Histoire de la géopolitique, Balkans, Japon, société, Premier Empire. Aperçu des livres de la semaine.
Florian Louis, De la géopolitique en Amérique, , PUF, 2023, 25 €.
La publication de la thèse de Florian Louis l’année dernière n’est pas passée inaperçue tant celui qui fut membre de la rédaction de la revue Conflits s’est imposé dans le débat géopolitique français. Son travail, fruit de recherches inédites dans les grands fonds universitaires américains, traite pour l’essentiel de la réception des geopolitikers allemands aux États-Unis, en particulier Karl Haushofer. Florian Louis retrace l’itinéraire complexe du néologisme aujourd’hui très répandu, de géopolitique, et plus particulièrement de la théorie du pivot central de McKinder qui inspira les théories agressives du lebensraum allemand.
Mais là n’est pas l’originalité de la thèse de Florian Louis, qui s’attache à montrer combien la géopolitique a connu une phase d’appropriation très intense aux États-Unis, en 1942, juste après l’attaque japonaise sur Pearl Harbour. C’est donc au moment où la technologie vient dépasser les limites de la géographie que la géopolitique prend son essor. Après la victoire de 1945, la géopolitique connaît un nouvel essor dans la mesure où elle vient contrer la nouvelle domination soviétique sur l’île mondiale. Le président Truman pourra s’appuyer sur une véritable école américaine de géopolitique, en particulier les théories du Rimland développées par Nicholas Spykman, pour mettre en œuvre le containment de l’empire soviétique.
Florian Louis, s’attache plus à décrire qu’à prendre parti pour ou contre la géopolitique. Il conclut néanmoins sur la possibilité pour la géopolitique de se placer aux côtés des sciences politiques ou internationales, mais avec cette particularité de se combiner avec la géographie politique. Débarrassée de ses dérives allemandes, elle devient pour les États un moyen de se défendre et de travailler à préserver l’équilibre du monde.
En somme, la géopolitique, si souvent détournée ou travestie par des praticiens ou des chercheurs peu scrupuleux, on pense notamment aux plans de George T. Renner ou Paul Nitze, canalise la violence armée et guide le stratège vers des objectifs raisonnables de puissance. Géographie politique à l’échelle du monde, elle se révèle un outil pertinent pour les diplomates et les responsables politiques pour peu qu’ils soient animés de convictions visant à préserver la paix mondiale.
Michel Chevillé.
Pierre-François Souyri, Histoire des Ninjas. Hommes de main et espions dans le Japon des samouraïs, Tallandier, 20,90€.
On se figure assez bien le Ninja : vêtu de noir, cagoulé, les jambes fléchies, prêt à bondir du haut d’un toit pour asséner un grand coup de son Ninjato – le sabre des Ninjas – dans un cri triomphant. Est-on certain cependant que cette représentation correspond à la réalité des guerres féodales du XVIe siècle ? Dans une enquête fondée sur les quelques sources historiques disponibles, l’auteur, historien du Japon médiéval, raconte la vie de ces hommes, loin de la légende contemporaine bien ancrée dans la culture populaire.
Vivianne Perret, À fleur de peaux, Herscher, 29€.
Il n’est pas rare aujourd’hui de rencontrer une personne tatouée. Depuis la fin du siècle dernier, cette pratique plurimillénaire rencontre un vif succès dans toutes les couches de la société. Dans un ouvrage richement illustré, qui se veut une invitation au voyage, l’auteur nous fait découvrir les multiples aspects de cet art à travers les siècles et les cultures. Le lecteur curieux sera particulièrement saisi par les rencontres avec tatoueurs et tatoués qui jalonnent cet ouvrage, dévoilant les histoires humaines qui se cachent derrière chaque tatouage.
Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin, Les Balkans en 100 questions. Carrefour sous influence, Tallandier, 10,50€.
Depuis la dislocation de la Yougoslavie et la fin d’une série de guerres dévastatrices, les pays des Balkans sont d’éternels candidats à l’Union européenne. Ils ne cachent plus leur lassitude devant la lenteur du processus d’adhésion, que justifient leur niveau de vie très inférieur à celui de l’UE et leur respect fragile des règles de l’État de droit. Dans cette édition actualisée, on comprend comment les Balkans retrouvent leur place de carrefour à la frontière de l’Europe et sous influence des grandes puissances de ce monde.
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Walter Bruyère-Ostells, Les Maréchaux d’Empire, Perrin, 11€.
L’originalité de cet ouvrage que compte désormais la vaste historiographie des guerres napoléoniennes réside dans son approche. Il ne s’agit pas ici d’une juxtaposition de portraits des différents maréchaux, ou d’une analyse de chacune des relations individuelles entretenues avec l’Empereur. L’auteur conduit au contraire une analyse thématique : d’abord, cinq parcours types de maréchaux, puis un récit chronologique de leurs actions à travers le décor de chaque grand événement de l’épopée napoléonienne. Enfin, une lecture des différents aspects de leur fonction (militaire, administrative, courtisane). L’auteur brosse ainsi un portrait collectif des maréchaux d’empire, avec une hauteur de vue qui permet de comprendre dans son ensemble l’histoire de ces hommes qui ont fait l’Empire.
