Comment l’Arabie Saoudite organise et structure ses réseaux en France. Une enquête de longue haleine, conduite par Pierre Conessa, permet de mieux comprendre ces logiques d’influence.
Pour rédiger ce livre, dont le caractère délicat du sujet n’échappe à personne, différentes plumes ont réuni leur talent.
Pierre Conesa, agrégé d’histoire et ancien élève de l’ENA, fut membre du Comité de réflexion stratégique du ministère de la Défense. Enseignant à Sciences-Po, il écrit régulièrement dans le Monde diplomatique et diverses revues de Relations internationales. Il est notamment l’auteur de Guide du Paradis : publicité comparée des au-delàs (L’Aube, 2004 et 2006), de Les Mécaniques du chaos : bushisme, prolifération et terrorisme (L’Aube, 2007) et de La Fabrication de l’ennemi (Robert Laffont, 2011).
Sofia Karampali Farhat, analyste géopolitique arabisante et spécialiste du Proche-Orient et du Golfe. Après des études en Sciences politiques, en Histoire (Paris 1) et en Géopolitique (ENS), elle a contribué à des études sur la révolte libanaise d’octobre 2019 et sur le lobby saoudien en France qui fait désormais l’objet de l’ouvrage collectif présenté ici. Elle est également poète engagée et traductrice de poèmes de l’arabe au français publiés dans la revue de poésie féministe Sœurs.
Régis Soubrouillard, journaliste à Marianne pendant dix ans. Il collabore aujourd’hui à divers médias, notamment économiques.
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Ainsi commence ce livre à charge. On voit tout de suite, l’angle d’attaque. Car en fait ce n’est pas le régime qui a envoyé ses agents détruire les Twin Towers, mais bien quelques citoyens dévoyés, ayant agi non au nom de Ryad, mais d’Al-Qaida, réfugiée en Afghanistan. Les auteurs continuent à écrire que le régime a diffusé le salafisme sur la planète, ce qui formellement n’est pas tout à fait exact, car c’est du wahabisme dont il s’agit ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Quant aux moudjahidin actifs en Afghanistan, ils ont été soutenus dès juillet 1979, avant l’intervention de l’armée rouge du 24 décembre. On voit que le thème de l’ouvrage est très sensible et délicat et qu’il convient de garder la juste mesure des choses. Certes l’Arabie Saoudite n’est pas une démocratie à l’occidentale et son bilan en matière de respect des droits de l’homme n’a pas la pureté du cristal. Mais n’oublions pas combien une partie de l’intelligentsia et de la classe politique française, de Sartre à Mme Mitterrand, a eu des yeux de Chimène à l’égard de Castro, qui a envoyé sous les barreaux bien des opposants durant plusieurs décennies. Faut -il évoquer le Venezuela cher à monsieur Mélenchon ? C’est donc avec grande attention qu’il convient de lire ce livre documenté qui révèle bien des pratiques d’influence, dont l’Arabie saoudite n’a pas l’exclusivité. Dans les relations entre Paris et Ryad, il n’y a pas que la dimension vente d’armes, mais aussi la situation de l’islam en France, les relations avec l’Iran, les intérêts pétroliers, le rôle de Qatar, la question syrienne, le cas du Liban et bien d’autres éléments. Riyad a recruté les cinq plus grandes sociétés internationales de relations publiques et de multiples cabinets de lobbying, en particulier aux États-Unis, mais aussi en France. N’oublions pas également que la Russie et la Chine, premiers importateurs de brut saoudien, ont établi des relations pragmatiques avec le royaume des Saoud.
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