneront donc encore au siècle prochain avec la technologie proche de celle des derniers réacteurs REP (palier N4) mis en service à Civaux en 2002.

Ainsi, les réacteurs récents (REP) et futurs (EPR) peuvent faire varier leur puissance de 80 % en trente minutes pour suivre, par exemple, les variations des consommateurs ou de production des éoliennes et des panneaux solaires, selon les caprices du vent et du soleil.

Ils peuvent aussi fonctionner avec des combustibles recyclés contenant du plutonium (MOX).

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Après les multiples entretiens et cures de rajeunissement, la soi-disant « vieille » centrale nucléaire de Fessenheim (ainsi qualifiée par les antinucléaires) était en pleine force de l’âge à l’issue d’un peu plus de quarante ans de fonctionnement lorsqu’elle a été arrêtée pour des raisons politiques.

D’autres filières ont vu le jour dans le monde : CANDU au Canada, graphite-gaz en France, à eau bouillante de type RBMK en Russie. Ces deux dernières ont ensuite été abandonnées ou sont en cours d’abandon.

Comprendre en deux minutes le principe de base du nucléaire

Il n’y a que deux façons de produire de la chaleur avec des noyaux d’atomes :

1) soit en les cassant (comme l’uranium 233, l’uranium 235 et le plutonium 239 par exemple),

2) soit en les fusionnant (comme l’hydrogène, le deutérium et le tritium par exemple).

Si la fusion nucléaire a été réalisée à titre expérimental, beaucoup de travail reste à faire pour en extraire de la chaleur utile pour une utilisation pratique, notamment pour produire de l’électricité.

Peut-être que la fusion de l’hydrogène (qui se produit naturellement dans notre soleil) se développera pour produire de l’électricité dans le prochain siècle sur terre ou jamais.

Seule la fission de gros noyaux à partir de l’uranium 235 qui produit aussi d’autres noyaux fissiles comme le plutonium 239 (issu de l’uranium 238) ou de l’uranium 233 (issu du thorium 232) est aujourd’hui utilisée dans le monde pour produire de la chaleur et de l’électricité.

Mais le thorium 232 nécessite de disposer d’uranium 235 ou de plutonium 239 pour initier la réaction en chaîne de l’uranium 233.

Remarque importante : l’uranium 235 est la seule matière fissile naturellement encore disponible sur terre pour produire (fabriquer) d’autres noyaux fissiles comme le plutonium 239 ou l’uranium 233.

Cette fission peut être provoquée par des neutrons lents ou rapides, ce qui modifie considérablement le taux de combustion de l’uranium naturel (ne contenant que 0,7 % d’uranium 235 fissile), et donc les réserves disponibles.

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Dans le premier cas (neutrons lents), à peine 1 % de l’uranium naturel est utilisé (0,8 % même avec un recyclage, donc plus de 99 % sont rejetés). C’est le cas dans presque tous les réacteurs électrogènes aujourd’hui. Les réserves estimées d’uranium économiquement disponibles pour cette filière sont environ de cent cinquante ans pour le monde entier.

Dans le deuxième cas (neutrons rapides), tout l’uranium naturel (100 %) est utilisé. Ce type de réacteur dit « surgénérateur » transforme tout l’uranium naturel en uranium fissile. Les réserves d’uranium (multipliés par 100) sont donc d’environ quinze mille ans.

Deux réacteurs de ce type ont été construits en France (Phénix et Superphénix).

La construction du démonstrateur de réacteur surgénérateur Astrid prévu pour ouvrir la voie à cette filière a été annulée en janvier 2020.

Les évolutions technologiques significatives viendront donc avec les réacteurs surgénérateurs que développent plusieurs pays (États-Unis, Russie, Chine, Inde…).

Parmi toutes les sources d’énergie, l’énergie nucléaire, qui combine la prévisibilité de la production avec le niveau le plus bas d’émissions de gaz à effet de serre et de déchets, est un élément clé pour le mix énergétique de demain.

Le nucléaire est donc une énergie durable, pour ceux qui décideront d’utiliser cette source d’énergie naturelle.

Futur : small est-il beautifull ?

Aujourd’hui, la construction de petits réacteurs modulaires SMR (Small Modular Reactor comme Nuward en France, dévoilé en 2019) est envisagée par le gouvernement pour remplacer des centrales à gaz et à charbon en France et à l’étranger.

Nuward, acronyme de NUclear forWARD (« en avant le nucléaire »), est destiné à répondre aux besoins croissants du marché à l’exportation de l’électricité décarbonée sur le segment de faible puissance de 300 à 400 MW, alors que l’EPR a une puissance de 1 650 MW.

Jean-Bernard Lévy, PDG d’EDF, a rappelé que les SMR « pourraient jouer un rôle essentiel dans le remplacement des centrales au charbon » pour les pays encore dépendants de cette source d’énergie polluante. Une analyse de marché confirme « la nécessité d’un approvisionnement en centrales nucléaires de faible puissance ».

Aujourd’hui, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Asie du Sud-Est s’intéressent à ces SMR qui offrent une stabilité de production électrique et une certaine flexibilité sur le réseau. C’est également le cas pour les marchés matures, comme aux États-Unis, où les SMR pourraient être considérés comme un atout dans certaines régions.

L’intérêt des SMR serait aussi de favoriser la cogénération nucléaire en chauffant des villes, de produire de l’eau douce par dessalement de l’eau de mer, et de décarboner la production de carburants de synthèse.

Les SMR s’adressent donc aux pays limités par la taille de leur réseau électrique, leur géographie ou leur économie, mais aussi à ceux désireux d’introduire des énergies durables, propres et fiables.

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TechnicAtome a déjà conçu et fabriqué 20 petits réacteurs de ce type avec Naval Group pour les besoins de la marine nationale sur les cinquante dernières années. Son PDG Loïc Rocard a indiqué que le projet en cours sera fondé sur « le développement d’une solution de SMR de 340 MW, composée de deux réacteurs identiques de 170 MW chacun ».

Par comparaison, le réacteur K15 propulsant le porte-avion et les sous-marins nucléaires français a une puissance électrique d’environ 50 MW (soit 150 MW thermiques).

Gestion des déchets : où est le problème ?

Les grands médias et des ONG antinucléaires ne cessent de clamer « qu’on » ne saurait pas quoi faire des déchets nucléaires.

Or, c’est faux.

 

Plus de 90 % en volume des déchets radioactifs sont aujourd’hui gérés de façon définitive dans plusieurs centres de stockage en service depuis de nombreuses années.

Pour les 10 % restants, c’est-à-dire pour les déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue (HA et MA-VL) contenant la majeure partie de la radioactivité, la meilleure solution reconnue internationalement comme sûre et pérenne depuis plus de trente ans est de les stocker définitivement à grande profondeur (jusqu’à 500 mètres).

Depuis la loi Birraux du 28 juin 2006, la France prépare ce stockage définitif à Bure depuis quinze ans (entre Meuse et Haute-Marne) au Centre industriel de stockage géologique (CIGEO) qui a été approuvé par l’Agence internationale de l’énergie atomique (IAEA) en 2003, par l’Agence pour l’énergie nucléaire de l’OCDE en 2008, et par l’Union européenne en 2011.

Ces déchets, actuellement entreposés en surface à La Hague et intégrés dans du verre enrobé dans un cylindre d’acier, doivent refroidir pendant quelques dizaines d’années avant leur stockage géologique définitif en toute sûreté.

Les gros éléments radioactifs dangereux ne remonteront jamais à la surface !

Leur dangerosité disparaît avec le temps, contrairement aux déchets chimiques toxiques comme l’arsenic, le plomb, le cadmium, le mercure, alors que les déchets nucléaires n’ont jamais entraîné de conséquences pour le public en France. En 2025, le gouvernement devra prendre des décisions pour autoriser ce type de stockage (définitif, ou réversible pendant une centaine d’années).

Le parc nucléaire assure actuellement 70 à 75 % de la production actuelle d’électricité en France sans aucune conséquence néfaste pour la santé. Cette énorme production engendre moins de 4 m3 de produits de fissions par an pour la France entière, soit 60 tonnes de déchets à haute ou moyenne radioactivité, ce qui représente un seul gramme de déchets nucléaires à stocker en profondeur par Français et par an.

Il existe aussi environ 20 tonnes de déchets de moyenne activité et longue durée de vie (MAVL) ayant une faible radioactivité et dégageant peu de chaleur (et donc plus faciles à gérer).

Au total, avec les protections supplémentaires en verre, en acier et en béton, l’ensemble des déchets HA et MA-VL (comprenant aussi les gaines des combustibles) représente au total moins de 2 000 m3 par an pour le stockage géologique.

La loi impose que l’augmentation de l’exposition des populations n’excède pas le dixième de la radioactivité naturelle qui est de 2,5 millisieverts (mSv) en moyenne en France. Elle est largement supérieure dans les régions granitiques comme les Alpes, la Bretagne et le Massif central où le sol contient naturellement environ 3 grammes d’uranium par tonne et jusqu’à 20 grammes. Et cette faible radioactivité naturelle est probablement bénéfique.

Or, dans le pire des cas, la dose maximum en surface dans quatre cent mille ans sera 100 fois inférieure à la radioactivité naturelle (10 fois moins que le seuil imposé par la loi de 0,25 mSv). Notre descendance (proche ou lointaine) ne risque donc rien, ni aujourd’hui ni dans l’avenir.

Pourtant, cette innocuité du stockage géologique est largement mise en doute par le public apeuré par des épouvantails agités par des associations et des médias, le plus souvent viscéralement antinucléaires, qui mettent aussi en avant un coût prohibitif.

Or, la Cour des comptes a confirmé dans son rapport de 2012 que le coût de ce stockage est déjà inclus dans le prix de vente de l’électricité aux ménages, une des moins chères d’Europe.

Si le coût du stockage venait à doubler, la Cour des comptes estime dans ce rapport (page 379) que l’électricité facturée aujourd’hui 15 c€/kWh augmenterait de moins de 0,3 c€/kWh.

Le stockage géologique des déchets nucléaires est donc une solution économiquement efficace, sûre et pérenne.

Une décision politique

Au-delà des manœuvres politiciennes et des lobbies divers, il serait dramatique de ne pas offrir à nos enfants un avenir énergétique respectueux de l’environnement pour la production d’électricité et de chaleur grâce à l’énergie nucléaire. Les déchets, bien gérés comme ils le sont en France, ne représentent pas, et ne représenteront jamais un danger pour les populations selon les vrais spécialistes.

Le véritable problème du nucléaire est socio-politique. Le grand public semble particulièrement réceptif aux trompettes catastrophistes des médias alimentés par une cohorte d’organisations militantes, dites « indépendantes », mais toujours antinucléaires.

Les réacteurs nucléaires français, dérivés des réacteurs américains dont la majorité a déjà été autorisée à fonctionner soixante ans (quatre-vingts ans sont envisagés) représentent un formidable moyen de production d’énergie durable, sûr, massif, décarbonée et bon marché pour assurer le besoin en électricité de la France pendant des siècles, et même des millénaires.

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Michel Gay

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