En réponse au discours inaugural du nouveau président de Taïwan, jugé trop indépendantiste, la Chine a lancé l’opération Joint Sword 2024A mettant en place le blocus de l’île. Retrouvez dans ce fil des cartes et des vidéos pour comprendre l’opération en cours.
Cet article est issu du fil Twitter de Ian Ellis. La traduction est de Conflits.
Jeudi, la Chine a lancé d’importantes manœuvres militaires autour de Taïwan, les qualifiant de « punition sévère » à l’encontre du nouveau président taïwanais Lai Ching-te. Taipei a immédiatement dénoncé ces actions comme des « provocations et actions irrationnelles ».
Contexte
Trois jours après le discours d’investiture du nouveau président Lai Ching-te, le commandement du théâtre oriental de l’Armée populaire de libération (APL) chinoise a lancé l’exercice militaire conjoint « JOINT SWORD 2024A ».
Mené dans le détroit de Taïwan, au nord, au sud et à l’est de l’île , ainsi qu’autour des îles de la ligne de front de Kinmen, Matsu, Wuqiu et Dongyin, il constitue « une punition sévère pour les actes séparatistes des forces indépendantistes taïwanaises et un avertissement contre l’ingérence et la provocation des forces extérieures ».
🚨 New video: “Dozens of warplanes, multiple destroyers & frigates of the PLA Eastern Theater Command are encircling the island of Taiwan & its outlying islands, conducting mock strikes in the ongoing Joint Sword-2024A exercise.” pic.twitter.com/uE919YigWL
— Ian Ellis (@ianellisjones) May 23, 2024
Déroulement de la manœuvre
Débuté ce jeudi à 7h45 heure locale, l’exercice se tiendra jusqu’au 24 mai, et se concentrera sur « des patrouilles conjointes de préparation au combat mer-air, la prise conjointe d’un contrôle complet du champ de bataille et des frappes de précision conjointes sur des cibles clés ».
Cette opération vise à évaluer les capacités de combat en conditions réelles, en déployant l’ensemble du spectre de la force. Elle implique une collaboration entre l’aviation, la marine, les forces terrestres et l’artillerie, par la réalisation de frappes de précision et d’opérations globales à l’intérieur et à l’extérieur de la chaîne d’îles.
Conçus pour encercler Taïwan à la fois de l’est et de l’ouest, ces exercices montrent la capacité de frappe de l’APL dans toutes les directions, sans aucun angle mort, formant une situation où l’île est coincée des deux côtés.
Prise de recul
Bien que cette démonstration de force soit notable, elle ne signifie pas qu’une invasion ou un blocus soit probable ou imminent. En effet, de tels exercices ne sont pas rares et se produisent souvent autour d’événements politiques majeurs. Les analystes s’attendaient à une réaction de ce type suite à l’investiture présidentielle à Taïwan.
Taïwan, pour sa part, reste confiant dans sa capacité à protéger sa souveraineté et a mobilisé ses forces en réponse à cette menace. Un haut responsable taïwanais de la défense a déclaré à Reuters que le pays avait anticipé ce scénario, y compris les mouvements de l’Armée populaire de libération (APL). Le ministère de la Défense a qualifié les mouvements de l’APL de « provocation irrationnelle », notant que les exercices en cours sont menés « sous de faux prétextes ».
De son côté, le lieutenant-général Stephen Sklenka, commandant adjoint du Commandement Indo-Pacifique des États-Unis, a déclaré à Reuters que les exercices chinois rappelaient ceux de 2023. Il a ajouté que, bien que l’ordre du président Xi Jinping de préparer l’armée chinoise à une invasion de Taïwan d’ici 2027 doive être pris au sérieux, une attaque réelle n’était ni inévitable ni imminente.
Enfin, la Chine a simplement exécuté ce qu’elle avait prévu de faire en février : normaliser l’activité militaire autour et dans les eaux de Kinmen, opérer en quasi-impunité et établir une présence permanente autour de l’île stratégique de Taïwan située sur la ligne de front.
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Le hard power au service du politique
Selon les analystes, ces exercices sont avant tout un message destiné à Taïwan et ses alliés. Amanda Hsiao, de l’International Crisis Group, a déclaré : « Il s’agit d’un avertissement à l’administration Lai et à Washington », indiquant que la Chine « peut et va continuer à faire pression sur Taïwan si Lai ne revient pas à une approche plus modérée ».
L’Armée populaire de libération (APL) cherche à démontrer « qu’en cas de besoin, elle a la capacité d’imposer rapidement un blocus de l’archipel taïwanais, de mettre fin à une intervention armée de forces extérieures et de résoudre rapidement la question de Taïwan », a déclaré Song Zhongping, analyste et ancien officier de l’armée chinoise, à l’AFP.
Il est également important de noter que ces exercices permettent à Pékin de démontrer sa capacité à défendre sa souveraineté. Comme l’explique M. Feigenbaum, « Pékin dispose d’un large éventail d’outils coercitifs et persuasifs… À court terme, l’invasion est le moins probable de ces outils ». Le véritable objectif est de « faire perdre à Taïwan la volonté de résister » plutôt que de risquer une coûteuse invasion et occupation.