<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> L’industrie vétérinaire, un domaine d’excellence française

14 juin 2021

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L’industrie vétérinaire, un domaine d’excellence française

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La France est l’un des grands du secteur mondial de la santé animale. Fortes de leurs ambitions internationales, de leur capacité à innover et de leur volonté d’être en phase avec les attentes exigeantes des consommateurs, les entreprises tricolores du secteur vétérinaire sont en constant développement. Étude d’un domaine d’excellence française méconnu.

 

Parmi les maladies nouvelles touchant les humains, pas moins de 75 % sont d’origine animale. L’importance de ce chiffre permet de prendre en considération le fait que le couple homme-animal est au centre des enjeux sanitaires. La médecine vétérinaire est donc essentielle pour protéger l’homme, mais aussi pour soigner et guérir les cheptels et donc assurer la permanence de l’agriculture. Les enjeux de la médecine vétérinaire ne concernent pas les animaux domestiques mais les bêtes d’élevage. Sans eux, pas d’alimentation humaine et pas de production de produits dérivés, comme le cuir ou la laine. Protéger et soigner les animaux relève donc d’un véritable enjeu humain et financier, sans compter les risques de pandémie qui peuvent se transmettre à l’homme.  

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Le monde de la santé animale repose sur un ensemble de métiers : les vétérinaires pour animaux de compagnie ou équins, mais également ceux dits ruraux pour les exploitants agricoles, les chercheurs, ceux travaillant pour les armées ou encore les ingénieurs et agents commerciaux. Cette diversité de professions témoigne de l’importance et de la complexité de ce secteur, mais également de sa richesse et du foisonnement de ses activités, donc de ses ambitions. Du point de vue de la définition, l’industrie du médicament vétérinaire peut être entendue comme l’ensemble des laboratoires et entreprises intervenant dans la conception, la fabrication et la distribution des produits relatifs à la santé animale. À ce titre, la majeure partie des médicaments vendus sont les vaccins, un élément qui nous ramène au cœur du sujet pandémique que nous vivons actuellement. C’est donc en nous intéressant aux causes et lieux de conception de tels médicaments, à leurs destinations et aux tendances qui caractérisent l’évolution de cette industrie, que nous pourrons prendre la mesure de la place de la France dans cette mondialisation de la santé animale. 

 

Une industrie en pleine croissance

 

D’un point de vue général, le chiffre d’affaires des industriels vétérinaires français n’a cessé de croître entre 2014 et 2019 (+ 17 % en cinq ans). Mais plombé par le repli de l’activité dû à la pandémie de coronavirus, il chute de près de 4 % en 2020 alors qu’il avait enregistré une hausse de 3 % l’année précédente. Mais cela n’enlève pas le constat que l’industrie de la santé animale demeure en constant développement depuis plus d’une décennie. À ce sujet, différentes causes, reposant sur l’offre et la demande, peuvent être énoncées.

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L’innovation, en premier lieu, peut être invoquée comme le principal facteur de cette évolution. Constante économique, les laboratoires misent sur le lancement de produits modernes et inédits pour renforcer leur prégnance sur le marché. La conception de nouveaux médicaments demeure donc le moteur de l’activité vétérinaire et le moyen de conserver le duo productivité-attractivité. Début juin 2020, dix nouvelles références avaient ainsi fait leur entrée sur le marché. Et l’année précédente, le nombre d’autorisations de mise sur le marché délivrées par l’Agence européenne des médicaments a bondi de 50 %. Les laboratoires consacrent, en moyenne, 10 à 12 % de leur chiffre d’affaires à la recherche et au développement. Cela permet de prendre la mesure d’une réelle volonté de demeurer compétitif et de toujours chercher la nouveauté, meilleur stimulant de la demande.

La seconde cause est celle des demandes intérieures et extérieures qui sont déterminées par l’évolution de la population animale, donc de critères économiques, voire socioculturels (consommation de viande, place de l’animal dans le foyer ou la société). À cela s’ajoutent des éléments incitatifs, tels que les campagnes de vaccinations (celle contre la fièvre catarrhale ovine en France depuis 2008, par exemple) qui favorisent le développement de l’activité vétérinaire. L’évolution de la relation homme-animal, donc les mutations des modes de production, de consommation et de perception de l’environnement, devient ainsi l’un, sinon le principal déterminant de la croissance du secteur vétérinaire. 

L’autre sujet est celui de la réglementation nationale et européenne qui, en administrant ce secteur, autorise son développement. Au niveau continental, et s’ajoutant aux nombreuses normes nationales, l’activité vétérinaire est réglementée par un paquet législatif de la Commission européenne, datant de septembre 2014, mais seulement entrée en vigueur en janvier 2019. Ce règlement établit trois objectifs : accroître la disponibilité de ce type de médicaments dans l’UE, améliorer le fonctionnement d’un tel marché et réduire les charges des fabricants, ce qui permettra de promouvoir l’innovation. Toutefois, ces différentes lois demeurent des plus contraignantes, ce qui ne favorise pas la croissance ou l’extension d’un tel secteur. Face à la concurrence internationale, ces réglementations mettent donc un frein à la compétitivité de certaines entreprises tricolores.

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En France, un secteur fermé, mais en constant développement

 

La concurrence et l’innovation allant bon train, le secteur vétérinaire n’abrite plus qu’une poignée de laboratoires pharmaceutiques dont les noms les plus importants sont Boehringer Ingelheim, Merck & Co et Bayer. Si ces différents groupes disposent d’implantations en France, il n’en demeure pas moins que sur les huit principaux acteurs intervenant dans l’Hexagone, dans le domaine de l’industrie vétérinaire, seulement trois sont français (Ceva Santé Animale, Virbac, Vetoquinol), le premier étant allemand (Boehringer Ingelheim) et le reste essentiellement américain. Au-delà du fait que des monopoles dominent ainsi le monde de la santé animale, il apparaît donc que les entreprises tricolores ne sont pas les plus en vue, et ce, bien que la France demeure leader dans ce domaine au niveau européen. 

Le monopole que nous pouvons observer est dû au fait que beaucoup de laboratoires, désireux de recentrer leurs activités sur la santé humaine, ont cédé leur partie vétérinaire à des tiers. Nous pouvons ici citer l’exemple de l’américain Pfizer qui abandonne sa frange animale à son compatriote Zoetis en 2013 ou du français Sanofi qui cède Merial à l’allemand Boehringer Ingelheim en 2017. Récemment, Bayer s’est même engagé à céder sa division santé animale à l’américain Elanco Animal Health.

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Malgré cette physionomie monopolistique, les laboratoires établis en France réalisent près de la moitié de leur chiffre d’affaires à l’étranger, essentiellement en Europe (les exportations se font principalement vers l’Autriche, l’Italie et l’Espagne). Mais pour prendre la mesure de l’importance de l’industrie française dans ce secteur, retenons que la France produit près d’un quart des vaccins vétérinaires européens. Les entreprises tricolores possèdent notamment une place de choix dans les médicaments pour équidés, ruminants et animaux de compagnie. Un élément qui permet de mesurer à quel point notre pays demeure, envers et contre tout, performant dans un secteur destiné à prendre de l’ampleur dans les années à venir. À l’image de ses concurrents, enfin, l’industrie française du médicament vétérinaire se caractérise par sa forte concentration. Les cinq premiers laboratoires réalisaient près des deux tiers du chiffre d’affaires national de ce secteur en 2018. Cela s’explique notamment par le nombre important de barrières limitant l’entrée de nouveaux arrivants. En effet, l’activité vétérinaire demande beaucoup de coûts en matière d’innovation et de recherche afin de pouvoir rester attractive et demeure soumise à de multiples normes administratives et juridiques qui, par leur sévérité, entendent garantir la sécurité des médicaments, mais maintiennent, en définitive, les monopoles. 

 

La demande, véritable socle des évolutions sectorielles

 

Le secteur vétérinaire évolue au gré de la demande. Ainsi, étant donné que les médicaments proposés par les vétérinaires sont principalement destinés aux animaux de compagnie ou de rentes, c’est-à-dire voués à la fabrication de viande, de production de lait ou d’œufs, il est nécessaire de prendre en compte les évolutions sociales, économiques et culturelles des individus pour mieux appréhender les évolutions de ce secteur médical.

D’une part, la clientèle relative aux animaux de compagnie est de plus en plus exigeante, marquée par l’ère du temps et la nouvelle place centrale conférée à l’animal. D’autre part, le secteur de l’élevage, historiquement cœur de métier de la profession, doit faire face à de nombreuses crises. Citons par exemple la canicule de l’année 2018 qui a vu de nombreux producteurs laitiers réformer leurs élevages, ce qui a entraîné une diminution conséquente du cheptel bovin. Tout en prenant en compte ces aléas qui déstabilisent le marché, le vétérinaire doit donc s’adapter à une nouvelle réalité : celle de la diminution du nombre d’exploitations agricoles, de leur modernisation et l’accroissement de leur taille. Ici encore, le consommateur apparaît comme plus pointilleux. Sensible au bien-être de l’animal et au bio, il oblige la médecine vétérinaire à s’adapter à ses exigences. 

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Si la demande intérieure est fondamentale pour comprendre le développement de ce secteur, celle étrangère l’est tout autant. Étant donné que les exportations constituent une part conséquente (quasiment la moitié) du chiffre d’affaires des entreprises vétérinaires tricolores, la demande extérieure est donc fondamentale pour son développement. À titre d’exemple, les cheptels porcins (qui ont connu une forte diminution entre 2010 et 2016) et ovins ont été soutenus par la demande notamment asiatique qui a fortement augmenté en 2019 en raison de l’expansion de la peste porcine africaine et de la sécheresse en Chine. Ainsi, et l’industrie de la santé animale ne fait pas exception, le client est roi. Le producteur s’adapte aux besoins de ses clients.

 

Une stratégie d’implantation axée vers le monde rural et ouverte à l’international 

 

Qu’est-ce qui a permis à la France de conserver son statut de puissance dans le domaine de la santé animale ? Des raisons historiques (la France étant le pays de Louis Pasteur, la terre qui a vu naître les premières écoles vétérinaires, le lieu des entreprises médicales et pharmaceutiques) et économiques, en lien avec l’importance des effectifs déployés sur notre territoire et l’exigence de la demande, ont fait de la France le deuxième marché vétérinaire au monde.

À cette histoire s’ajoute une géographie surprenante, car largement tournée vers les espaces ruraux. En effet, une part importante des entreprises vétérinaires est installée au sud de la Loire. La Provence et ses environs, les abords des Alpes, l’Auvergne et l’Aquitaine accueillent la majeure partie de ces groupes. La localisation des trois plus grandes firmes de ce secteur illustre ces dires. Merial est ainsi installée en Auvergne-Rhône-Alpes, Virbac, en région Provence-Alpes-Côte d’Azur et Ceva Santé Animale, en Nouvelle-Aquitaine. 

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Au niveau de la profession, la situation n’est pas homogène sur l’ensemble du territoire. On constate une baisse marquée du nombre de vétérinaires en Île-de-France (- 3 %) et en Bourgogne-Franche-Comté (- 0,8 %). Avec près de 10 % de croissance, les régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie confirment leur attractivité. 

Le groupe Ceva Santé Animale, dont le siège se situe à Libourne, en Gironde, est la cinquième puissance mondiale sur le marché vétérinaire. Avant la crise du coronavirus, l’entreprise possédait un chiffre d’affaires de 1,2 milliard d’euros, en nette augmentation par rapport aux années précédentes. Ceva Santé Animale emploie près de 6 000 salariés à travers le monde, dont 1 500 en France. Son implantation géographique est largement tournée vers l’ouest. En effet, l’entreprise détient six sites de production et de recherche : un à Libourne, un à Laval, deux à Angers, un à Landivisiau et le dernier à Loudéac.

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D’un point de vue plus global, Ceva illustre à quel point une entreprise pharmaceutique française, dont le siège social est à plusieurs centaines de kilomètres de Paris, peut rêver grand et disposer d’ambitions internationales. En 2019, elle rachetait la partie vétérinaire de l’allemand IDT Biologika. Forte de son appétit à grande échelle, Ceva a multiplié son chiffre d’affaires par dix en vingt ans. Elle est aujourd’hui implantée dans pas moins de 46 pays, le marché latino-américain connaissant la plus forte croissance en 2019. Si cette entreprise n’est qu’un exemple parmi tant d’autres, il n’en reste pas moins qu’elle participe à classer la France à la deuxième place sur le marché mondial de la santé animale et permet de penser qu’elle le restera. 

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Un chiffre pour conclure : le nombre de vétérinaires inscrits en France métropolitaine a augmenté de 2,6 % entre 2015 et 2019. La profession attirant, quoique faiblement, l’innovation allant grandissante, la demande se voulant exigeante, il apparaît donc que l’industrie vétérinaire tricolore dispose de beaux jours devant elle. Mais sa compétitivité pourra-t-elle demeurer effective au lendemain de la pandémie et à la restructuration de l’économie française autant qu’internationale ? 

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À propos de l’auteur
Etienne de Floirac

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Étienne de Floirac est journaliste
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