Philosophe à la postérité immense, Hegel a cherché à comprendre la politique et l’histoire. Entretien avec Thibaut Gress, professeur de philosophie en khâgne.
L’entretien podcast est à retrouver ici. Le texte ci-dessous est une retranscription d’une partie de l’entretien.
JBN : Bienvenue pour une nouvelle émission de Confits. Je suis ravi de vous retrouver pour cette nouvelle série d’été consacrée à la philosophie politique et aux grands auteurs. Vous pouvez retrouver nos autres émissions sur notre site internet comme vous pouvez vous abonner à la revue. Sur notre site, comme en kiosque, vous pouvez aussi retrouver notre dernier numéro, consacré au terrorisme, la menace sans fin et notre numéro spécial consacré à la santé. Cette semaine nous nous éloignons de ces questions pour nous approcher d’un grand auteur de la philosophie politique, à savoir Georges Friedrich Hegel, né en 1770 et décédé en 1831 à Berlin. Il est peut-être l’un des représentants avec Kant et Nietzsche, de la philosophie allemande. Une œuvre monumentale, abondamment étudiée par les étudiants et les universitaires, mais pas seulement. Comme nous allons le voir, sa pensée a été extrêmement importante et a contribué non seulement à irriguer la pensée d’autres philosophes, mais aussi à influencer la manière dont la politique a été pratiquée. C’est donc de Hegel que nous allons parler cette semaine avec mon invité Thibaut Gress. Merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation, nous avions fait une précédente émission qui était consacrée à Descartes et dans le numéro de Conflits consacré à la géopolitique de la peur vous aviez rédigé un article où vous étudiez notamment Machiavel. Vous êtes professeur de philosophie en Khâgne au lycée Blomet à Paris, vous avez publié de nombreux ouvrages, dont La philosophie en soixante livres qui vient de paraître chez Ellipses avec plusieurs participants. Vous avez notamment rédigé les rubriques consacrées à Hegel que l’on connaît notamment pour ses principes de la philosophie du droit. Est-ce que l’on peut dire que c’est son maître ouvrage, notamment en matière de philosophie politique ?
TG : Alors oui, c’est une sorte d’excroissance du troisième moment de l’encyclopédie qu’il avait intitulée philosophie de l’esprit et en particulier l’esprit objectif et il va développer de manière plus approfondie et précise une philosophie politique qui n’est pas une théorie politique mai qui est véritablement une manière de penser le sens des concepts qu’on utilise en politique. Ça va prendre la forme en effet des principes de la philosophie du droit en 1820 et qui constitue sans doute une des portes d’entrée les plus impressionnantes dans la pensée hégélienne.
JBN : Hegel est un penseur, et souvent on a tendance à couper les penseurs de leur époque. C’est aussi quelqu’un qui a été marqué par son temps, la Révolution française, l’aventure napoléonienne, il a pris parti pour Napoléon et a beaucoup voyagé pour ce faire, il était à Iéna en même temps que Napoléon ; ensuite il a enseigné à Berlin. Quelle est la part qui est liée aux évènements historiques dans sa pensée et y a-t-il une partie plus intemporelle des principes généraux qu’il aurait pu finir ?
TG : Alors l’un des points fondamentaux de la philosophie hégélienne, notamment en philosophie politique, c’est qu’il n’y a pas de principe intemporel pour une raison qui tient à la question de ce qu’il appelle l’abstraction. C’est-à-dire quand la pensée atteint son degré le plus élevé, elle ne peut pas d’un côté poser des principes qui ne seraient pas soumis au temps et constater de l’autre côté le temps qui passe. Si on procède ainsi on entre dans des scissions et si on entre dans des scissions on est dans des abstractions. Par conséquent chez Hegel l’une des grandes exigences, qui rend sa philosophie très compliquée, c’est d’essayer de penser ensemble des exigences complémentaires. En l’occurrence la question des principes doit être pensée en même temps que le développement historique. On ne peut pas penser un principe indépendamment de son développement et de ce point de vue là votre question est très juste puisque le temps que Hegel a à penser est un temps napoléonien, de bouleversements. Rétrospectivement il peut ressaisir le bouleversement du temps dans une pensée des principes.
JBN : Quelle est justement pour lui cette distinction que vous avez faite aujourd’hui entre philosophie politique et théorie politique ?
TG : C’est la chose, je pense, la plus difficile à comprendre avec Hegel au-delà de la question politique, c’est qu’il n’y a pas de théorie au sens traditionnel du terme. Hegel n’a pas de position propre sur quelque sujet que ce soit. Vous ne pouvez pas demander à Hegel sa position sur la question de la conscience, du désir, etc. Autrement dit Hegel ne parle pas en son nom propre et ce n’est pas en son nom propre qu’il donne une analyse d’une situation. Hegel, s’il procédait ainsi, entrerait en contradiction avec l’idée même qu’il ne faut pas être dans la scission et dans l’abstraction. Sinon il y aurait d’un côté la réalité, de l’autre Hegel, et Hegel aurait un point de vue extérieur à part réalité sur laquelle il donnerait son point de vue. Ce qui en fait constitue la plupart des philosophies classiques qui sont des théories. Ce que Hegel essaye de faire c’est de montrer que la philosophie que lui pratique dépasse cette scission entre celui qui a un point de vue sur le réel et le réel, entre l’être et la pensée, sinon on en reste toujours à un point de vue extérieur. Par conséquent la différence entre théorie et philosophie c’est que dans la théorie j’ai un point de vue de l’extérieur et j’interprète la réalité qui me demeure externe tandis que dans la philosophie j’essaye de saisir de l’intérieur la nécessité conceptuelle qui est à l’œuvre. Hegel analyse la notion même de compréhension, que veut dire comprendre d’un point de vue philosophique ? À quelle condition peut-on dire d’une réalité qu’elle est compréhensible ? Ce qu’il essaye de montrer, je crois, c’est qu’on peut dire qu’une réalité est compréhensible c’est à partir du moment où elle est de même nature que moi, où elle est homologue à moi. C’est la raison pour laquelle la philosophie essaye de montrer que la réalité est rationnelle en tant qu’elle est homologue à ma raison. Le rationnel est le reflet de la raison, c’est ce pourquoi le réel est compréhensible. Ce n’est pas une théorie sur le réel c’est une compréhension de l’intérieur même de la réalité, ce qu’il va appeler l’effectivité.
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JBN : En ce qui concerne la place de l’histoire chez Hegel, on parle beaucoup de sa philosophie de l’histoire, qui est restée beaucoup dans la conscience commune cette notion de dialectique, qui n’est pas la dialectique marxiste par ailleurs, qu’est-ce qu’il n’entend pas cela ?
TG : La question de l’histoire là aussi il faut faire attention. Il n’a pas une théorie de l’histoire et ce n’est pas un historien. C’est quelqu’un qui simplement se demande comment se fait-il que l’histoire soit compréhensible, comment se fait-il que quelque chose qui est en devenir, en mouvement, en permanent changement puisse faire l’objet d’une compréhension par l’esprit humain ? Il va essayer de montrer qu’une philosophie de l’histoire revient à montrer que dans le champ historique, dans le théâtre historique, se manifeste la même chose que celui qui observe l’histoire. En l’occurrence la raison. Les hommes qui agissent historiquement agissent rationnellement, raison pour laquelle leurs actions sont compréhensibles, elles sont rationnelles ; et celui qui observe l’histoire l’observe aussi rationnellement, c’est-à-dire essaye de ressaisir dans l’histoire ce qui va être compréhensible. L’Histoire est bien le théâtre de la raison, on comprend pourquoi il fait une philosophie de l’histoire plus qu’une théorie de l’histoire. La dialectique c’est, si j’ose dire, le terme est inadéquat, plutôt méthodologique. C’est une manière de suivre le développement de la pensée à même le réel. Chez Hegel, il faut refuser dès le point de départ la scission entre la pensée et le réel. Si on refuse une telle scission, ça veut dire que le mouvement même de la pensée est en même temps le mouvement même du réel. C’est-à-dire pour le dire autrement que si le réel est compréhensible, si je peux comprendre ce qui se pose dans la réalité, je ne peux rien faire d’autre que percevoir le mouvement même de ma pensée comprenant le réel, donc le mouvement de la pensée et le mouvement du réel sont les mêmes. La dialectique c’est une sorte de cheminement sur cette identité entre la pensée et l’être.
JBN : Pour revenir sur cette notion d’histoire comme théâtre de la raison, du point de vue de l’historien la rationalité de l’histoire n’est pas toujours évidente. Hegel appartient ou vit pendant cette période du romantisme allemand où on rencontre des gens comme Schelling ou Hölderlin, on est dans une dimension plus sentimentale, est-ce que cette notion de raison dans l’histoire est tout à fait froide et mécanique ou prend en compte la notion de passion humaine qui intervient et fait que toute décision n’est pas entièrement rationnelle ?
TG : La raison pour comprendre ce que c’est chez Hegel il faut bien voir que c’est tout simplement la question du sens. C’est une manière de dire qu’il y a du sens dans l’histoire et la philosophie doit rendre compte du sens de toute chose et en particulier de l’histoire. Si l’histoire a du sens, elle doit être rationnelle et être le théâtre d’avions rationnels. Je précise cela parce que ça veut dire qu’il n’entend pas rationnel au sens de l’économie classique par exemple. Ce n’est pas suivi d’ un intérêt particulier en vue de l’optimiser ni au sens où l’entendait un Grec, ça n’est pas le logos qui serait le développement dans un discours ordonné d’une pensée ou d’une vérité. La raison chez Hegel c’est le sens. Il essaye de montrer que le sens est l’idée que si je comprends quelque chose chez qu’il y a une homologie entre ce que je comprends et moi-même. La raison est à la fois la mienne et celle des acteurs qui se développent dans l’histoire. Maintenant vous avez parfaitement raison il est dans une période romantique d’exhalation des passions, Hegel connaît très bien tout cela et il voit par ailleurs que quand les acteurs agissent ce n’est pas uniquement par raisonnement au sens borné du terme. Il va considérer que si la raison est du côté du sens elle n’implique pas qu’elle soit uniquement du côté du raisonnement. Le sens est plus vaste que le raisonnement. La raison chez Hegel déborde le cadre du simple raisonnement. Par conséquent, il va y avoir une sorte de débordement de la raison vers la question des passions. Pour le dire plus simplement pour qu’un sens s’accomplisse il n’a pas besoin de faire appel qu’au raisonnement et à la rationalité pure, il peut tout à fait faire appel aux passions. Si par exemple vous prenez une guerre extrêmement violente dont le sens est pourtant très clair, les guerres de la révolution, défendre de manière nationale pour l’une des toutes premières fois dans l’histoire via une armée nationale les conquêtes de la révolution. Le sens est très clair, on peut le comprendre, en même temps pour qu’il puisse s’accomplir il va falloir faire appel à un élément, que sont les passions, qui vont mouvoir les hommes de telle manière que le sens s’accomplisse. Les passions sont au service de la raison au sens où elles sont au service du sens et elles deviennent ainsi compréhensibles pour l’observateur de l’histoire.
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JBN : Quand il parle de la philosophie du doigt qu’est-ce qu’il entend par droit ? C’est un terme polysémique, on a une autre émission de cette série consacrée à la vision du droit chez Hayek qui est une vision extrêmement juridique si je puis dire, que les avocats et juristes comprennent facilement en ce qu’il correspond à ce qu’on enseigne dans les facultés. Chez Hegel ça ne semble pas être cette vision-là, du moins être le sens qu’il donne adroit.
TG : C’est une question qui est très difficile d’autant plus que le titre des Principes de la philosophie du droit comprend la notion du droit naturel. C’est quelque chose qui travaille Hegel jusque dans ses jeunes années, en 1802 il publiait un article très important sur le droit naturel et par la question du droit il faut entendre la question du droit naturel. Si vous me permettez, je vais faire un développement un petit peu long sur la question. C’est un vrai problème de distinction d’avec l’approche libérale des choses. Hegel défend la notion du droit naturel, mais il ne la défend ni dans le sens antique qu’on a fini par retrouver avec les stoïciens ni même dans le sens d’un Hobbes ou d’un Rousseau, c’est-à-dire une espèce de nature humaine universelle dans laquelle seraient inscrits des droits. Pourquoi ? La raison fondamentale chez Hegel, c’est ce qui le distingue des libéraux, c’est que la notion de droit naturel, notamment la version moderne du droit naturel, suppose qu’on pourrait penser un individu dans un état de nature, indépendamment de toute forme de société, de tout cadre institué, comme si cette pensée avait du sens. Or, premièrement, ça, c’est typiquement une abstraction, je prends un individu, j’en fais une entité à part, je le fais abstrait de son cadre social et je fais comme si ça avait du sens de le faire. À ses yeux c’est typiquement une abstraction, une mutilation et donc au sens hégélien c’est faux. Deuxièmement il constate que le droit naturel tel que les modernes le conçoivent à beaucoup de mal à se concilier avec le droit positif. Comme on a pensé le droit naturel à partir d’une abstraction, c’est-à-dire l’individu privé du cadre social, ça ne rejoint quasiment jamais la positivité du droit. Donc le droit naturel, tel qu’il est pensé par les modernes est quelque chose de condamné à ne pas s’accomplir, à ne jamais devenir effectif. Il va faire une chose un petit peu perturbante pour des juristes, il va redéfinir la notion de droit naturel en disant que celui-ci est la rationalité du droit positif. Le droit naturel c’est le fait même que le droit positif soit compréhensible et corresponde à un sens possible. Donc ça n’est plus du tout le droit inscrit dans la nature humaine de manière abstraite et indépendamment de la réalité sociale. Ça devient la rationalité même du droit positif et qui permet au droit positif d’avoir un sens compréhensible par la raison.
JBN : Comment va-t-il ensuite articuler ce droit naturel au droit positif, avec l’État qui produit des décrets ?
TG : Si on pose la question ainsi, la question de l’articulation ça veut dire que d’emblée vous êtes dans la scission entre les deux, d’emblée vous partez avec un droit naturel dont on se demande comment on le rattache au droit positif. C’est exactement ce qu’il conteste. Ce qu’il va se demander tout simplement c’est à quelle condition le droit positif est-il finalement un droit, a-t-il le sens du droit ? La question que je viens de poser est exactement celle du droit naturel, mais qui engage le refus de la distinction initiale que font les auteurs modernes entre droit naturel et droit positif. Le droit naturel est pris dans une abstraction qu’il conteste dès le départ. Le droit naturel et le droit positif, d’une certaine manière, son tua même chose pour Hegel. C’est simplement l’idée que le droit positif ait un sens. Après la question de l’est est une question très compliqué chez Hegel parce que là aussi contrairement à ce qu’on put croire l’État n’est pas une chose, il n’est pas une institution réifiée qui ferait face au citoyen, l’État est une dynamique, chez Hegel, qui permet à la société civile d’équarrir son unité, une cohérence qu’elle n’a pas en tant que collection d’individus poursuivant des intérêts particuliers. L’État c’est la dynamique d’unification, de cohérence de la société civile. La question du droit par rapport à celle de l’État, Hegel la traite en grande partie par rapport à la problématique de la codification. Il y a tout un débat autour du Code civil pour savoir si oui ou non il faut accepter un code civil qui a été proposé ou imposé par Napoléon, il y a des débats avec Savigny où Thibaut qui sont les grands juristes de l’époque. Hegel considère que la codification doit être typiquement l’œuvre de l’État en tant qu’unificateur de droits qui étaient dispersés. On voit ici comment l’État va se rapporter à la question du droit. La codification est une ouverture en devenir, une dynamique d’unification qui permet de saisir le rôle de l’État chez Hegel.
JBN : Vous évoquez la notion d’État, est-ce que réfléchir à ce que pourrait-être un bon gouvernement fait partie de sa réflexion ? Considère-t-il au contraire que c’est de la théorie qui ne rentre pas dans son analyse ?
TG : Vous avez totalement raison, il considère que c’est une question de théorie philosophique, une théorie qui selon untel donnerait des caractéristiques particulières à l’État et au gouvernement pour que ce soit un bon État et un bon gouvernent, encore une fois ça n’est pas du tout sa préoccupation. Hegel va plutôt essayer de comprendre les conditions auxquelles l’État peut être conforme à son concept. C’est-à-dire dans la mesure où l’État est une dynamique, un processus, encore faut-il comprendre conceptuellement le sens d’un tel processus, dans ce cas-là l’État peut-être plus ou moins conforme à la processualité dont il fait preuve. C’est ça véritablement l’exigence de Hegel, que l’État soit conforme à son concept, ça n’est pas qu’il soit respectueux d’un certain nombre de critères qui définiraient selon Hegel le bon État.
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JBN : Est-ce qu’il y a une autorité ou des personnes qui vont faire en sorte que l’État soit respectueux de ce concept ?
TG : Oui, vous soulevez le problème de la souveraineté, c’est un point très intéressant qui permet de comprendre ce que Hegel reproche à Rousseau et de comprendre toute l’admiration et la critique qu’il adresse à Rousseau et par extension toutes les critiques qu’il adresse aux théories contractualistes. Hegel, quand vous regardez l’ensemble des principes de la philosophie du droit, considère qu’il y a un acquis de la modernité sur lequel il ne revient jamais, c’est l’acquis de la volonté individuelle. Il est tout à fait évident, aux yeux de Hegel, que l’histoire passant le fait est qu’on ne peut rien construire en dehors de la volonté individuelle et qu’elle est le fondement de tout et en particulier du politique. De ce point de vue là on a affaire à un penseur contractualiste qui va essayer de penser par sommation des volontés individuelles un contrat où tout le monde trouve son compte et son intérêt. Or justement Hegel pointe un problème énorme, qu’on trouve à mon avis de manière maximale chez Rousseau, c’est qu’il y a une dimension magique chez Rousseau, presque alchimique, où la volonté des individus devient miraculeusement la volonté du citoyen au sein d’un corps social dont on ne comprend pas très bien comment il se forme historiquement parlant. Contre cette espèce de miracle de la transformation de volontés individuelles en corps social qui partagerait des intérêts communs, Hegel va avoir un argument qui est très fort qui consiste à dire que la grande erreur des modernes c’est tout simplement d’avoir cru que l’individu était un fait premier. Hegel dit évidemment que la volonté individuelle est un fondement, ça n’implique pas qu’elle soit première. Les individus sont en fait des résultats, ce ne sont pas éléments abstraits qui précèdent la suite, ce sont les résultats d’une formation sociale et l’originalité de Hegel, qui fait que ce n’est pas un marxiste par ailleurs, c’est que tout en admettant que l’individu est un résultat d’un monde social il ne nie pas l’individualité et en maintient même la dimension de fondement par la suite. Ce qu’il essaie même de montrer c’est qu’en réalité l’individualité, qui est le point de départ, mais pas l’élément premier, doit être prise en compte pour former la question politique.
JBN : Oui, c’est une pensée qui est assez originale. Est-ce qu’il se positionne par rapport à la Révolution française ? Les penseurs du XX° siècle vont être adhérents plus ou moins, ou contre-révolutionnaires. Est-ce que l’événement révolutionnaire entre en compte dans sa réflexion ?
TG : Oui tout à fait, la révolution occupe même un pan assez important de la Phénoménologie de l’esprit en 1807, c’est à ses yeux un événement nécessaire, pas au sens moralement nécessaire, mais qui fait partie de l’avènement nécessaire des choses quand on comprend les nécessités internes au développement historique. Il comprend même que la terreur faisait partie de manière nécessaire à ce que contenait 1789 et à cet égard c’est pour lui un événement fondamental à partir duquel on ne peut plus penser comme s’il n’avait pas eu lieu. Hegel n’est pas un réactionnaire ni un conservateur, mais ça n’est pas non plus un révolutionnaire au sens d’un progressiste. Ça n’est pas quelqu’un qui considère qu’on doit poser avant même que les choses aient lieu la direction qu’elles devraient emprunter pour que le progrès ait lieu. Vous connaissez la formule qui est dans la préface des Principes de la philosophie du droit, la chouette de Minerve ne prend son envol qu’à la tombée de la nuit, ça veut dire qu’un philosophe n’a pas à dire ce qui doit arriver par la suite. Un philosophe doit impérativement se ressaisir de ce qui a eu lieu, comprendre la nécessité interne ce qui s’est passé et absolument pas statuer sur ce qui serait souhaitable et sur le type de progrès qui seraient en attente. C’est quelqu’un qui admet la nécessité des choses, les choses ayant eu lieu on ne peut plus revenir en arrière, ça l’empêche d’être réactionnaire et en même temps dans la mesure où la philosophie est une réflexion sur ce qui s’est passé, une compréhension de ce qui s’est passé il ne peut pas non plus être progressiste ni auteur d’utopies.
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JBN : Quelle est l’importance de Hegel en son temps, pourquoi est-ce qu’on le lit encore aujourd’hui, pourquoi est-ce qu’on l’a lu à son époque ? Il a une influence réelle de son vivant ?
TG : Il a une influence fondamentale parce qu’il appartient à tout un cercle dès sa jeunesse qui constitue l’essentiel de la philosophie allemande à partir de 1801 – 1802. Par ailleurs il va avoir progressivement des positions institutionnelles de plus en plus importantes, vous le rappeliez au tout début il va finir par enseigner à Berlin ce qui n’est pas rien, on y a de fait une influence. De plus il va y avoir une sorte de fascination, peut-être pour la complexité même du système, qui va donner envie d’essayer de comprendre, on se dit que si c’est tellement difficile c’est que ça doit être profond, ça doit être juste. Ça va donner psychologiquement une influence à Hegel sur ses contemporains comme par la suite. Si vous regardez la postérité immédiate ça bifurque immédiatement, vous avez les jeunes hégéliens qui sont de gauche, Marx, Bauer, Engels, Max Stirner aussi qui vont tirer Hegel vers des pensées socialistes voire plus, et les vieux hégélien, conservateurs ou de droit, qui vont y voir un système de refus de l’utopie, du progressisme pour les raisons qu’on a dits auparavant et qui vont tirer Hegel vers plutôt une pensée conservatrice. Très rapidement la réception même de la pensée de Hegel n’est pas d’une clarté incroyable.
JBN : Oui c’est le moins qu’on puisse dire, du moins pour l’air expérimenté lorsque j’étais étudiant ce n’était pas toujours extrêmement clair, Mais c’est intéressant de voir que de par la complexité de son système Hegel a pu être utilisé par des mouvements assez variés, et les inspirer, de Marx à des mouvements de droite. Ça montre aussi la richesse d’une pensée qui a pu abreuver différentes pensées, différentes personnes.
TG : Oui ça tient, je crois, au fait qu’on est toujours un peu frustré à la première lecture de Hegel dans la mesure où il n’y a pas de théorie. On peut tout à fait prendre le système hégélien puis rajouter une théorie et selon la théorie qu’on y ajoute ça penchera à gauche, à droite, au centre, où on veut d’une certaine manière. C’est l’absence même de théorisation chez Hegel qui fait qu’on peut le retrouver un petit peu partout.
JBN : Est-ce que la notion de morale ou d’éthique a un sens chez Hegel, est-ce que ça rentre dans sa réflexion philosophique ?
TG : Oui ça rentre totalement dans sa réflexion philosophique en un sens qui est très déroutant dans un premier temps puisque la morale appartient aux principes de la philosophie du droit. C’est-à-dire qu’une partie entière y est consacrée, il n’y a pas de philosophie morale autonome chez Hegel, c’est assez déroutant. Ça tient au fait que chez Hegel, c’est toujours la même difficulté de départ, il y a un refus structurel de penser de manière abstraite. Si on dit qu’il y a un domaine autonome de la philosophie morale, même de la moralité, c’est à dire des intentions subjectives et bien on pourrait penser les intentions subjectives indépendamment de ce qui est faisable, indépendamment des conditions concrètes dans lesquelles on peut agir. Or la morale chez Hegel, plus précisément la moralité, ce n’est pas l’examen des intentions, ce n’est pas uniquement l’examen de la bonne volonté pour parler comme Kant. C’est l’examen conceptuel de ce qu’une bonne volonté dans des circonstances historiques et sociales données peut effectuer. Or ce que peut effectuer concrètement une volonté se définit par les normes en vigueur. De ce fait, il est strictement imposable pour un penseur qui refuse l’abstrait de séparer la question politique et la question du droit. C’est la raison pour laquelle la morale se trouve dans les Principes de la philosophie du droit.
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JBN : Sur quels fondements va-t-il établir cette morale ? Beaucoup de penseurs la fondent sur le droit naturel, Hegel en a une vision différente, du moins de la philosophie antique, et à la fois il faut bien qu’il y ait des principes moraux qui ne vont pas changer, qui sont intangibles.
TG : Pas forcément, un principe intangible c’est un principe qui fait abstraction du temps, donc c’est abstrait, donc ça n’est pas hégélien. Si on le disait de manière nietzschéenne ce serait une fuite devant le réel un principe intangible, ce serait une manière de ne pas assumer le temps ni le devenir et Hegel de ce point de vue là à mon avis préfigure Nietzsche. Ce qu’il va faire c’est d’abord dire que la philosophie antique, du point de vue éthique, est inactuelle, c’est-à-dire historiquement non pertinente ; aujourd’hui le fait est qu’on ne peut pas penser la moralité indépendamment d’une subjectivité et d’une volonté individuelle. Par ailleurs il va appeler, c’est un concept très célèbre chez Hegel, sittlichkeit, l’éthicité en français, drôle de néologisme, l’ensemble des mœurs et coutumes dans lesquelles s’insère l’action d’un agent ou d’un sujet. C’est une articulation intimement entremêlée de la volonté d’un sujet relativement à des normes éthiques qu’en réalité le sujet a incorporée. Il n’y a pas d’un côté le sujet qui agit et de l’autre les mœurs et coutumes d’une époque qui lui serait extérieure. En réalité la sittlichkeit c’est quelque chose qu’on incorpore, qui finit par aller de soi et qui fait que ce que je veux finir par coincer avec les mœurs d’une époque. Ce ne sont pas des normes externes qui s’imposent à moi, ce sont des normes qui structurent ma volonté et qui font que ma volonté finit par s’accorder aux normes. Par exemple, je pense que personne ne veut sortir nu, tout le monde veut être habillé. Il est évident que c’est un système éthique qui veut cela, il est évident en même temps que c’est bien ce que je veux. On voit typiquement ici un phénomène moral au sens de Hegel, voilà ce que je veux, ça correspond à la sittlichkeit, ça correspond à un état des mœurs et à une situation géographique des mœurs, ça s’accorde et ça correspond à ce qu’il appelle ici la morale.
JBN : Cette morale peut changer justement, ou considérant que le temps n’est pas de son registre il n’a pas à réfléchir à une évolution de la morale ?
TG : Oui la morale c’est comme l’État, ça n’est pas une chose et donc ça n’est pas une réalité intangible qui ferait face au sujet. La morale c’est un processus dans lequel entre en dialectique la volonté individuelle et les cours et donc c’est mouvant. C’est quelque chose qui évolue en permanence, ça n’est pas un corpus doctrinal qui serait fixé une fois pour toutes par une révélation ou autre.
JBN : Quelle est chez lui sa réflexion sur la liberté ? Dès qu’on parle de politique la liberté humaine est la grande question, est-ce un élément qui a fait partie de sa réflexion de savoir si l’homme peut être, ou non, libre ?
TG : Alors oui, c’est sans doute le mot le plus important de la pensée de Hegel bien au-delà de la pensée politique. La liberté chez Hegel n’est ni cantonnée à la sphère morale ni à la sphère politique. La liberté, jusqu’à un certain point, on peut dire que c’est la caractéristique fondamentale de l’esprit. En ce sens, et c’est ce qui est compliqué à saisir, que la liberté n’est ni une propriété de la volonté comme le libre arbitre par exemple et ce n’est pas non plus quelque chose qui aurait à voir avec le choix. Ce sont des choses totalement différentes. La liberté chez Hegel c’est l’action de l’esprit, quel que soit le domaine de telle manière que, pour reprendre sa célèbre définition, l’esprit soit chez lui en son autre. Qu’est-ce que ça veut dire ? Il faut se représenter la liberté comme un phénomène de colonisation La liberté c’est la possibilité pour l’esprit de se retrouver lui-même dans ce qu’il n’est pas. C’est-à-dire le monde extérieur, qui m’apparaît comme extérieur dans un premier temps finit par avoir un certain sens. Quand je comprends que le sens que revêt le monde extérieur est le sens de l’esprit, ça veut dire que l’esprit est bien chez lui dans le monde extérieur. Par exemple si je vous regarde et que je vois en vous un être humain il est évident que je conceptualise ce que vous êtes et que si j’analyse ce qui se passe vous n’êtes plus pour moi un être extérieur dans la mesure où le sens que vous avez procède de l’esprit, et donc mon esprit se retrouve bien en vous, dans le sens qui est le vôtre, et n’est pas un étranger par rapport au monde extérieur. Il est chez lui dans le monde extérieur c’est-à-dire que l’esprit retrouve son propre sens dans le monde des choses. De ce fait ça revient à dire une chose très simple : la liberté, ça revient à dire que le monde n’est pas un obstacle, le monde n’est pas un étranger, le monde est ce qui m’est familier par ce que je peux retrouver en lui le sens de l’esprit.
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JBN : Par rapport à cette question de liberté, comment conçoit-il le rapport entre la personne humaine et la structure étatique ou sociale, et comment la personne peut établir sa liberté par rapport à cette structure ?
TG : La personne, vous avez raison d’aller sur ce terrain-là, c’est la base du droit, le droit chez Hegel provient essentiellement de la personnalité et pour rebondir sur la question précédente il y a un lien intrinsèque entre la personnalité et la liberté. C’est-à-dire qu’il y a un lien intrinsèque entre la base du droit et la liberté. Pour établir des relations de droit ça revient tout simplement à dire que le monde extérieur peut de mon point de vue de personne recevoir progressivement un sens juridique. C’est-à-dire que je peux tout à fait coloniser de manière extensive le monde pour l’y conférer un sens juridique, c’est-à-dire que la personne s’étend, colonise le monde pour lui donner un sens juridique. Par conséquent, l’État qui est lui-même un processus et pas une chose va servir, entre autres choses, à être le processus qui garantit l’extension du droit à partir de la personne.
JBN : Autre question sur ces questions de personne, liberté et État : est-ce que Hegel a pensé l’ordre international ? On connaît le principal ouvrage de Kant sur cette question-là, sur la paix perpétuelle, est-ce que ça fait partie de la réflexion de Hegel cette question de guerre, de paix, d’ordre entre les nations, de constitution d’ordre international ?
TG : Oui tout à fait, Hegel a lu de très près L’idée d’une histoire universelle d’un point de vue cosmopolitique de Kant qui est vraiment un ouvrage essentiel pour comprendre Hegel et il lui répond d’une certaine manière. En sachant que Hegel est quelqu’un qui connait très bien la question du droit des gens, qui connaît très bien Grotius, qui connaît très bien tous les débats du XVI° et du XVII° que Kant reprend lui-même en partie. Pour durer assez rapidement, Hegel considère qu’on ne peut pas dépasser le cadre étatique qui est un stade maximal du point de vue politique, un dépassement fédéraliste des états nations est à ses yeux impossible pour deux raisons. Encore une fois ça n’est pas la théorie hégélienne, du point de vue de Hegel ce serait plutôt la nécessité du concept d’État qui n’est pas compatible avec la possibilité de dépasser l’État. Pourquoi ? Parce qu’ en fait un État, c’est la constitution d’un peuple, c’est la dynamique par laquelle une société trouve sa cohésion, sa cohérence et finalement devient un peuple. Il faudrait conjuguer cela par la vision de l’esprit objectif et de l’esprit universel, mais ça deviendrait assez compliqué, je reste uniquement sur le terrain de l’État. Si conceptuellement l’État c’est finalement le processus par lequel une société trouve sa cohérence et par lequel le peuple, si je puis dire, devient peuple, il serait tout à fait contradictoire pour le concept d’État que l’on aille au-delà de l’État. Ça voudrait dire qu’on devrait aller par-delà les peuples et là on sortirait totalement du domaine politique. Là Hegel considère de ce point de vue là qu’un concept de fédération d’États-nations est un concept contradictoire. La deuxième raison c’est que la constitution du peuple correspond à ce que Hegel correspond à ce que Hegel appelle un sujet. Un sujet chez Hegel c’est une totalité organique qui agit comme un, de manière unifiée. Or le sujet c’est le terme ultime de la philosophie chez Hegel, on ne peut jamais dépasser le point de vue du sujet, c’est à dire en fait de l’unité. Si vous allez au-delà du peuple organisé par l’État vous tombez dans des choses tout à fait aberrantes du point de vue de la constitution de l’unité, on ne peut pas constituer une unité au-delà d’un sujet, or le peuple étant un sujet aller au-delà serait aberrant.
JBN : On pourrait lui répondre que ça, c’est une pensée typiquement allemande parce que justement les Allemands pensent l’État et le peuple, en Italie ça a été tout autre parce que longtemps il y avait un même peuple et une multitude d’États.
TG : Oui, c’est la raison pour laquelle aux yeux de Hegel l’État italien n’a pas encore atteint son concept.
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JBN : Oui et il l’atteindra 50 ou 60 plus tard avec la réunification italienne.
TG : Ce que vous dites va plutôt dans le sens de Hegel.
JBN : C’est vrai, pas au sens où il l’écrit, mais dans le processus historique ça confirme Hegel et ça montre aussi que sa pensée, d’abord s’inscrit bien dans le contexte allemand, et peut avoir des conséquences politiques précises. Tout à l’heure vous évoquiez les influences que ça a pu avoir notamment dans le mouvement d’unité allemande avec Bismarck où des choses ont été reprises. Dernière question Thibaut Gress, puisque nous arrivons au terme de notre entretien, sur la postérité de Hegel on a évoqué tout à l’heure en disant qu’il y avait des gens extrêmement variés qui avait repris sa pensée, mais aujourd’hui dans l’histoire de la pensée européenne quelle est la place de Hegel ? On voit qu’il est étudié en France, dans les programmes officiels, il est réédité en français, ce qui est assez rare, pourquoi est-ce important de le connaître ?
TG : Alors c’est une question assez vaste, encore une fois quand on étudie Hegel c’est étrange parce qu’on n’étudie pas des théories donc pas des positions sur telle ou telle question. Cependant du point de vue historique il est indispensable pour comprendre le courant marxiste parce que le marxisme va reprendre la dialectique tout en la renversant c’est-à-dire en considérant que la pensée n’est certainement pas un point de départ, mais au contraire est un produit de structure économique qui échappe elle-même à la pensée, mais qui la produis. Par la suite Hegel va être au centre d’un certain nombre de discussions, d’une part parce que Popper a consacré un livre La société et ses ennemis en partie à Hegel et en partie à Marx. C’est intéressant parce que dans mon souvenir Popper n’avait pas les livres de Hegel sous les yeux lorsqu’il a écrit, donc se trompe énormément et dit même des choses qui sont aberrantes sur Hegel, mais ça a remis Hegel au centre de l’attention, notamment des libéraux. Il va y avoir toute une discussion, notamment avec Habermas, toute cette partie-là de la pensée allemande contemporaine, il y aura le séminaire d’Alexandre Koev sur les hautes études, Merleau Ponty, Queneau, Aron, etc. qui en France vont créer une réception de Hegel tout à fait fantastique. Il y a aussi des écrits d’Éric Weil, assez importants, je pense. Pour des raisons diverses, soit de combat chez Popper qui voit chez Hegel une préfiguration du totalitarisme, soit chez des marxistes comme Koev qui vont se dire qu’il faut comprendre Hegel pour comprendre Marx, soit encore pour des raisons de reconnaissance qui a une place centrale chez Hegel, on trouve ça chez Axel Honneth, chez Habermas au départ. Pour des motifs très différents, Hegel reste d’actualité. Le point sur lequel Hegel reste extrêmement fécond c’est que c’est quelqu’un qui arrive à penser en même temps l’importance de l’individu et de la volonté individuelle et en même temps l’idée que l’individu ne devient véritablement lui-même qu’au sein d’une communauté. Il ne mutile ni l’un ni l’autre. Quand on comprend ça, qu’on n’est pas un individu face à une collectivité qui nous serait extérieure et qu’on n’est pas non plus dissous dans la collectivité on peut comprendre l’utilité de Hegel pour saisir les problèmes sociaux et politiques.
JBN : Merci beaucoup, Thibaut Gress, je rappelle que vous êtes professeur en khâgne au lycée Blomet, que vous avez publié divers ouvrages dont un ouvrage collectif chez Ellipses qui s’intitule La philosophie en soixante livres très commode pour les élèves de terminale ou les étudiants qui ont besoin d’avoir des fiches essentielles sur les grands livres de la philosophie. Je renvoie également nos auditeurs à nos autres émissions de cette série d’été consacrée à la philosophie politique que vous pouvez retrouver sur notre site internet de Conflits.