Créés en 1888, les chasseurs alpins sont l’excellence des troupes de montagne françaises. Ils sont les premières unités militaires françaises spécifiquement conçues pour le combat en altitude, une nécessité imposée par les tensions avec l’Italie, qui avait déjà formé ses propres Alpini en 1872.
Article paru dans le N55, Géopolitique des montagnes.
Chargés de défendre les cols stratégiques et les frontières alpines, les chasseurs alpins se distinguent dès leur origine par un entraînement spécialisé et un équipement adapté aux conditions extrêmes de la montagne. Leur célèbre béret noir orné d’un edelweiss, adopté en 1945, symbolise leur lien indéfectible avec le milieu montagnard. Plus qu’un simple uniforme, cet emblème reflète les valeurs qui les caractérisent : endurance et adaptabilité. Si leur mission initiale était de protéger les passages montagneux, leur polyvalence les a conduits à intervenir dans des environnements variés, des déserts aux zones tropicales.
Rôle et missions
Les chasseurs alpins jouent un rôle clé dans la défense nationale et les interventions extérieures, grâce à leur expertise unique en terrains escarpés. Leur mission première consiste à protéger les cols, vallées et autres passages stratégiques en milieu montagneux, tout en menant des actions offensives dans des environnements difficiles.
En France, les chasseurs alpins assurent la sécurité des frontières alpines et participent aux plans de secours lors de catastrophes naturelles, comme des avalanches ou des séismes. À l’étranger, ils s’illustrent dans des missions complexes, souvent sous mandat international, comme en Afghanistan, où leur expertise en altitude a été cruciale, ou au Mali, où ils ont combattu dans les montagnes de l’Adrar des Ifoghas.
Organisation et composition
Les chasseurs alpins forment le cœur de la 27ᵉ brigade d’infanterie de montagne (BIM), une unité emblématique de l’armée de terre française dédiée aux opérations en milieu montagneux. Cette brigade se compose de trois bataillons principaux : le 7ᵉ bataillon de chasseurs alpins (BCA) à Varces, le 13ᵉ BCA à Chambéry, et le 27ᵉ BCA à Annecy. Le 7e BCA a occupé le quartier CBA Bulle à Bourg-Saint-Maurice, en Savoie, de 1922 à 2012. À l’été 2012, le 7e BCA s’installe en Isère, à Varces, dans le quartier CBA de Reyniès.
Ces unités sont soutenues par des régiments d’appui, comme l’artillerie, le génie et la cavalerie, pour garantir une polyvalence tactique.
L’organisation des chasseurs alpins repose sur leur capacité à opérer de manière autonome dans des environnements difficiles. Leur coordination avec l’aviation légère de l’armée de terre (ALAT) renforce leur efficacité en facilitant le transport, le ravitaillement et l’appui feu dans des zones escarpées. Cette structure moderne et interarmes permet aux chasseurs alpins de répondre rapidement aux défis opérationnels, tout en restant fidèles à leur mission historique : défendre les reliefs stratégiques de la France et projeter leur expertise à l’international.
Formation et entraînement
La formation des chasseurs alpins repose sur une rigoureuse préparation physique et mentale, adaptée aux conditions extrêmes du milieu montagnard. Cette préparation est principalement assurée par l’École militaire de haute montagne (EMHM), située à Chamonix, un centre d’excellence reconnu internationalement. Les soldats y apprennent les techniques d’alpinisme, de ski, d’escalade et de survie en altitude, développant ainsi leur endurance et leur autonomie dans les environnements les plus hostiles.
En complément, le Groupement d’aguerrissement montagne (GAM) à Modane permet aux troupes de s’entraîner dans des conditions réelles. Ces exercices incluent des manœuvres en haute montagne, le franchissement de cols et la gestion des situations de combat en milieu cloisonné. Les soldats sont également formés à utiliser un matériel spécifique, comme les crampons, piolets et équipements adaptés au froid intense.
Le Groupe militaire de haute montagne (GMHM) joue un rôle central dans l’innovation. En testant de nouveaux équipements et en repoussant les limites de l’endurance humaine, il assure aux chasseurs alpins un avantage technologique et technique. Cette combinaison d’entraînement intensif et d’innovation continue fait des chasseurs alpins des soldats d’élite, capables de mener des opérations complexes en montagne et au-delà.
Historique et engagements majeurs
Depuis leur création en 1888, les chasseurs alpins se sont illustrés dans de nombreux conflits, devenant une référence mondiale pour le combat en montagne. Leur premier grand engagement survient lors de la Première Guerre mondiale, où ils jouent un rôle crucial dans les combats des Vosges, notamment à l’Hartmannswillerkopf. Malgré des conditions climatiques extrêmes, ils parviennent à contenir les avancées allemandes grâce à leur résistance et leur connaissance du terrain.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, les chasseurs alpins se distinguent lors de la défense des Alpes contre les troupes italiennes en 1940. Bien que numériquement inférieurs, ils réussissent à protéger la frontière, démontrant une organisation et une maîtrise exemplaires du relief. Plus tard, leur expertise contribue à la résistance dans les maquis, notamment ceux du Vercors et des Glières.
Dans l’après-guerre, ils sont déployés lors des guerres de décolonisation, en Indochine et en Algérie, où leur expérience en terrains difficiles est précieuse. Plus récemment, ils ont participé à des missions internationales, comme en Afghanistan, où leurs compétences en altitude furent déterminantes, ou au Mali, où ils ont opéré dans les montagnes de l’Adrar des Ifoghas dans le cadre de l’opération Serval. À travers ces engagements, les chasseurs alpins ont confirmé leur réputation de troupes d’élite, capables de s’adapter aux environnements les plus exigeants tout en contribuant de manière décisive à la réussite des opérations.
Spécificités techniques et logistiques
Les chasseurs alpins se distinguent par leur capacité à opérer dans des environnements montagneux exigeants, où la logistique et l’équipement jouent un rôle essentiel. Adaptés aux conditions extrêmes, leurs uniformes incluent des tenues résistantes au froid, des chaussures adaptées aux terrains accidentés, et des équipements légers, mais robustes, comme les crampons, les piolets et les skis. Cette spécialisation leur permet de se déplacer efficacement sur des terrains escarpés et de mener des missions prolongées en altitude.
Historiquement, les convois logistiques dépendaient de mules pour transporter les vivres et les munitions. Si ces moyens traditionnels restent utilisés dans certaines situations, les chasseurs alpins s’appuient désormais sur des technologies modernes, notamment les hélicoptères de l’aviation légère de l’armée de terre (ALAT), pour assurer le transport et le ravitaillement dans les zones les plus isolées. Cependant, ces appareils sont parfois limités par les conditions météorologiques imprévisibles des montagnes, ce qui nécessite une planification minutieuse.
Leur maîtrise des techniques de déplacement et de combat en altitude est renforcée par un entraînement rigoureux aux tirs en pente et en conditions climatiques difficiles. La capacité des chasseurs alpins à transformer les contraintes naturelles en atouts tactiques fait d’eux une unité redoutable, capable d’opérer efficacement même dans les environnements les plus hostiles.
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