Dirigé par le géographe Franck Tétart, le Grand Atlas 2025 des éditions Autrement explore en cartes les conflits contemporains, les transformations géopolitiques à l’œuvre et les grands défis à venir. De la situation au Moyen-Orient à l’émergence d’un « Sud global » redéfinissant l’équilibre des puissances, cet ouvrage en cinq parties propose une analyse approfondie des enjeux permettant d’appréhender le monde en 2025.
Cecile Marin, Frank Tétart – Grand Atlas 2025.
Publié traditionnellement pour la rentrée, l’atlas Autrement dirigé par le géographe Franck Tétart est toujours attendu. Les éditions Autrement sont largement spécialisées dans les différents atlas thématiques, ou sur des espaces spécifiques, comme l’Atlas de l’Afrique, dernièrement présenté dans ces colonnes. Les Atlas autrement constituent d’ailleurs une collection à part entière.
Le Grand Atlas 2025 est organisé en 5 parties, comme les précédentes éditions. Si dans les points chauds on trouve évidemment l’Ukraine même si le conflit israélo-palestinien se trouve ans un cahier central spécifique. On trouve par contre dans ces points chauds la situation en Birmanie, conflit oublié depuis 2021. La transition démocratique entreprise en 2011, interrompue par un putsch en 2021. Depuis l’indépendance du pays en 1948, les affrontements entre le centre, peuplée de Birmans et la périphérie où se situe les minorités ethniques, sont nombreuses. Mais depuis 2021 c’est dans le centre même du pays que des mouvements insurrectionnels se développent. La Chine prend d’ailleurs ses distances avec la junte tandis que les États-Unis semblent vouloir soutenir l’opposition.
Parmi les autres points chauds traités il semblerait que le Caucase qui a connu avec l’épisode du Nagorny Karabagh la disparition d’une entité politique arménienne existant depuis plusieurs siècles, est envisagé sous l’angle de la normalisation même si les fragilités géorgiennes se situent au sommet de l’État avec l’opposition entre la présidence de la république Salomé Zourabischvilli et le parti de gouvernement Rêve Géorgie clairement pro-russe.
Dans la 2e partie les grands enjeux du moment sont également traités, et on s’intéressera à cette notion qui peut sembler difficile à cartographier, qui serait celle du « Sud global ». L’hyper puissance américaine a été clairement remise en cause à partir de 2001, mais l’on a pu croire et espérer au monde multipolaire dont les relations seraient empreintes par le multilatéralisme. Avant même la guerre en Ukraine et certaines ambiguïtés des pays membres des BRICS à l’égard de la Russie, l’affirmation de pays pourtant traditionnellement alliés des États-Unis comme l’Arabie Saoudite ou l’Égypte a montré que les grands équilibres n’étaient pas éternels. L’organisation de coopération de Shanghai qui regroupe l’Inde avec la Russie et la Chine, sans oublier l’Iran, peut apparaître comme une sorte de pôle alternatif avec sa logique propre. La guerre en Ukraine semble avoir renforcé le processus.
De la même façon, après le mouvement de démocratisation que le continent africain a pu connaître, ce sont davantage les pays à régime autoritaire qui dominent le continent. Le cartographe a d’ailleurs représenté de façon différenciée les pays à régime autoritaire des pays à régime hybride. Il semblerait que l’évolution de la Tunisie pour ne prendre que cet exemple ne fasse basculer ce pays dans la catégorie des régimes autoritaires surtout avec l’élection présidentielle récente qui a vu le maintien au pouvoir du président Sayed.
Le dossier central de cet Atlas est très justement consacré à la situation au proche et au Moyen-Orient avec un rappel historique sur le sionisme jusqu’aux différentes tentatives de plan de partage de la Palestine jusqu’ à la fragmentation territoriale de la Cisjordanie sous les coups des différentes colonisations par les mouvements sionistes religieux. La présence dans le gouvernement Nétanyahou de l’extrême droite suprématiste sioniste renforce d’ailleurs ce processus.
Cet Atlas du temps présent comporte également un chapitre « retour sur l’histoire » qui rappelle un certain nombre d’épisodes comme le 150e anniversaire de la conférence de Berlin sur le partage de l’Afrique ou la naissance des Nations unies il y a 80 ans. Très opportunément le 50e anniversaire du début de la guerre civile au Liban est également rappelé, et cela est d’autant plus précieux dans le contexte actuel.
La dernière partie se livre à l’exercice, toujours périlleux, de la prospective avec des hypothèses sur le pic de population mondiale atteinte en 2080,1, mais également les difficultés d’adaptation d’une partie importante de la population mondiale face à un réchauffement climatique qui apparaît comme inéluctable. Se pose d’ailleurs la question de la révolution agricole, qui devra répondre à plusieurs défis, celui de la raréfaction de la ressource en eau douce, le recul des terres agricoles, et l’augmentation du nombre de bouches à nourrir. On me permettra sans doute de ne pas mettre en priorité parmi les menaces liées au réchauffement climatique, le recul de la pratique du ski, notamment dans les espaces de la zone tempérée.
Parmi les recommandations, il semble évident que cet Atlas sera particulièrement utile pour appréhender le monde en 2025. Il le sera tout particulièrement pour les candidats de la filière sciences humaines et relations internationales de l’école de guerre, car il permettra, avec un format particulièrement commode, de situer dans l’espace comme dans le temps les grands enjeux auxquels les futurs chefs militaires seront un jour confrontés.