Le Kazakhstan est d’abord le pays de la steppe, ces vastes plaines aux amplitudes thermiques élevées. Bordées de montagne, elles s’insèrent dans une géographie de l’espace et des échanges qui, de l’Antiquité à nos jours, a fait de cette région un lieu de passages, d’échanges, de rencontres. D’Alexandre aux Mongols, des voyageurs européens aux Soviétiques, l’espace qui est aujourd’hui le Kazakhstan a, d’une façon ou d’une autre, été lié à l’espace européen.
Le Kazakhstan s’étend sur 2,7 millions de km2, soit l’équivalent de cinq fois la France. Le pays se forme le long de la Basse Volga et de la mer Caspienne à l’ouest, pour rejoindre les vertes montagnes de l’Altaï et la frontière avec la Chine, un trait de 3 000 km sur la carte. Du nord au sud, les froides steppes de Sibérie occidentale rejoignent sur 1 700 km les arides déserts de l’Asie centrale et la chaîne des Tian Shan. Le Kazakhstan longe la Russie au nord, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Kirghizistan au sud, et à l’est, la Chine. Le pays est flanqué de hautes montagnes qui, près de la frontière chinoise, atteignent les 5 000 m d’altitude. Dans la région précaspienne, le relief bien différent se situe à 132 m en dessous du niveau de la mer. Dans l’ensemble, un tiers du Kazakhstan s’élève à 300 m au-dessus du niveau de la mer, tandis que la moitié du territoire se situe entre 300 et 500 m au-dessus.
Dans la région de la mer Caspienne et de l’Aral, le climat est continental, mais à peine modéré. Très dur au nord, les températures tombent en dessous des – 30 degrés en janvier et dépassent les 30 degrés l’été. Plus doux dans la partie sud, le froid ne descend généralement pas en dessous des – 4 degrés et la chaleur dépasse fréquemment les 35 degrés en juillet. Les hivers sont rudes, car les régions du centre et du nord sont touchées par de violentes tempêtes quand le nord doit aussi affronter de fortes gelées et des tourmentes de neige jusqu’en mars. Les steppes du nord sont également ouvertes à des courants glacés descendants depuis l’Arctique.
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Les terres, les sables et la roche
Le paysage kazakhstanais est une succession de plusieurs terres et sables. Au nord, le pays profite du « tchernoziom », une terre noire très fertile que l’on retrouve dans plusieurs zones du globe. L’activité céréalière y est intense, malgré la rudesse du climat, et permet au Kazakhstan d’être considéré comme la sixième plus vaste surface agricole utile au monde. On y retrouve surtout des champs de blé sur 75 % des terres cultivées. Plus au sud, les plaines agricoles laissent place à la steppe, formée de sols bruns où le stipa caressé par les vents froids se mêle à la vigoureuse fétuque. Le mot « steppe », d’origine russe, évoque les variétés de stipas, graminées caractéristiques de ce milieu, aux longs stolons (analogues aux rampants du fraisier) et aux racines qui s’enfoncent profondément, capables de résister aux sécheresses prolongées et d’aller chercher l’eau loin dans le sol. Plus bas encore naissent les steppes désertiques. Leurs sols bruns parsemés de terrains salifères laissent croître l’absinthe sauvage. De vastes déserts sablonneux et argileux couvrent la partie sud du Kazakhstan. Une rare végétation pousse sur ces sols gris, salifères, comme le saxaoul, un petit arbre mesurant moins de deux mètres. Le plus important désert, Betpak-Dala, surnommé parfois « steppe de la faim », mêle sable et herbe rase sur 75 000 km2 près de Balkhach. Les zones désertiques ou semi-désertiques couvrent plus de la moitié du territoire kazakhstanais.
Au sud-est, au talon des Tian Shan, les hommes apprécient les plaines forestières aux sols très fertiles grâce à la densité des précipitations. Les effluves de résine émise par les épicéas se mêlent aux odoriférants genévriers, peupliers et tamaris. Ce bol parfumé est relevé par l’air ventilé des monts dont le glaçage blanc conserve la fraîcheur. Au sud-ouest enfin, une zone au climat méditerranéen sec abreuvée par le Syr-Daria permet de cultiver les agrumes, le thé, le figuier et le plaqueminier.
Cette variété des paysages s’explique par l’inégale répartition de l’eau. Si la région est clairsemée d’oasis, la sécheresse touche intensément le centre et le nord sauf la partie occidentale, donc la majeure surface du territoire. Les précipitations sont faibles et l’évaporation y suit un processus rapide. Les cours d’eau évoluent fortement selon les saisons, car leur débit est irrégulier. Forts et gonflés au printemps, ils sont rapidement absorbés par le soleil, les masses d’air, les méthodes d’irrigation et les besoins industriels. Les régions montagneuses de l’Altaï et des Tian Shan sont quant à elles approvisionnées en eau depuis les glaciers.
Dans son ADN géographique, le Kazakhstan central n’est pas un terrain accueillant pour les populations sédentaires qui préfèrent la partie occidentale, la vallée du Syr-Daria, et les limites sud et est à flanc des montagnes. C’est donc un pays de frontières où le lien entretenu avec les voisins est naturellement essentiel.
La répartition géographique des Kazakhs : un pays connecté au monde
Vers le xvie siècle, le territoire kazakh a été réparti entre trois clans ethniques kazakhs (trois zones de pâturages) : la grande horde, la moyenne et la petite. La répartition territoriale ethnique et clanique existe encore aujourd’hui malgré les efforts russes et soviétiques pour la briser, et la grande horde fournit toujours l’élite politique (comme les présidents Nazarbaïev et Tokaïev). Cette division ethnique durable correspond à une répartition géographique du territoire : au sud, les montagnes et les régions au climat méditerranéen le long des routes commerciales connectées au monde pour la grande horde. Au centre et au nord, l’Altaï, la steppe et les oasis avec le lien russe et chinois pour la moyenne horde. À l’ouest, les steppes et déserts avec la Caspienne et la vallée du Syr-Daria pour la petite horde. La position géographique de la grande horde, depuis toujours dirigeante, explique la vision géopolitique en connexion du Kazakhstan.
L’héritage russe et soviétique : urbanisme et exploitation des sols
La Russie puis l’ère soviétique vont apporter deux bouleversements clés pour le Kazakhstan. Saisissant la capacité de production agricole de la région, la Russie sédentarise une partie du Kazakhstan encore peuplée de nomades après la conquête au xviiie siècle. L’actuelle capitale, Astana, est fondée en 1894 par un détachement cosaque qui construit un fort le long de la rivière Ichim, au centre nord du pays. Les caravanes à destination de la Russie s’y arrêtent et une ville se forme rapidement. L’installation du chemin de fer permet alors de relier rapidement les immenses étendues à ses zones dynamiques situées aux limites du pays, et de connecter plus facilement le pays à ses voisins. Astana devient ainsi un nœud ferroviaire important pour sa position centrale et viable. Pour cette raison aussi, elle fut érigée en capitale en 1998.
L’époque soviétique a cruellement touché le Kazakhstan au niveau démographique. Ses politiques de sédentarisation forcée des peuples nomades ont provoqué des centaines de milliers de morts. L’extraction des ressources en pétrole, uranium, cuivre, les essais nucléaires multiples et la mise en culture forcée de la steppe ont durablement abîmé les sols et les paysages. La mer d’Aral, jadis deux fois plus grande que la Belgique, a été complètement engloutie par la culture intensive du coton ouzbek. Il ne reste actuellement que 10 % de son volume d’antan.
Mais l’URSS a découvert les immenses ressources des sols kazakhstanais, et fait de la région une zone de production nucléaire. Dans la région de la Caspienne, les champs pétrolifères soviétiques de Tengiz, Kashagan et Karachaganak sont toujours en activité. S’il laisse de nombreuses séquelles identitaires, écologiques, politiques, l’héritage russe et soviétique a finalement permis au Kazakhstan de construire une force urbaine, puis de lui faire prendre conscience des immenses ressources retenues dans les sols.
L’histoire géographique pluriséculaire du Kazakhstan explique ainsi l’importance des relations entretenues avec les différents voisins, la place centrale du pays dans le commerce avec la Chine, l’Europe et la Russie. L’esprit d’urbanisation et d’exploitation intense des vastes ressources des sols est en revanche un héritage récent, que le Kazakhstan retient comme une force pour sa modernisation.
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