Mare nostrum sous l’Empire romain, elle est aujourd’hui un espace privilégié d’échanges et de coopérations. Sa place stratégique entre Europe, Afrique et Asie lui confère une position d’interface entre civilisations, ce qui lui permet de conserver un rôle majeur dans la mondialisation.
C’est en disciple raisonné de Darwin que ce linguiste, auteur entre autres, de Linguistique et colonialisme (1974), La sociolinguistique (1993), Pour une écologie des langues du monde (1999), Il était une fois 7 000 langues (2011). Phénicien, araméen, hébreu, grec, latin, étrusque, berbère, arabe, turc, espagnol, italien, français : ces langues du pourtour méditerranéen nous parlent de l’histoire de ce continent liquide, notre mare nostrum « notre mer ». Louis-Jean Calvet parle de lingua nostrae pour désigner l’objet de son livre. Les langues que nous parlons aujourd’hui ne sont pas les mêmes qui étaient parlées il y a 3000 ans. Elles sont d’abord la trace des empires et puissances qui se sont succédé en Méditerranée, d’où le fait que les Arabes, à l’origine, l’ont appelé, avant l’ère ottomane de Bahr al-Rûm, la « mer des Romains », appellation qu’ils vont ensuite remplacer par un mélange de deux sources, la mer blanche du milieu (ou « intermédiaire »), traduisant successivement du turc et du latin, perdant au passage le sens initial (« au sud ») de la nomination turque.
A lire aussi: Livre – La Méditerranée asiatique XVIe – XXIe siècle
La Méditerranée est aussi celle du commerce des hommes, des idées et des denrées, qui ont constitué cet espace en un ensemble homogène de langues et les mots ont une mémoire. Ils sont le témoin des interactions, des conquêtes, des expéditions, des circulations. Que ce soit dans les emprunts, la sémantique, les alphabets ou la toponymie, les traces des échanges au sein de cette mare nostrum sont nombreuses. Du voyage d’Ulysse aux migrations d’aujourd’hui, en passant par les croisades et les échelles du Levant, ces langues ont façonné et habité la Méditerranée au rythme des événements historiques qui l’ont marquée et qui en font le laboratoire de l’humanité depuis plus de 3000 ans.