Plus ancienne chocolaterie de Paris, À la mère de famille réjouit petits et grands, amateurs des confiseries chocolatées déployées en vitrine et sur les étalages, dans un cadre vintage et dans un lieu chargé d’histoire.
Une enseigne élégante accueille les passants qui s’attardent devant la vitrine alléchante d’À la mère de famille. Il y est inscrit : « depuis 1761 ». Une date qui fait de la boutique la plus ancienne chocolaterie de Paris. Les locaux historiques qui ont vu naître les premiers coffrets de chocolat sont aujourd’hui le fief de l’entreprise. Situés rue du Faubourg Montmartre, dans un charmant quartier de la capitale, ils exhalent depuis deux siècles et demi les saveurs cacaotées des orangettes et des pralines. La fameuse chocolaterie a la particularité d’utiliser la recette traditionnelle encore aujourd’hui pour fabriquer ses produits. Et c’est ce qui fait d’elle un lieu si particulier et si unique, qui ne pourrait rendre les amateurs de gourmandises indifférents.
Le maître-mot : authenticité et savoir-faire
Les chocolats d’À la mère de famille sont de purs produits de la Maison. Les nombreux artisans affiliés à la chocolaterie fabriquent tout de leurs propres mains. La fabrique officielle se situe à Chambray-lès-Tours. Tout produire soi-même et maîtriser le processus du début à la fin est le maître mot, afin de garantir la régularité des qualités gustatives et l’excellence des produits. Le chef chocolatier Sébastien Harault tient à valoriser des recettes authentiques et bonnes, en proposant une large palette de confiseries et de spécialités de chocolat. Un vaste éventail de douceurs est exposé dans la boutique : bonbons de chocolat, fruits confits, tablettes, pâtes à tartiner, moulages, tout en gardant la recette traditionnelle du XVIIIe siècle et le savoir-faire ancestral.
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À la mère de famille veut privilégier et développer la filière directe pour s’approvisionner en fèves de cacao et en fruits secs. Elle se fournit dans des pays maîtres en la matière, comme Haïti, Madagascar, le Venezuela, l’Équateur, le Pérou ou Sao Tomé. Elle transforme alors les différents cacaos en couverture de chocolat, puis réalise elle-même les pralinés et les ganaches. Elle détient plus de soixante recettes, dont l’une des dernières nées est la glace exquis-mot. Sans compter les rochers pralinés, les folies de l’écureuil, les florentins, les dolfentins, les palets Montmartre, les toucans, les orangettes, les papillotes… Et aussi les confiseries faites maison, comme les pâtes de fruit, les calissons, les marrons glacés ou bien les confitures surfines fabriquées par des artisans associés. La chocolaterie s’approvisionne en bonbons auprès de maisons historiques, comme les bêtises de Cambrai ou les bergamotes de Nancy.
De l’épicerie Bernard à la chocolaterie Dolfi
C’est au début des années 1760 que naît la future chocolaterie À la mère de famille. Un jeune épicier originaire de Coulommiers et fraîchement diplômé, Pierre-Jean Bernard, installe sa première boutique au 35 rue du Faubourg Montmartre, au cœur d’un charmant quartier encore aux allures de campagne, mais de plus en plus prisé par la belle société parisienne. En pleine tourmente révolutionnaire, sa fille Jeanne épouse le fils d’une grande famille d’épiciers de la rue Saint-Antoine, Jean-Marie Bridault, qui prend alors la succession de son beau-père à la tête de l’épicerie de la rue du Faubourg Montmartre. Marie-Adélaïde Bridault, jeune veuve, reste dans l’histoire comme « la mère de famille ». Elle signe les débuts de l’âge d’or de la chocolaterie. En 1810, Alexandre Grimod de la Reynière, père de la critique culinaire, lui consacre toute une page dans son Almanach des gourmands. Un grand honneur ! Et une publicité importante pour l’établissement. À la mère de famille rentre désormais dans l’histoire gourmande de Paris.
La veuve Bridault est bientôt remplacée par son fils, Bernard. Celui-ci, après avoir épousé Joséphine Delafontaine, fonde la maison Bridault-Delafontaine, une épicerie fine à la mode, dans laquelle ils reçoivent les plus grands musiciens et écrivains de l’époque, comme Emile Zola.
Peu à peu, alors que le XIXe siècle s’installe doucement en France, À la mère de famille se tourne de plus en plus vers la confiserie, avant que Georges Lecœur ne lui donne un nouvel élan. Celui-ci acquiert la boutique en 1895. Ambitieux et pointilleux, il fait rénover la façade, édite les premières brochures et fait installer le téléphone. Tout est prêt pour intégrer l’éclat de la Belle Époque. Mais la belle époque d’A la mère de famille ne s’arrête pas là : en 1906, les produits de la maison sont mis à l’honneur lors de l’Exposition culinaire internationale de Paris. Les confitures surfines de Georges Lecœur y sont récompensées à deux reprises. La nouveauté réside dans l’origine des matières premières : le propriétaire fait venir des produits exotiques et exceptionnels du monde entier : du thé de Chine, des ananas de Singapour ou du chocolat de la compagnie coloniale.
Après la Grande Guerre, c’est l’apprenti de Georges Lecœur, Régis Dreux, qui prend sa suite. La famille Dreux a alors à cœur de faire vivre les vitrines au gré des saisons : des animaux en chocolat à Pâques, des fruits confits à Noël, des bonbons en été. En 1931, à la mort de Régis Dreux, la boutique revient à sa fille et son mari, les Legrand. Sans enfant, ils accueillent trois ans plus tard leur petite cousine orpheline, Suzanne, qu’ils veulent rendre prête à reprendre la maison. Avec son mari, Suzanne, devenue Madame Bretonneau en fait un véritable temple de la tradition gourmande, en reprenant des produits déjà vendus par Georges Lecœur.
À la mère de famille : l’héritage du passé
La boutique du Faubourg Montmartre est restée intacte depuis la fin du XIXe siècle. Elle a inspiré et inspire encore les artistes et les acteurs à l’affiche des théâtres des quartiers. Le peintre André Renoux lui consacre même une toile. En 1984, la devanture est inscrite aux monuments historiques. Le successeur des Bretonneau, Serge Neveu, poursuit l’aventure en imprimant durablement son amour du chocolat. La famille Dolfi, propriétaire actuel de la chocolaterie, rachète la maison en 2000. Etienne Dolfi et ses quatre enfants, Sophie, Jane, Jonathan et Steve perpétuent la tradition de la boutique : le travail en famille, la recherche de nouveautés, le respect pour ce lieu chargé d’histoire.
De nouveaux projets prometteurs sont en cours : en 2017, À la mère de famille s’associe à la maison Stohrer, plus ancienne pâtisserie de Paris, datant de 1730. Ils établissent leur première demeure au 35 rue Cler l’année suivante.
Avec une quinzaine de boutiques dans la capitale, À la mère de famille se développe sans discontinuer, et voit son succès augmenter de jour en jour.
Découvrir le site de l’épicerie.
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