Un cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah est entré en vigueur mercredi au Liban, après près d’un an d’hostilités transfrontalières ayant viré en septembre en guerre ouverte entre l’armée israélienne et la puissante formation libanaise soutenue par Téhéran.
Les deux armées se sont données 60 jours pour quitter la région frontalière. En vertu de la résolution onusienne 1701 d’août 2006, le Hezbollah a interdiction de se trouver au sud du fleuve Litani. La présence de forces militaires du mouvement chiite et la pression qu’elles exerçaient quotidiennement avait poussé Israël à mener son opération militaire en territoire libanais le 30 septembre.
Après avoir lourdement touché le Hezbollah en éliminant ses chefs et en détruisant plusieurs localités partisanes, Israël a déclaré qu’il n’hésiterait pas à frapper à nouveau en cas de violation du cessez-le-feu. Il compte se concentrer sur la défaite du groupe islamiste palestinien Hamas à Gaza, ainsi que sur son ennemi juré, la République islamique d’Iran.
Pourquoi un accord au Liban et pas dans la bande de Gaza ?
Le Hezbollah avait commencé à cibler Israël disant agir en « solidarité » avec le Hamas, contre lequel se bat l’armée israélienne depuis plus d’un an.
Mais pour Israël, les objectifs au Liban « étaient différents » de ceux poursuivis à Gaza, puisqu’il s’agissait « non pas de détruire le Hezbollah » mais de permettre aux 60.000 Israéliens déplacés par les tirs de projectiles de rentrer chez eux, explique Mairav Zonszein, spécialiste d’Israël pour l’International Crisis Group (ICG).
« L’extrême droite (israélienne) veut rester à Gaza », rappelle-t-elle avant de conclure sur les importantes capacités militaires du Hezbollah, jugées supérieures à celles du Hamas, et le coût plus important d’une offensive au Liban qu’à Gaza pour Israël.
Un cessez-le-feu avec Gaza ne pourrait donc intervenir qu’après la « conquête du territoire et la destruction du Hamas », juge Amir Avivi, fondateur du cercle de réflexion Forum pour la défense et la sécurité d’Israël (IDSF).
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Que va-t-il se passer dans la bande de Gaza ?
En annonçant le cessez-le-feu mardi, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a expliqué qu’Israël allait désormais pouvoir se concentrer sur Gaza et l’Iran.
« L’armée israélienne sera en mesure de renvoyer davantage d’unités à Gaza », avance M. Avivi, également ancien militaire, qui estime que cela pourrait mettre le Hamas en difficulté sur le terrain, et comme plusieurs analystes, le rendre plus susceptible de conclure un accord avec Israël.
Peu après l’annonce du cessez-le-feu au Liban, le Hamas s’est dit « prêt » à une trêve à Gaza même si les négociations dans ce sens sont au point mort après des mois d’échanges laborieux.
Les autorités israéliennes pourraient s’enhardir de l’arrivée de Donald Trump à la présidence américaine et vouloir « imposer » leurs conditions au Hamas, prédit Michael Horowitz, expert en sécurité basé au Moyen-Orient.
« Un accord prendrait donc du temps et la guerre pourrait se transformer en conflit larvé. »
Quant à la situation humanitaire dramatique du territoire palestinien, elle va « empirer » selon Mme Zonszein, qui rappelle que Bezalel Smotrich, ministre des Finances israélien et figure de l’extrême droite, a récemment préconisé d’ « encourager » la moitié de la population de la bande de Gaza à partir.
Quelles implications pour le conflit entre Israël et l’Iran ?
L’escalade des tensions entre Israël et l’Iran a culminé en 2024 avec deux attaques aux missiles totalement inédites de la République islamique directement contre le territoire israélien (en avril et octobre). Israël a répondu à la deuxième attaque par des raids aériens sur des cibles en Iran.
« Un cessez-le-feu va permettre à Téhéran de gagner du temps, de jouer la carte de la désescalade et de ne pas répondre à l’attaque israélienne du 26 octobre dernier », estime M. Horowitz.
Tandis que pour le gouvernement israélien, il s’agira de maintenir « la pression sur le programme nucléaire » iranien, explique Mme Zonszein.
« Israël a le sentiment d’être plus que jamais en mesure de maintenir l’Iran dans une position de faiblesse et de vulnérabilité », poursuit-elle en référence, encore une fois, au soutien inconditionnel attendu de la part de M. Trump.
« Israël doit saisir cette occasion et faire en sorte que l’administration américaine s’implique en ce qui concerne l’Iran », affirme M. Avivi, qui imagine qu’Israël et les Etats-Unis pourraient « attaquer ensemble » la république islamique.
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