Apocalypse : la guerre des mondes, 1953-1965

18 octobre 2019

Temps de lecture : 3 minutes

Photo : Visite officielle du président Khrouchtchev aux Etats-Unis. Auteurs : MELCHER-DALMAS/SIPA Numéro de reportage : 00604336_000020

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Apocalypse : la guerre des mondes, 1953-1965

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France 2 propose une nouvelle série d’Apocalypse consacrée à la Guerre froide. Analyse des épisodes 4 et 5, qui couvrent les années 1953-1965.

 

Ce quatrième épisode débute par la mort de Joseph Staline en mars 1953. Les auteurs reviennent sur les conséquences de la disparition de l’homme de fer source d’espoirs pour les pays occupés, mais aussi de craintes pour le monde : lequel des complices de Staline lui succédera et qu’elles en seront les conséquences ?

Une image résolument positive du Kremlin à la suite du décès de Staline est offerte aux téléspectateurs. Les actions de Lavrenti Beria cumulant les postes de ministre de l’Intérieur et de vice-président du conseil des ministres de l’URSS lui permettant de jouir d’une relative liberté d’action nous sont égrenées (amnistie pour un million de détenus du Goulag, première imputation d’une faute à l’URSS…) en omettant cependant la part sombre des trois mois de cet homme à la tête de l’Union soviétique et notamment les répressions sanglantes à la suite de l’insurrection de juin 1953 en Allemagne de l’Est. Or un lien entre la répression liée à ce soulèvement populaire, les fuites massives des Allemands de l’Est vers la RFA, ainsi que la construction du mur aurait dû être fait. Cela n’aurait présenté qu’un plus juste portait de Lavrenti Beria.

Une guerre d’Indochine en demi-teinte

Le film se poursuit en revenant sur la guerre d’Indochine et notamment la bataille de Diên Biên Phu. Le narrateur revient sur l’importance de cette guerre pour Mao Zedong, leader de la Chine communiste, qui voyait dans cette victoire un moyen d’accroître son prestige, revendiquer l’héritage de Staline face à Nikita Khrouchtchev, mais aussi et surtout, arriver en position de force à la conférence de Genève de juillet 1954.

Enfin, cet épisode se referme sur le sentiment que provoqua cette guerre à dix mille kilomètres de la France : « la guerre d’Indochine ne fut point une guerre nationale, mais une guerre menée par une armée de métier dont la population n’en saisissait pas le sens ».

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Le cinquième épisode s’ouvre sur Nikita Khrouchtchev à la tête du conseil des ministres d’URSS. Le portait de Khrouchtchev dépeint dans ce film revient sur la politique de détente initiée par ce dernier à l’égard de l’Occident sans oublier de préciser que bien que conciliant sur le superflu, il n’en demeure pas moins intransigeant sur l’essentiel. Ce film a cependant omis de préciser que bien qu’œuvrant pour une politique de détente, l’homme du fameux discours secret, l’homme autorisant à nouveau les citoyens soviétiques à voyager a aussi et surtout été l’homme qui a dit oui à la construction du mur de Berlin souhaitant par cela mettre fin à l’hémorragie humaine des exilés.

Quelques crimes oubliés

Le narrateur semble déterminé à octroyer une place prépondérante ainsi qu’à concéder une certaine estime à l’égard de Nikita Khrouchtchev, et cela se perçoit notamment dans les raccourcis opérés. En effet, du cadeau offert par Khrouchtchev à Eisenhower en 1959 lors de sa visite aux États-Unis à savoir une réplique des emblèmes de l’URSS lancés sur la lune quelques jours plutôt, les producteurs en tirent un événement qui aurait fait douter les États-Unis et aurait remis en cause l’équilibre de la terreur. Enfin, la narration analyse la crise de Cuba de la sorte : une situation dont Nikita Khrouchtchev sortit vainqueur, mais accepta de perdre la face au profit de Kennedy qui en sortit grandi du conflit.

En dépit de ces points de vue qui peuvent être discutés et qui sont discutables, il faut reconnaître la beauté de la conclusion du cinquième épisode tirée du discours Ich bin ein berliner prononcé par Kennedy sur les marches de l’hôtel de ville de Berlin-Ouest le 26 juin 1963 : « Notre démocratie n’est pas parfaite. Cependant, nous n’avons jamais eu besoin, nous, d’ériger un mur pour empêcher notre peuple de s’enfuir. Le mur fournit la démonstration éclatante de la faillite du système communiste ».

La construction du récit des épisodes quatre et cinq de cette série est qualitative. Le narrateur s’efface aux moments opportuns pour laisser le spectateur face aux images. Le discours du reportage bien que forcément subjectif par le choix des événements mis en avant reste, dans son ensemble, équilibré.

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À propos de l’auteur
Hugo Morice

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