Le 10 juin 1940, Benito Mussolini déclare la guerre à une France déjà affaiblie, alignant l’Italie aux côtés de l’Allemagne nazie. L’Armée des Alpes, forte de 185 000 hommes, se trouve alors confrontée à 350 000 soldats italiens et 100 000 soldats allemands, ces derniers attaquant par le revers en Haute-Savoie et dans l’Isère.
Malgré le Pacte d’acier liant l’Italie au IIIe Reich, Mussolini avait initialement adopté une position de non-belligérant. Neuf mois plus tard, il déclare la guerre contre une France déjà affaiblie. Souvent oubliée, cette bataille témoigne de la résistance héroïque de l’Armée des Alpes. Sous le commandement du général René Olry, assisté par les généraux Montagne et Magnien, elle affronta le groupe d’armée ouest italien dirigé par le prince Humbert de Savoie.
Début des affrontements
Dans la nuit suivant la déclaration de guerre, les Français détruisirent tous les ponts, routes et tunnels pouvant être utilisés par les Italiens. Peu entraînés, mal équipés et peu mobiles, les Italiens tentèrent néanmoins quelques opérations entre le 11 et le 19 juin, repoussées avec succès par l’Armée des Alpes.
En parallèle, des affrontements aériens eurent lieu entre la Regia Aeronautica et l’Armée de l’Air. Après des vols de reconnaissance le 11 juin, des bombardements italiens commencèrent le 13 juin sur les ports de Toulon et Marseille, ainsi que sur divers aérodromes et villes notamment en Corse. Les attaques aériennes furent repoussées avec succès, et des contre-attaques françaises furent menées au-dessus de Gênes et Turin.
Offensive générale le 21 juin
Le 21 juin 1940, sur ordre de Mussolini, l’armée italienne lance une offensive générale. Malgré des combats acharnés, la progression italienne reste très limitée. Avec seulement trois divisions, le général Olry maintient toutes les positions à la frontière, rendant l’attaque italienne inefficace.
En Tarentaise, la petite garnison de la Redoute-Ruinée, composée d’une quarantaine de soldats du BAF (Bataillon Alpin de forteresse), continue à défendre les débouchés du col du Petit-Saint-Bernard contre des milliers de soldats italiens jusqu’à l’armistice. En Maurienne, les Italiens progressèrent légèrement, mais la route du Mont-Cenis reste impraticable.
Dans le Briançonnais, les Italiens furent tenus en échec durant dix jours de combats. Dans le Queyras, l’ennemi fut stoppé devant Abriès. En Ubaye, la défense des débouchés du Col de Larche fut également assurée. Dans les Alpes-Maritimes, le 15e Corps d’armée italien, chargé de prendre Nice, fut bloqué devant Menton.
Le 23 juin, les troupes italiennes occupèrent partiellement Menton, mais partout ailleurs, les forces françaises résistèrent avec acharnement, comme en témoigne la bataille du Pont-Saint-Louis où neuf Français mirent en déroute plus de 3 000 Italiens.
Résistance contre les Allemands
Alors que l’offensive italienne faiblissait, le 15 juin, les Allemands atteignirent Dijon, menaçant de prendre l’Armée des Alpes à revers. En infériorité numérique, le général Olry réorganisa ses forces face à la percée allemande, créant des unités de fortune avec des réservistes et anciens combattants. Trois lignes de défense furent mises en place dans la vallée du Rhône.
Le 19 juin, les Allemands franchirent le Rhône, et l’Armée des Alpes les affronta sur les ponts de Lyon. Le 20 juin, le général Olry fit sauter tous les ponts de l’Isère en aval de Voreppe, pour limiter l’avancée allemande. Le XVIe Panzerkorps attaqua sur trois axes, mais fut repoussé à l’Isère ainsi que sur la rive droite du Rhône par des spahis. Il fut également stoppé à Voreppe le 23 juin et contenu à Chambéry.
Finalement, les 22 et 24 juin, la France signa les armistices avec l’Allemagne et l’Italie. Le cessez-le-feu prit effet le 25 juin à 0 h 35, mais les dernières garnisons de la ligne Maginot continuèrent à se battre jusqu’au début juillet. Malgré des moyens limités face à un double front, l’Armée des Alpes défendit victorieusement la frontière sur 400 km, appliquant sa devise « On ne passe pas ». En contenant les Italiens et en ralentissant les Allemands, elle évita que le territoire national soit totalement occupé.
Analyse stratégique et tactique
L’un des aspects les plus remarquables de la bataille des Alpes réside dans la stratégie défensive adoptée par les troupes françaises. Conscientes de leur infériorité numérique et matérielle, les forces françaises ont mis en place des défenses en profondeur, utilisant le terrain montagneux à leur avantage. Les fortifications et les ouvrages militaires, tels que les forts de la ligne Maginot alpine, ont joué un rôle crucial dans la résistance contre les forces italiennes et allemandes.
Les soldats français ont également montré une capacité remarquable à mener des opérations de guérilla, harcelant constamment les troupes ennemies et empêchant toute avancée significative. L’utilisation des embuscades, des sabotages et des raids nocturnes a contribué à désorganiser les lignes de communication et d’approvisionnement des envahisseurs, rendant leur progression encore plus difficile.
Par ailleurs, malgré les conditions difficiles et l’issue incertaine de la guerre, le moral des troupes alpines et de la population locale est resté élevé. Les récits de bravoure et de sacrifice des soldats ont galvanisé la résistance, créant un esprit de solidarité et de détermination à défendre le territoire à tout prix. La population locale a souvent soutenu les troupes en fournissant des renseignements, en aidant à la logistique et en participant à la défense des villages et des vallées.
Aujourd’hui, l’héritage de la bataille des Alpes reste gravé dans la mémoire collective française. Les monuments, les musées et les commémorations annuelles rendent hommage aux soldats qui ont défendu leur patrie avec courage et détermination. Cette bataille est un rappel poignant des sacrifices consentis pour la liberté et la souveraineté nationale.
A lire aussi
Les Alpes : un obstacle au cœur de la géopolitique européenne