Livre – La quête nucléaire de l’Iran

22 avril 2021

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Livre – La quête nucléaire de l’Iran

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Membre de l’Institut d’études stratégiques de Londres, membre associé de l’UMR Sirice, Marie-Hélène Labbé est l’auteur de nombreuses publications sur les proliférations nucléaires, et sur « l’axe du mal ». Cet ouvrage est le pendant du précédent, consacré à l’intervention militaire en Irak en 2003 (Le Traumatisme irakien, PUPS, 2016).

Depuis le régime du shah, qui, enrichi par la hausse des prix du pétrole en 1974 a voulu propulser son pays déjà « gardien du Golfe » au premier rang de la scène internationale, l’Iran s’est engagé dans une quête obstinée au nucléaire officiellement civil, mais en sous-main militaire. Celle-ci a traversé le temps car elle a été poursuivie par les mollahs qui se sont appuyés sur le passé glorieux du pays, et sur le sentiment que l’Iran n’était pas traité selon la place que mérite son Histoire. Du fait de l’opacité du régime, le pouvoir a longtemps cherché à dissimuler ses réelles intentions. La communauté internationale, à l’instigation de la France, n’a commencé à prendre conscience du danger qu’à partir des années 2002-2003. Il s’en est suivi de longues tractations fort bien décrites par Marie-Hélène Labbé. À la République islamique d’Iran, les États occidentaux ont souvent apporté des réponses versatiles, sans que l’on sache si leur ambition ultime fut de renverser le régime théocratique ou simplement d’en infléchir la politique nucléaire. Long fut donc au sein du groupe de négociations le chemin qui mena à l’accord sur le nucléaire iranien du 14 juillet 2015, signé à Vienne, siège de l’AIEA.

Ce texte, intitulé plan d’action conjoint (en anglais : Joint Comprehensive Plan of Action ou JCPoA), a été signé par les les huit parties suivantes : les pays du P5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies : les États-Unis, la Russie, la Chine, la France et le Royaume-Uni, auxquels s’ajoute l’Allemagne), ainsi que l’Union européenne et l’Iran. Il visait à stopper la quête nucléaire iranienne en échange de la levée des sanctions. Il était le premier signe tangible que les deux États ennemis – Iran et États-Unis – pouvaient dialoguer. Les trois points principaux de l’accord sont « une limitation du programme nucléaire iranien pendant au moins une décennie ; une levée des sanctions internationales contre l’Iran ; un renforcement des contrôles » : cela impliquait tout d’abord des restrictions sur les centrifugeuses ; dont le nombre devait passer de 19 000 à 5 060, et seule l’utilisation du modèle IR-1 était autorisée pour une durée de dix ans.

Les centrifugeuses en excès seront stockées sur le site de Natanz sous scellés de l’Agence internationale de l’énergie atomique. Ensuite, le plan concerne la limitation des stocks d’uranium enrichi. Tout l’uranium enrichi au-delà de 3,67 % doit être expédié hors d’Iran ou dilué. Pendant quinze ans, l’Iran s’engage à ne pas enrichir l’uranium à plus de 3,67 %, et à le faire uniquement sur le site de Natanz. De plus, la quantité d’uranium enrichi est limitée à 300 kg … D’une part, la centrale à eau lourde d’Arak devait être modifiée afin de ne plus pouvoir produire de plutonium de qualité militaire. D’autre part, l’Iran s’engage à ne pas construire de nouveaux réacteurs à eau lourde pendant quinze ans.

En ratifiant le protocole additionnel de l’AIEA, l’Iran acceptait de se soumettre à des inspections intrusives de l’AIEA. En échange, l’UE et les États-Unis s’engageaient à lever les principales sanctions frappant l’Iran. Certaines restrictions d’armes ou de matériels sensibles restaient maintenues, mais les sanctions visant les secteurs de l’énergie, des transports ou de la finance devaient être levées dès la mise en œuvre par l’Iran de ses engagements.

Au départ, l’Iran, surtout avec l’arrivée à la présidence de Rohani, qui en avait été un des négociateurs, appliqua avec célérité et de bonne foi les dispositions de l’accord. Le 16 janvier 2016, l’AIEA publia un rapport attestant que l’Iran a respecté les contraintes de l’accord en cessant son enrichissement d’uranium. On sait que la dénonciation de l’accord par Donald Trump en mai 2018 a conduit les Américains à rétablir les sanctions contre l’Iran, et les Iraniens à se retirer progressivement des engagements pris en la matière de dénucléarisation. Depuis 2019, on a assisté à une escalade des tensions qui a culminé avec l’assassinat, le 3 janvier, du très charismatique et efficace général Soleimani, sur l’ordre de Donald Trump. L’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, désireux, sur ce dossier, comme sur bien d’autres, de revenir à la table de négociations, n’a pas permis, pour le moment de débloquer la situation, à la question nucléaire s’étant ajouté celle du programme balistique iranien qui poursuit son cours, et celle de l’influence régionale de la République islamique, qui s’appuie sur ses « proxys » ; Hezbollah libanais, Hamas palestinien, milices chiites irakiennes.

A lire aussi : Iran et Chine, mise en perspective d’une alliance en trompe l’œil

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À propos de l’auteur
Eugène Berg

Eugène Berg

Eugène Berg est diplomate et essayiste. Il a été ambassadeur de France aux îles Fidji et dans le Pacifique et il a occupé de nombreuses représentations diplomatiques.

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