Naples est mondialement connu pour son art sartorial, ses boutiques et la qualité de son artisanat. Si quelques grands noms émergent et sont connus au-delà des frontières italiennes, la cité regorge de nombreux ateliers familiaux qui font perdurer la tradition artisanale. Entretien avec Antonio Pastena.
Propos recueillis par Jean-Baptiste Noé .
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La sartoria Pastena est une affaire de famille : votre père y travaille ainsi que votre frère et votre sœur. Le travail en famille est assez habituel en Italie, notamment dans l’artisanat. Est-ce que vous pensez que c’est propre à la culture italienne ?
Ici, en Italie, surtout dans le monde de l’artisanat, et en particulier dans le sud de l’Italie, il est très courant de reprendre et de poursuivre un travail qu’un membre de la famille a commencé et de le transmettre à ses enfants.
Votre sartoria a été fondée en 2014, mais votre père a commencé très jeune et a travaillé avec les grands maitres tailleurs de Naples, notamment à la sartoria Panico. Est-ce que la transmission et l’apprentissage se font toujours ainsi auprès des maitres et non pas dans des écoles ou des formations dédiées ?
Si notre atelier de tailleur a été fondé en 2014, mon père a commencé à travailler à l’âge de 8 ans, parce qu’à l’époque les gens allaient travailler sous l’œil vigilant de « RO’ MAST » comme on dit en napolitain, qui peut se traduire par le maître. Aujourd’hui, il n’y a pas de véritables écoles où les gens peuvent apprendre l’art sartorial, parce que je le définis comme de l’art. Un jeune aujourd’hui, s’il veut apprendre, un peu comme je l’ai fait, doit aller chez un tailleur et apprendre dans son atelier. Mais surtout, celui qui apprend doit en quelque sorte « voler » le métier parce que les tailleurs ne s’arrêtent pas dans leur travail pour montrer comment ils font et même pour transmettre les astuces du métier. C’est donc à chacun de prendre la façon de travailler.
Si l’atelier est basé à Naples, vous voyagez beaucoup et vous avez des clients dans de nombreux pays : États-Unis, France, Grèce, Asie, etc. Est-ce qu’il y a des différences dans les demandes des clients selon les pays et les cultures nationales ?
En effet. Ces dernières années, en voyageant beaucoup dans différents pays, j’ai découvert de nombreuses façons d’adapter le costume au corps, selon les besoins des personnes dans chacun des pays où j’interviens.
La tradition sartoriale est quelque chose de très important en Italie : à Naples bien sûr, mais aussi à Rome, Milan, Florence. Comment expliquez-vous que cette tradition se maintienne en Italie alors que dans d’autres pays d’Europe, notamment en France, les tailleurs indépendants ont presque tous disparu.
Le fait que, surtout à Naples, nous parvenons encore à maintenir l’art sartorial et, comme je le disais tout à l’heure, surtout ici dans le sud, c’est parce que nous avons cette volonté de poursuivre un travail, de continuer un projet commencé par sa propre famille.
Pour réaliser un costume, il faut tout un environnement industriel : les tailleurs, mais aussi les fabricants de tissus, de boutons, de fils. Est-ce grâce à cet environnement du secteur textile que Naples peut être une grande capitale de l’art tailleur ?
Disons que ce n’est pas seulement parce qu’ici, à Naples, nous avons un peu de tout ce que le tailleur exige. Ce qui fait de Naples la capitale de l’art tailleur c’est que, au fil du temps, Naples a établi son image de tailleur dans le monde avec un style propre, qui est reconnu et recherché par les amateurs.
Comment définiriez-vous le style napolitain par rapport aux autres styles sartoriaux ?
Le style napolitain se caractérise par le style de la manche de chemise, également connu sous le nom de « A’MAPPINA », ainsi que le 3-boutons roulé 2-boutons, qui serait un 2-boutons, mais le premier et le dernier bouton sont figuratifs. On trouve aussi la fameuse poche plaquée qui est aussi appelée « A’PIGNATA O TASCA A PEZZ », et également les vestes non doublées qui rendent les vestes très légères. Ce sont tous ces détails qui le rendent reconnaissable dans le monde.