Leonid Ilitch Brejnev fut le quatrième dirigeant du parti communiste de l’Union soviétique de 1964 jusqu’à sa mort en 1982. Un homme dont l’histoire n’a gardé que le souvenir d’un antihéros. Dans son dernier livre, Andreï Kozovoï ne tente pas de réhabiliter le natif de Dniepropetrovsk, mais plutôt de rétablir la réalité historique souvent écornée par les récits officiels de ses successeurs.
Loin du portrait du vieillard sénile que ses contemporains ont peint de lui dans les dernières années de son mandat, on découvre un Brejnev à l’origine du complot contre Nikita Khrouchtchev, complot qui avait entraîné la chute de ce dernier. Brejnev succède par la même occasion à son compatriote ukrainien le 14 octobre 1964. L’URSS sera dirigée dix-huit ans par Brejnev qui instaure en partie la fin du culte de la personnalité. Culte établi lors du stalinisme, déjà un peu écorné par Khrouchtchev, auquel Brejnev met fin avec la troïka, un triumvirat dans lequel ce dernier gouverne avec Kossyguine et Podgorny.
Au fur et à mesure que l’on avance dans la lecture, cet ouvrage permet d’avoir un autre regard sur la guerre froide. Brejnev rencontrera une dizaine de fois différents présidents américains, lui qui est un passionné de voiture de sport et qui ne voit pas que du mauvais dans le modèle américain. À l’inverse de l’image de l’austère chef soviétique, on pourrait s’étonner de découvrir un Brejnev très soucieux de la paix et qui ira rencontrer les trois premiers présidents de la cinquième république française. Dans le même esprit, il est le premier chef d’Union soviétique à discuter avec la RFA, et même celui qui insiste le plus pour la signature de traités de désarmement nucléaire des grandes puissances possédant l’arme atomique.
En URSS, Brejnev représente, encore aujourd’hui, une période de progrès et de prospérité sociale selon les Russes. Une période d’amélioration des biens matériels et de la vie au quotidien. Il ne fut pas un chef d’État aussi intellectuel et adepte de lecture que ses homologues étrangers. Ce qui lui vaudra une réputation d’antihéros, ainsi que l’invasion de l’Afghanistan qu’il a validé, pour des raisons cependant plus complexes que celles relayées par les États-Unis. Mais également à cause des diverses fraudes qui dégradent l’état du pays, fraudes dans lesquelles ses enfants ainsi que lui-même se trouvent être impliqués.
C’est un Brejnev plus complexe qu’il peut paraître qui est à découvrir dans cet ouvrage. Une lecture qui est une intéressante opportunité de penser plus en profondeur l’URSS de l’intérieur et ses relations dans le monde, notamment avec l’Occident.
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