Histoire de France, nageurs de combat, paysans, nourriture mondiale et italienne, florilège des livres de la semaine.
Débâcle
François Gatineau, Les trois jours qui ont fait tomber la France, l’Artilleur, 20 €.
Le 13 juin 1940, Paris est déclarée ville ouverte. La défaite française est inéluctable. Si la mémoire collective a retenu le fameux appel du 18 juin de Charles de Gaulle depuis Londres, c’est peut-être, car peu d’auteurs se sont penchés sur les trois journées des 11,12 et 13 juin, moment majeur où les forces politiques et militaires se sont réunies pour « organiser » la défaite.
Ainsi, François Gatineau nous livre un travail méticuleux sur la fuite du Gouvernement en Touraine. C’est en quittant Paris que les membres du gouvernement prennent réellement conscience de la situation de détresse de la population française qui fuit sur les routes en direction du Sud ou de l’Ouest. Face aux revers militaires et à l’exode des civils, le repli du Gouvernement ne se passa pas comme prévu et se transforma en une véritable fuite en avant. Pendant ces trois jours se déroulent deux Conseils Suprêmes et deux Conseils des ministres. Winston Churchill viendra à deux reprises. Les évènements s’enchaînent donc très rapidement, au détriment d’une réflexion à long terme.
Cet ouvrage vient donc mettre en lumière les décisions peu connues qui ont fait tomber la France en 1950 : l’ordre général de repli des armées vers le Sud et le renoncement du repli vers la Bretagne. Après avoir étudié archives et témoignages, François Gatineau nous emmène au cœur des réflexions qui ont guidé le Gouvernement français durant ces trois jours d’errance en Touraine.
Manifeste pour les agriculteurs
Sylvie Brunel, Nourrir. Cessons de maltraiter ceux qui nous font vivre !, Buchet-Chastel, 21,50€.
Quelle mission plus noble que de nourrir ses concitoyens ? Pourtant vitale, produire de la nourriture est devenu de plus en plus difficile.
Alors que le changement climatique, la crise Covid et la guerre en Ukraine ont remis l’alimentation au cœur des grands enjeux de notre société, il est urgent de s’occuper de nos agriculteurs. C’est l’idée que défend Sylvie Brunel dans un ouvrage lumineux qui prend la forme d’un véritable manifeste pour le monde agricole. Le constat est clair : jamais nous n’avons autant eu besoin des paysans, jamais nous ne les avons autant maltraités. En effet, une exploitation sur trois ne trouve pas de repreneur, plus de 300 suicides sont comptés chaque année dans le monde agricole et deux millions de postes sont à pourvoir. En plus de ces difficultés, le paysan est coupable de tout, il est devenu le bouc émissaire de nos peurs et de nos colères. Le problème paysan met en péril toute la société, menaçant notre souveraineté alimentaire, dans un monde où la géopolitique de la faim dicte les alliances.
Dans un livre d’une richesse unique, Sylvie Brunel montre le besoin crucial et vital de préserver une agriculture dynamique, plurielle, performante et confiante en l’avenir. Elle nous emmène à la rencontre de ceux qui nous nourrissent, là où s’écrit l’avenir de l’humanité et de la planète. Nourrir le monde va demander une mobilisation exceptionnelle. Il est urgent d’admettre que sans paysans, il n’y aura pas de population durable sur la planète.
Nageurs de combat
Ewan Lebourdais et Jean-Louis Tremblais, Neptune. Nageurs de combat, Odyssée, 42 €.
Le peintre officiel de la Marine Ewan Lebourdais et le grand reporter Jean-Louis Tremblais rendent un merveilleux hommage aux membres du commando Hubert dans leur dernier ouvrage. Les hommes du commando ont accepté de partager leur quotidien afin de dévoiler aux Français la spécificité de leur métier.
Cet ouvrage est une véritable exploration photographique, inédite et rarissime, qui permet de « plonger » dans le monde du silence, de l’excellence et du dépassement : celui des nageurs de combat. Ce livre est un documentaire exceptionnel qui prend la forme d’une véritable odyssée photographique et rend surtout hommage aux hommes de l’ombre qui combattent en silence pour un pays qui ne les connaît guère. Par de nombreux portraits, le lecteur prend conscience des qualités hors normes de ces marins, susceptibles d’agir sur Terre, en mer et sous la mer. L’ouvrage est constitué de photographies à couper le souffle, qui révèlent la détermination et la force de l’engagement de ces combattants et qui nous rappellent le besoin, dans un contexte international qui se trouble, de ces hommes habitués à s’adapter à tous les environnements. Le riche témoignage des nageurs de combat permet de s’inspirer de leur courage, de leur rigueur et de leur esprit d’équipe.
Un ouvrage qui révèle les secrets des profondeurs des nageurs de combat, tout en conservant une part de mystère, alliant l’émerveillement à la rêverie.
Humanités
Enzo Di Nuoscio, Pourquoi les humanités sauveront la démocratie, Puf, 2023, 19€.
Il faut bien un professeur romain pour rappeler cette nécessité : sans la culture humaniste, la démocratie n’est pas. Cette démocratie, ce n’est pas un système politique, à laquelle on la réduit trop souvent et avec erreur. La démocratie, c’est un type de société qui donne le primat à la personne humaine, qui permet la floraison des libertés : de pensée, d’agir, d’éduquer, de bâtir. La démocratie est le fruit des humanités, des langues anciennes, de la philosophie, de l’histoire. Ce sont ces humanités qu’Enzo Di Nuoscio défend avec vigueur dans cet ouvrage qui se lit comme un bréviaire de ce que sont l’Europe et l’Occident. Sans elles, les démons invisibles de la démocratie et des sociétés libres auront tôt fait de l’emporter et l’homme machine d’effacer la personne humaine. À lire pour comprendre la nécessité d’étudier les humanités et pour donner des moyens de défense à ceux qui s’y consacrent.
Manger l’Italie
David Soldini, La cuisine romanesca. Promenade gastronomique dans la ville Éternelle, Menu Fretin, 2022, 14€.
La cuisine italienne est l’une des rares à pouvoir soutenir la comparaison avec la cuisine française. Tant par la qualité que la diversité de ses produits, l’Italie offre une multiple de plats gourmands, qui vont de la cuisine populaire à celle des villes et des grandes occasions. L’ouvrage de David Soldini met en avant non pas la cuisine italienne, mais celle de Rome, la cuisine romanesca qui voit la ville Éternelle attirer à elle les produits du Latium et de toute l’Italie. S’intéressant aux saisons, aux lieux de consommation, aux plats, l’auteur montre comment Rome a construit sa propre cuisine, depuis l’époque médiévale jusqu’à aujourd’hui. Et pas seulement les pâtes, mais aussi les légumes, les poissons, les viandes qui sont transformés et apprêtés pour les bouches populaires et celles des palais. Rome, capitale d’Empire et capitale nationale est aussi l’une des capitales gastronomiques de l’Italie.
