Attaques contre la SNCF : des actes majeurs et sans précédent

26 juillet 2024

Temps de lecture : 7 minutes

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Attaques contre la SNCF : des actes majeurs et sans précédent

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La SNCF a reconnu avoir subi plusieurs attaques simultanées qui déstabilisent le trafic ferroviaire des gares parisiennes. S’il est trop tôt pour connaitre les circonstances exactes de ces événements, quelques hypothèses peuvent d’ores et déjà être émises.

Ces premières réflexions sont posées alors que les événements ferroviaires sont encore en cours. Ce ne sont que de premières hypothèses, à chaud, qui devront être approfondies, confirmées ou infirmées en fonction des informations ultérieures.

Addendum 16h

Acte terroriste ?

Nous avons écrit et dit que le sabotage du réseau SNCF était un acte terroriste. Cette qualification de terroriste n’a pas été comprise par certaines personnes, nous allons donc expliciter ce terme ici.

Par terrorisme, nous retenons la définition suivante : « Le terrorisme est une technique de communication violente qui consiste en la réalisation (et/ou la menace) d’actes de guerre visant à transmettre un message émotionnellement impactant à des audiences différentes des victimes immédiates de l’action ». Citation issue de l’ouvrage co-dirigé avec Daniel Dory, Le Complexe terroriste, VA éditions, 2022, p. 12.

Pour beaucoup de Français, un acte terroriste, c’est un musulman qui égorge un passant avec un couteau en criant « Allah akbar » ou un Basque qui fait sauter un bâtiment avec une bombe. Si ces actes relèvent en effet du terrorisme, ils ne sont pas exclusifs.

Le sabotage commis contre les infrastructures de la SNCF est bien « une technique de communication » puisqu’il s’agit de délivrer un message politique. Il fait usage de la violence (sabotage des postes de réseaux ferrés) et il transmet « un message émotionnellement impactant » (pensons aux centaines de milliers de passagers bloqués dans les gares et à leur famille).

Certes il n’y a pas eu de morts, mais un acte terroriste ne se qualifie pas par le nombre de morts (les nationalistes corses font usage du terrorisme et sont jugés comme tel alors même qu’ils tuent très peu).

Dans le terrorisme, il est nécessaire de distinguer trois strates : polémique, scientifique, juridique.

La strate juridique est celle de la justice.

La strate scientifique est celle de l’étude scientifique des actions terroristes.

La strate polémique est celle des discours autour des actes terroristes. Depuis ce matin, elle est riche d’enseignement et les termes usités par les ministres et les responsables de la SNCF sont fort intéressants à étudier.

Les sabotages sont attribués à « l’Ultra-gauche ». C’est à la fois précis et très imprécis. Mouvance écologiste ? Anarchiste ? Trotskyste ? Révolutionnaire ? Tous ces mouvements peuvent être classés sous le vocable extrême ou ultra gauche. À ce stade, nous n’en savons rien. Il faut attendre que l’enquête s’affine pour disposer de plus d’éléments.

En amont de l’ouverture des JO, de nombreux comptes Twitter d’extrême gauche avait appelés à saboter les Jeux et à les empêcher de se dérouler correctement. Visiblement, certains sont passés du tweet à l’action.

Ce n’est d’ailleurs pas une nouveauté. Cette émission de France Culture du 26 avril 2023 rappelle pourquoi la CGT, au début du XXe siècle, appelait à saboter le rail. C’est donc une vieille pratique, remise au goût du jour.

Affaire à suivre.

Tweet de SNCF Réseau qui montre les équipes au travail pour réparer les dégâts causés.

Addendum 14h

L’acte terroriste mené par l’extrême-gauche ne surprendra pas les lecteurs de Conflits. Cela fait plusieurs années que nous étudions ce phénomène et la violence déployée par les mouvements d’extrême gauche. Je renvoie notamment au dossier Terrorisme, paru en mai 2021.

Les médias mainstream n’osent pas employer le terme de « terrorisme ». Ils évoquent des actes de « malveillance« , des « attaques », des « sabotages » mais jamais de terrorisme. Ils marchent sur des œufs, refusant d’employer les termes justes et de désigner les auteurs véritables. Ce qui est en soi significatif de la terreur intellectuelle qui pèse sur le pays.

Je renvoie à ce sujet au livre co-écrit avec Daniel Dory : Le Complexe terroriste (2022).

Addendum 12h

Matthieu Chabanel, directeur de SNCF Réseau détaille le mode opératoire et les dégâts causés.


Ces propos confirment les hypothèses que nous émettions ce matin, à savoir que les personnes qui ont agit connaissent très bien le fonctionnement des réseaux et savaient où opérer. Ce ne peut donc être que des cheminots, actuels ou retraités, ou du personnel de la SNCF.

La piste de l’attaque étrangère est désormais exclue et les autorités évoquent celle de mouvement d’ultra gauche, ce qui est une indication encore très imprécise sur les protagonistes et leurs raisons d’agir.

Addendum 10h27

Alain Morel évoque « des actes de grandes délinquances avec des idéologies »

Le Figaro, citant des sources des milieux sécuritaires, évoque des actes menées par l’ultragauche

Les incendies volontaires qui perturbent le réseau SNCF ce vendredi matin ne peuvent encore être attribués clairement à des malfaiteurs. Toutefois, le mode opératoire incendiaire observé est généralement utilisé par des membres de l’utragauche, indique au Figaro une source sécuritaire.

Le PDG de la SNCF évoque des « illuminés« , des « irresponsables« , ce qui confirme la piste des mouvements de gauche, écologistes, ultra gauche ou autre. L’enquête devra déterminer les commanditaires exacts.

Texte rédigé à 8h30

Les faits

Au petit matin de la nuit de jeudi à vendredi 26 juillet, plusieurs incendies se sont déclarés à proximité de voies de chemin de fer. Ils ont touché des postes de signalisation, perturbant fortement les communications des TGV Atlantique, Nord et Est. Des tentatives d’incendies ont eu lieu sur la ligne gare de Lyon, mais elles n’ont pas abouti. La SNCF a reconnu que les quatre lignes TGV ont été attaquées.

La SNCF a reconnu un acte de malveillance et se dit victime « d’une attaque massive pour paralyser le réseau ».

Les incendies ont eu lieu autour de 5h du matin, c’est-à-dire au moment de la reprise des trains après la pause de la nuit.

Source BFM :

Des armoires de signalisation en bord de voies ont été incendiées et des câbles coupés et incendiés, ont appris BFMTV de source proche de l’enquête et RMC.

Dans le détail, la LGV Nord a été ciblée par des câbles coupés et incendiés aux environs d’Arras, à Croisille dans le Pas-de-Calais, ainsi que d’autres actes de sabotage.

La LGV Atlantique a subi un incendie au poste 17 de Courtalain (commune Nouvelle d’Arrou) entre Paris et Tours.

La LGV Est a souffert d’actes de sabotage avec le même mode opératoire. Deux dégradations répertoriées entre la gare Meuse TGV et la commune Lamorville et entre Pagny-sur-Moselle (54) et la commune de Lamorville.

La LGV Sud Est a subi également des tentatives de sabotage qui ont pu être évité, à Vergigny dans l’Yonne.

Plusieurs TGV ont été annulés, d’autres sont déroutés vers les voies classiques, ce qui va engendrer des retards de plus d’une heure. Dans les gares, les passagers s’entassent.

Les lieux, les dates

La date ne doit rien au hasard. Il s’agit non seulement du jour de la cérémonie d’ouverture des JO, mais aussi du week-end le plus chargé de l’année puisque c’est le départ en vacances des aoûtiens et le retour des juilletistes. Le dernier week-end de juillet est toujours le moment le plus chargé pour le trafic ferroviaire de passager.

La date est donc particulièrement bien choisie : c’est l’assurance de provoquer une pagaille maximale, de toucher le maximum de personnes, le tout sous le regard des caméras du monde entier puisque de nombreux journalistes sont présents à Paris.

Incendies

«Des incendies volontaires ont été déclenchés pour endommager nos installations» communique la SNCF.

L’incendie est l’un des actes les plus faciles qui soient à organiser. Il nécessite peu de compétence technique, mais peut engendrer des dégâts importants.

Ils ont été allumés à proximité des postes de signalisation. Ce qui signifie que les personnes qui ont allumé ces incendies savent où se trouvent ces postes et ce que cela peut engendrer. Il faut donc un niveau de connaissance minimal du fonctionnement du réseau de la SNCF.

D’autre part, les incendies ont tous été allumés en province, dans des zones rurales. Donc des lieux peu surveillés et faciles d’accès. Des lieux où il est plus simple de frapper que dans un Paris cadenassé et quadrillé.

D’un point de vue opératoire, l’opération est donc particulièrement bien réussie.

Économie des forces : peu de moyens utilisés, facilité d’action, mais dégât maximal.

Qui ?

Une fois les faits et leurs conséquences établies, la question que tout le monde se pose : qui ? Notons que le terme « terrorisme » n’a pas été employé ni par la SNCF ni par le ministre des Transports. Les deux parlent de « malveillance ».

Au regard de ce que nous venons de développer, il s’agit pourtant bien d’un acte terroriste, tel qu’il correspond à la définition classique. Il s’agit bien d’un acte de communication qui vise à faire peur, à terroriser une population, à démontrer qu’il est possible de frapper partout sur le territoire pour déstabiliser le fonctionnement normal des infrastructures. Le terrorisme ne se manifeste pas que par des bombes et des morts.

Si les autorités politiques ne parlent pas de terrorisme c’est parce que ce terme à une connotation très négative dans l’opinion, qu’il fait peur (c’est son but) et qu’il faut donc éviter de l’employer au moment de l’ouverture des JO. D’où l’emploi du terme de « malveillance ».

Qui a pu commettre de tels actes ? L’enquête devra le déterminer.

Une puissance étrangère ?

Des mouvements gauchistes et écoterroristes ? La CGT avait promis de perturber la circulation des voies durant les JO.

Les lieux attaqués montrent que les acteurs connaissaient les endroits à viser. Le groupe qui a commis ces actes bénéficie donc d’informations qui viennent de personnes qui travaillent dans le domaine ferroviaire et qui savent quels lieux viser. Une association entre une puissance étrangère et des mouvements gauchistes n’est pas non plus à exclure.

Ce ne sont là que des hypothèses, que les heures ou jours qui viennent devront affiner.

Que retenir ?

Ces actes, que l’on peut qualifier de terroristes, sont un tournant majeur. C’est la première fois qu’une telle action est menée. Elle est de grande ampleur, car elle a nécessité des moyens humains importants, des connexions humaines au niveau de la SNCF ou de Réseau ferré de France et d’un déploiement coordonné sur plusieurs points du territoire français. C’est du jamais vu. S’il n’y a aucun mort ni aucune victime civile, l’effet de déstabilisation est parfaitement atteint. Pour avoir pensé et réalisé cette opération, il faut disposer de personnes de haut niveau, capables de penser l’opération et de la mener, sans se faire repérer par des services de sécurité pourtant en alerte extrême.

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À propos de l’auteur
Jean-Baptiste Noé

Jean-Baptiste Noé

Docteur en histoire économique (Sorbonne-Université), professeur de géopolitique et d'économie politique à l'Institut Albert le Grand. Rédacteur en chef de Conflits.
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