10 juillet 2021

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Constructif n° 58. Nouvelles guerres économiques

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Si la notion de guerre économique est de plus en plus acceptée, il reste aux acteurs, et notamment aux entreprises, à prendre la mesure de la réalité de celle-ci. C’est ce que fait ce numéro de Constructif en présentant la réalité de cette guerre et les moyens d’y faire face.

Constructif est une revue publiée par la fédération française du bâtiment depuis 2002 qui tient à traiter avec pragmatisme des réalités contemporaines. Ce numéro se concentre sur la question de la guerre économique, ses permanences historiques, son actualité, les problématiques auxquelles l’Europe est confrontée et en particulier la France et les moyens d’y répondre.

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Olivier Salleron rappelle dans son avant-propos qu’il s’agit d’une constante historique et que, si la forme évolue, dans le cadre d’un conflit il n’y a pas de grande différence entre brûler une récolte et bloquer l’accès à une donnée numérique. Franck Riester complète cet avant-propos en dressant un panorama du regain des tensions actuelles dans le cadre de la crise sanitaire. Deux parties composent ce dossier, l’une sur les problèmes, l’autre sur de potentielles solutions préventives ou réactives.

Problèmes éternels, tensions nouvelles

Les différents auteurs convoqués, de Richelieu à Alain Juillet, expriment l’importance première de considérer la guerre économique sous ses diverses formes, comme une réalité géopolitique de premier ordre. Si le commerce procure richesse et puissance, Richelieu rappelait combien il était important de diffuser ses biens à travers le monde, que les autres soient dépendants de soi sans l’être d’eux.  En ce sens, le souverain avait un rôle à jouer pour développer la puissance commerciale de l’État. Aujourd’hui quel est le rôle de l’État ou de l’Union européenne en matière économique ? Les États-Unis, eux, ont su répondre rapidement à cette question dans le cadre d’une stratégie intégrée où le militaire, l’économique et le culturel vont de pair. Entre une Chine dont le capitalisme d’État est de plus en plus agressif et des États-Unis dont les réactions se font vives l’Europe saura-t-elle se saisir pleinement de la réalité qu’est la guerre économique ? Celle-ci s’impose en rupture avec une vision idéalisée du doux commerce, elle est le nouvel espace dans lequel les rivalités les plus fortes se font sentir et à défaut d’agir il faudra subir. Ainsi Olivier Iteanu dénonce de manière provocatrice le développement des puissances numériques américaines en Europe comme une forme de colonisation numérique. En effet l’Europe, qui peine à développer des champions en la matière, souffre de défauts structurels pour se prémunir de telles influences et peine à développer sa compétitivité. À terme il lui faudra pourtant essayer, comme elle y tend parfois selon Elvire Fabry, sous peine d’être toujours plus marginalisée.

Prévention stratégique, solutions pratiques

La réalité du concept de guerre économique, souvent niée en France, frappe violemment la société dans son ensemble. Les dirigeants, soumis aux diktats du mainstream et de la réactivité, refusent de la prendre à bras le corps, risquant de condamner la puissance et l’influence française.

À lire aussi : L’Art de la guerre économique, de Christian Harbulot

Pour contrer cela, au niveau national, la politique de sécurité économique de l’État est vitale. Le réarmement français est à la fois institutionnel et juridique afin de protéger les secteurs stratégiques d’investissements étrangers prédateurs notamment.

À l’échelle européenne, les politiques de concurrence sont critiquées, mais non moins efficaces. La lutte contre les cartels, contre les abus de position dominante et le contrôle renforcé des fusions acquisitions sont nécessaires au fragile équilibre entre saine concurrence entre les acteurs européens et compétitivité face aux géants américains et chinois. Pourtant, la défense commerciale européenne semble en être à ses balbutiements, avec cependant l’avancée significative par le filtrage des investissements étrangers touchant des secteurs stratégiques. Au niveau local, la diplomatie d’entreprise s’avère un « indispensable complément voire l’alternative salvatrice »de la diplomatie étatique sur le plan économique. Domaine transversal ne devant pas être confondu avec le lobbying ou les relations institutionnelles, la diplomatie d’entreprise devient la pièce maîtresse de l’influence professionnelle.

À lire aussi : Entretien avec Christian Harbulot. Nous sommes en guerre économique

Divers acteurs et actions interviennent aujourd’hui pour rattraper le retard français et européen. Ainsi, le mouvement de relocalisations industrielles est à noter dans la redynamisation du tissu industriel français. Les problèmes engendrés par la délocalisation (communication, logistique, corruption, qualité de production) ainsi que la hausse du salaire minimums chinois n’en font plus un choix évident. Ce choix doit relever du chef d’entreprise, et non des pouvoirs publics. Ces derniers ont un rôle à jouer pour éviter l’internationalisation non européenne de l’actionnariat des industries européennes en limitant les distorsions de concurrence entre pays européens et non européens et en contrôlant les investissements étrangers.

Ce numéro présente donc les grandes facettes de la guerre économique, contribuant à mettre ce sujet au cœur de la réflexion stratégique.

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À propos de l’auteur
Rémi de Francqueville

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