Hervé Théry et Daniel Dory présentent un premier aperçu de l’empreinte spatiale du Hezbollah à travers le monde.
Article paru dans la Revue Conflits n°51.
Cette carte constitue une approche préliminaire de l’emprise spatiale du Hezbollah depuis sa consolidation en 1984 jusqu’en juin 2022, date limite des données disponibles dans la Global Terrorism Database. Ce genre de représentations offre une base empirique indispensable pour aborder l’analyse d’une organisation recourant au terrorisme. À ce titre, elle permet de saisir immédiatement, par exemple, les différences entre cette entité et le Hamas dont nous avons traité antérieurement, et dont l’activité violente est exclusivement locale¹.
Cette fois, la base GTD recense des actions attribuées au Hezbollah dans plusieurs pays du monde, mais avec une très forte concentration dans une région-clé. C’est pourquoi nous avons choisi de faire un zoom en trois images, à l’échelle mondiale, puis à celle du Moyen-Orient et enfin à celle des confins entre le Liban et le nord/centre d’Israël, où se situe la majeure partie des actes recensés.
En outre, face aux limites des études, souvent fortement contaminées par des impératifs polémiques, qui portent sur le Hezbollah², ce travail d’objectivation fournit des éléments permettant aussi de contribuer à une démarche analytique dont les fondements ont été proposés, sans grand effet jusqu’à présent, dans un excellent article paru il y a presque vingt ans³.
Le fait que le Hezbollah soit un acteur majeur dans le conflit israélo-palestinien explique qu’il soit au centre d’une intense guerre informationnelle. Celle-ci porte à la fois sur sa nature, ses liens avec l’Iran et ses actions. C’est pourquoi, la carte que nous présentons porte sur les actes « attribués » au Hezbollah dans la GTD, sans qu’il soit possible, dans de nombreux cas hors du périmètre Liban/Israël, d’en confirmer l’attribution.
C’est donc avec une certaine prudence que cette représentation préliminaire doit être envisagée. Et ce, non seulement concernant les attaques situées, par exemple, en Iran ou au Niger. Toutefois, en disposant, enfin, de cartes de base sur l’emprise spatiale de cette organisation, on ouvre la possibilité de nouvelles interrogations sur les différents complexes terroristes auxquels elle participe, et/ou ceux où ses ennemis cherchent à l’impliquer.
En définitive, ces cartes, maniées avec la prudence requise, nous informent autant sur la distribution spatiale des actions du Hezbollah que sur les effets de la guerre informationnelle dont il fait l’objet. Prendre conscience de cette réalité est d’ailleurs une exigence constante en matière de recherche sur le terrorisme.
2. Voir la bonne synthèse suivante : Raphael D. Marcus, « Hizbullah », in : Andrew Silke (Ed.), Routledge Handbook of Terrorism and Counterterrorism, Routledge, Londres-New York, 2019, p. 302-314.
3. Mona Harb ; Reinoud Leenders, « Know thy enemy : Hizbullah, “terrorism” and the politics of perception », Third World Quarterly, vol. 26, no 1, 2005, p. 173-197.
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