<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> L’empreinte spatiale de l’État islamique au Khorassan

25 juin 2024

Temps de lecture : 2 minutes
Photo : L'État islamique au Khorassan
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L’empreinte spatiale de l’État islamique au Khorassan

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La revendication – plus ou moins crédible – de l’attentat de Moscou du 22 mars 2024 (145 morts et plus de 550 blessés) par l’État islamique au Khorassan incite à s’intéresser à cette entité encore peu étudiée. Et pour avoir une première idée de ses caractéristiques, et suivant une démarche déjà éprouvée, on observera la distribution spatiale et temporelle de ses actes violents tels qu’ils sont répertoriés dans la Global Terrorist Database.

Article paru dans Conflits n°52, dont le dossier est consacré à l’espace.

Le premier constat que permet cette carte, qui complète aussi celles que nous avons publiées auparavant concernant seulement l’Afghanistan, est celui d’une activité très largement localisée dans la zone AfPak (Afghanistan-Pakistan) de l’EI-K avant la prise de Kaboul en août 2021 par les talibans (seule période pour laquelle on dispose actuellement de données).

À l’intérieur de cet espace, on observe une très forte concentration dans les régions de Kaboul et de Peshawar, ainsi qu’à Darzab, ces trois villes étant incluses dans l’« enveloppe » qui rassemble la majeure partie des localités ayant subi plus de dix actes répertoriés dans la base GTD. Nous avions déjà observé dans des articles antérieurs que cette forme de donut correspondait à l’essentiel des régions peuplées de l’Afghanistan, entourant des régions centrales très peu peuplées. Ne s’y ajoutent que Quetta et Karachi, avec leurs propres enveloppes d’actes commis dans leurs environs, ce qui n’est pas le cas à Herat.

Pour ce qui est de la répartition dans le temps, l’année 2021 marque sans doute une coupure radicale dans l’activité et la nature de cette organisation. En effet, entre sa formation vers la fin de l’année 2014 et 2021, cette entité qui agglomère de façon instable des combattants de provenances diverses (anciens talibans afghans et pakistanais, éléments issus de divers pays d’Asie centrale, etc.) se caractérise surtout par des relations de compétition souvent violente avec les talibans et des attentats spectaculaires contre la population chiite afghane, et des accords locaux avec ces mêmes talibans pour affronter les forces de la coalition otanienne qui mènent sur place une partie de l’inepte « guerre contre le terrorisme ». On peut considérer que cette période se clôt avec l’attentat contre l’aéroport de Kaboul le 26 aout 2021.

Depuis 2021, l’EI-K se positionne comme le principal ennemi interne du régime taliban, ce qui ne peut manquer d’intéresser divers services occidentaux.

À ce titre, et pour assurer sa survie dans ces nouvelles conditions, il procède également à des attentats extérieurs dans une claire logique mercenaire au bénéfice de commanditaires extérieurs, comme l’attaque du 3 janvier 2024 à Kerman en Iran et le récent attentat de Moscou où, vu la trajectoire des opérateurs tadjiks, des services otaniens (notamment turcs) semblent avoir été à la manœuvre.

En tout état de cause, et en attente de données supplémentaires, cette carte permet de se faire une première idée de cette entité, peut-être destinée à commettre de nouvelles actions sous vrai ou faux drapeau. 

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L’État islamique au Khorassan

À propos de l’auteur
Hervé Théry et Daniel Dory

Hervé Théry et Daniel Dory

Hervé Théry est géographe, directeur de recherche émérite au CNRS-Creda et professeur à la Universidade de Sao Paulo. Membre du Comité Scientifique de Conflits. Daniel Dory. Chercheur et consultant en analyse géopolitique du terrorisme. A notamment été Maître de Conférences HDR à l’Université de La Rochelle et vice-ministre à l’aménagement du territoire du gouvernement bolivien. Membre du Comité Scientifique de Conflits.
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