Débarquement en Provence, histoire de la mer, guerre urbaine, catholicisme en France. Aperçu des livres de la semaine.
Débarquement de Provence
Toute l’attention médiatique a été focalisée sur l’anniversaire du débarquement en Normandie. Rien ou presque en revanche sur le débarquement de Provence, pourtant opéré par les troupes françaises et qui joua, lui-aussi, un rôle crucial dans la libération de la France. Quelques brèves à la télévision et une petite cérémonie en présence du Président de la République. Même au niveau des publications, le débarquement de Provence est le grand oublié. Ce n’est pas nouveau, mais cela se confirme à chaque décennie commémorative. Saluons donc la parution de ces deux ouvrages, l’un chez Passés Composés l’autre chez Glénat, qui font partie des rares éditeurs à avoir traité de cet événement.
Frédéric Guelton, Le Débarquement et la libération de la Provence, « La Seconde Guerre mondiale en couleur », Glénat, 2024, 39,95€.
Glénat complète sa collection de la « Seconde Guerre mondiale en couleur » avec les éléments qui font son succès. Des photos colorisées, des documents d’époque, un retour aux archives. Le tout servi par le texte magistral de Frédéric Guelton qui nous replonge dans ses journées essentielles qui ont vu l’armée française se reconstituer pour libérer Toulon et Marseille et ainsi remonter la vallée du Rhône en direction de Paris. C’était la revanche de 1940 et du sabordage de la flotte dans le port de Toulon.
Claire Miot, Le Débarquement de Provence. Août 1944, Passés Composés, 2024, 25€.
L’ouvrage de Claire Miot, membre du Conseil scientifique et d’orientation de la Mission Libération, reprend lui-aussi un certain nombre d’archives, notamment des photos qui permettent de voir les acteurs et les paysages de cette épopée militaire. Elle retrace le débarquement du 15 août et les quinze jours de combats qui ont suivi pour libérer la Provence. On voit ainsi les goumiers et les FFI avancer vers Marseille, les combats sur la Cannebière, le bombardement de la rade de Toulon, les défilés de la victoire sur le Vieux-Port et les revues des troupes, la messe célébrée à Notre-Dame de la Garde. Des archives qui montrent la dureté des combats et la joie d’une libération conduite par les troupes françaises, renouant avec la victoire sur le territoire national.
La mer
Alessandro Vanoli, Histoire de la mer, Passés Composés, 2024, 26€.
Curieuse idée que d’écrire une histoire de la mer, comme si celle-ci était une personne dont on pourrait étudier les évolutions et les inflexions. C’est pourtant le pari relevé par l’historien italien Alessandro Vanoli, qui prend son sujet à bras le corps pour analyser les rapports complexes et tourmentés entre l’homme et la mer. D’une belle plume, il raconte le déluge et les mythes des origines, les grands peuples de la mer, les Phéniciens, les Grecs, mais aussi les peuples asiatiques et ceux de la Baltique, la façon dont la mer fut conquise, connue, explorée, les grandes voies du commerce et des échanges. La mer, à la géologie et la géographie si particulière, devient un sujet d’étude et un levier de compréhension de l’histoire des hommes. Le projet était ambitieux, il est pleinement réussi, offrant un voyage à la fois géographique et historique pour s’immerger dans la mer et dans l’histoire des hommes.
Guerre urbaine
« Le combat en zone urbaine », Revue militaire générale, n°59, juin 2024, Commandement et Combat futur.
Il ne faudrait pas que les vacances estivales et les Jeux olympiques provoquent le passage sous silence de ce très intéressant numéro de la Revue militaire générale. La guerre urbaine est celle qui provoque le plus de morts et de dégâts matériels et celle aussi qui est la plus compliquée à manier pour les soldats. Si les sièges médiévaux et les combats de rue de la guerre civile espagnole appartiennent à l’histoire, la guerre n’a pas quitté les villes. Syrie, Karabagh, Ukraine, Israël, Gaza, sont quelques-uns des exemples récents où le feu a concerné l’urbain. Ce numéro traite de la guerre urbaine aujourd’hui et demain : matériels engagés, techniques employées, stratégie à adopter. Dans les dédales des rues, dans les couloirs des métros, dans les attaques cyber, le combat change de par les transformations des villes. On appréciera notamment un article analysant la bataille d’Avdiivka et un autre traitant des différents types de drones employés dans les guerres urbaines. Ce numéro propose ainsi un tour salutaire de la question et des enjeux d’aujourd’hui.
Missions
Michèle Rault, Les missionnaires de l’ombre. Femmes catholiques engagées dans le monde ouvrier et rural. 1940-2000, Le Cerf, 2024, 29€.
Un travail sociologique essentiel pour comprendre l’évolution du catholicisme en France au XXe siècle. Après la Seconde Guerre mondiale, dans le contexte de Vatican II puis face au nouveau siècle, le travail de femmes, dans les usines et dans les champs, pour être missionnaire, affronter le monde moderne et ses évolutions, pour y porter le Christ. L’auteur nous conduit chez Madeleine Delbrêl, à Ivry-sur-Seine, peut-être la plus connue et dont l’action a inspiré nombre de communautés et d’associations, mais aussi, grâce au travail de dépouillement des archives, à Marseille, à Paris, à Limoges, dans la Mission de France et dans la JAC (Jeunesse agricole chrétienne). C’est ainsi tout un panorama qui est ouvert, à travers le temps et à travers l’espace : celui des questionnements et des tâtonnements, des succès et des échecs, des confrontations avec une réalité rugueuse et difficile pour des femmes qui, parfois, se jettent dans des mondes qu’elles ne connaissent pas. Michèle Rault comble ainsi une lacune de l’historiographie et ouvre une fenêtre essentielle sur cette partie du catholicisme en France.