Souvent présenté comme un outil de vassalisation des nations africaines, comme un héritage obsolète de l’époque coloniale, le franc CFA est aujourd’hui en sursis.
Le président Macron a donné son soutien théorique à la mise en place par les nations ouest-africaine d’une nouvelle monnaie commune, l’eco, dont l’adoption, prévue pour 2020, a toutefois été reportée sine die. Mais au-delà des passions politiques, quelle est la part de vérité dans le procès fait au franc CFA, et quelles seraient les conséquences économiques de son abandon ?
C’est à ces questions sensibles que s’attaque, avec une expertise froide et rationnelle, Loup Viallet dans son ouvrage. S’il reconnaît la charge symbolique du franc CFA, qui conduit de nombreux patriotes africains à le rejeter, l’auteur fait valoir que cette monnaie laisse en pratique une grande marge d’action aux pays de la zone franc, tout en leur garantissant une stabilité enviable. Certes, il existe des dysfonctionnements, mais suffisent-ils à justifier la fin du système actuel ?
Loup Viallet ne s’oppose pas au principe d’une réforme – proposant notamment de mutualiser la politique de coopération monétaire à l’échelle de l’Union Européenne, une idée séduisante, mais qui pourrait être difficile à concrétiser, au vu des divergences entre États-membres. Mais il fait valoir qu’une rupture brutale ne profiterait qu’aux États-Unis où à de nouvelles puissances émergentes comme la Chine, qui n’ont rien à envier à la France en termes de néo-colonialisme.
La réflexion que suscite ce livre sur les enjeux symboliques de la souveraineté et les outils nécessaires à sa concrétisation est un de ses points forts, et pourrait être précieuse même pour les adversaires du franc CFA, en les mettant au défi de mettre en place les conditions nécessaires au changement qu’ils appellent.
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