<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Gaz : la Russie avance ses pions en Asie centrale

6 février 2023

Temps de lecture : 4 minutes

Photo : Station de pompage de gaz de Purpe, région de Yamal, Russie.

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Gaz : la Russie avance ses pions en Asie centrale

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La Russie a reçu une douche froide lorsqu’elle a proposé la possibilité d’une union gazière avec l’Ouzbékistan et le Kazakhstan, mais les deux nations d’Asie centrale ont peut-être changé d’avis. Les deux gouvernements ont signé de nouveaux accords de coopération avec le géant gazier russe Gazprom, cimentant ainsi leur partenariat avec Moscou. Des rapports non confirmés suggèrent que la Russie a déjà formulé des demandes pour prendre le contrôle des systèmes de transport de gaz d’Asie centrale.

Article paru sur Eurasianet. Traduction de Conflits

La proposition russe d’union gazière 

Lorsque la Russie a lancé l’idée de créer une union gazière tripartite avec le Kazakhstan et l’Ouzbékistan à la fin de l’année dernière, elle est tombée à plat.

Les critiques y ont vu une tentative de l’ancien maître colonial d’Asie centrale d’acquérir un pouvoir politique et économique. Les deux pays semblent avoir jeté un froid sur cette idée.

Le vice-ministre kazakh des Affaires étrangères, Roman Vassilenko, a prévenu que le Kazakhstan ne permettrait pas que « son territoire soit utilisé pour contourner les sanctions » et qu’il garderait cela à l’esprit « lorsqu’il s’agira d’évaluer toute nouvelle initiative potentielle ».

Le gouvernement de l’Ouzbékistan a également offert une réponse brutale. « Si nous importons du gaz d’un autre pays, nous ne coopérons que sur la base d’un contrat commercial, d’un contrat de vente », a déclaré le ministre de l’Énergie Jurabek Mirzamahmudov en décembre. « Nous n’accepterons jamais de conditions politiques en échange de gaz ».

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Mais maintenant, les deux gouvernements ont signé de nouveaux accords de coopération avec le géant gazier russe Gazprom, cimentant ainsi les partenariats avec Moscou.

Les feuilles de route ont été signées sur une base bilatérale entre Gazprom et les deux gouvernements, ce qui laisse penser que l’idée d’une union à trois n’est peut-être plus d’actualité, du moins pour l’instant.

Contourner les sanctions occidentales

Le site russe d’information sur l’énergie Neftegaz.ru a toutefois présenté un point de vue différent et quelque peu alambiqué.

« Les pourparlers sur cette [union tripartite] se sont poursuivis dans un format bilatéral au niveau de Gazprom et des ministères et gouvernements concernés des trois pays », a-t-il suggéré, laissant entendre que la Russie poursuit ses projets par des moyens détournés, sous un autre nom et dans un autre format. 

Si l’on met de côté les questions relatives à une union – et à ce qu’elle signifierait exactement -, les accords montrent comment la Russie poursuit ses ambitions énergétiques en Asie centrale, et comment elle cherche de nouveaux marchés pour le gaz que l’Europe évite désormais en raison de la guerre en Ukraine.

On sait peu de choses sur le contenu des feuilles de route, si ce n’est qu’elles couvrent toutes deux les exportations de gaz de la Russie vers les deux pays.

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Mirzamahmudov et le patron de Gazprom, Alexey Miller, ont « signé une feuille de route sur la coopération dans le secteur du gaz », a annoncé la compagnie dans un communiqué laconique du 24 janvier, sans autre précision.

Gazprom a utilisé la même formulation pour annoncer la feuille de route avec le Kazakhstan le 18 janvier, mais le gouvernement kazakh a fourni quelques détails supplémentaires, bien que peu nombreux.

Le document couvre des questions telles que le traitement du gaz kazakh dans l’usine gazière russe d’Orenbourg et « la possibilité de fournir du gaz russe au Kazakhstan », selon Astana.

Une déclaration du ministère de l’Énergie de l’Ouzbékistan, le 25 janvier, a révélé que son accord couvre également les fournitures de gaz russe à l’Ouzbékistan.

La feuille de route décrit les « actions techniques nécessaires pour assurer le transit du gaz le long du gazoduc Asie centrale-Centre », qui relie la Russie au Kazakhstan et à l’Ouzbékistan.

Mais le ministère a pris soin de souligner que tout serait fait dans « la pleine défense des intérêts nationaux ».

Vers une prise en main des systèmes de transport de gaz par Moscou ?

Il convient de « souligner séparément » que les pourparlers avec les Russes et la feuille de route qui en résulte ont pour objectif « de fournir du gaz naturel au marché intérieur [de l’Ouzbékistan] dans les volumes nécessaires, en préservant pleinement le droit de propriété (préservation complète du droit d’administration) sur le système de transport de gaz existant de la République d’Ouzbékistan ».

Cette déclaration fait suite à des informations non confirmées par les médias, citant des sources anonymes, selon lesquelles la Russie aurait demandé à prendre le contrôle des systèmes de transport de gaz d’Asie centrale.

Il n’y a eu « aucune menace de remise du système de transport de gaz à qui que ce soit, ou de notre souveraineté », a déclaré le ministère ouzbek de l’Énergie.

Le Kazakhstan et l’Ouzbékistan, pays producteurs de gaz, importent déjà une partie de leur gaz de Russie, et Moscou a déclaré le mois dernier qu’il était en pourparlers avec ces deux pays pour augmenter leurs exportations, alors qu’ils réclament des approvisionnements supplémentaires dans le contexte de la crise énergétique hivernale en Asie centrale.

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Le Kazakhstan exporte également du gaz vers la Russie, mais pas l’Ouzbékistan.

Les deux pays envoient habituellement la majeure partie de leurs exportations vers la Chine, mais Astana et Tachkent affirment avoir interrompu les exportations de gaz cet hiver afin de conserver les réserves pour la consommation intérieure.

L’Ouzbékistan s’est engagé à arrêter complètement ses exportations d’ici à 2025, et le Kazakhstan envisage d’y mettre fin dès cette année.

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