Christianisme, Vatican, Russie, Portugal, florilège des parutions de la semaine.
Dernier livre de Benoît XVI
Benoît XVI, Ce qu’est le christianisme : un testament spirituel, Éditions du Rocher, 18,90 €.
Voici le dernier livre de Benoît XVI. Publié après sa mort selon sa volonté, cet ouvrage regroupe l’ensemble des dernières contributions sur les grands thèmes de la religion chrétienne qu’il a pu effectuer au cours de ses dernières années au sein du monastère Mater Ecclesiæ au Vatican. C’est de cet endroit que le pape émérite a observé l’évolution de l’Europe et du monde à la fin de sa vie.
Après l’élection du pape François, Benoît XVI reprend lentement son travail théologique avant de laisser derrière lui un dernier ouvrage actuel sur ce que représente le christianisme dans l’ère de notre temps. Il évoque des sujets d’une brûlante actualité, tels que le dialogue islamo-chrétien, la relation entre les juifs et les chrétiens ou encore l’Église et les abus sexuels. Il confie également aux pays européens l’importance de ne pas renoncer à l’héritage chrétien, qui est un patrimoine précieux pour l’humanité. Il précise enfin les fondamentaux de la foi catholique, comme le sens de la communion, le sacerdoce catholique ou encore l’amour comme origine de la mission.
Un ouvrage qui rassemble la force des arguments et la sagesse d’un grand esprit. Ce dernier livre du 265e successeur de Pierre n’est pas seulement un recueil de textes déjà publiés ou en partie inédits, mais, comme l’indique le sous-titre, presque un testament spirituel d’un père toujours attentif aux attentes et aux espoirs des fidèles et de l’humanité toute entière.
Chute du Salazarisme
Yves Léonard, Sous les œillets la révolution, Le 25 avril au Portugal, Chandeigne, 15 euros, 2023.
À l’approche du 49e anniversaire de la révolution des œillets, il manquait un ouvrage de synthèse retraçant le fil des événements et le processus qui ramena le Portugal dans le bercail de la famille des démocraties européennes. C’est désormais chose faite grâce au talent de conteur d’Yves Léonard, historien et spécialiste du Portugal contemporain dont on lira également avec intérêts ses travaux sur le salazarisme paru également aux éditions Chandeigne, précieuse passerelle de papier entre la France et les mondes lusophones.
L’ouvrage retrace avec le souci du détail (et non sans poésie) les circonstances et le déroulement de cette folle journée du 25 avril 1974. Événement majeur qui conduit le Mouvement des Forces armées dirigé par des officiers subalternes, las des guerres coloniales à renverser le régime de Marcello Caetano au pouvoir depuis 1969, héritier de Salazar, perçu comme de plus en plus anachronique. Si le programme du mouvement est flou et les sensibilités diverses, tous s’entendent sur l’impératif des trois D : décoloniser, démocratiser, développer.
Le 25 avril, jour initial d’une liberté reconquise pacifiquement par des militaires alors que nous sommes quelques mois seulement après la chute de Salvador Allende au Chili, donne le coup d’envoi à un processus de transition euphorique et tendu. Le Portugal est rattrapé par la guerre froide, l’extrême gauche portugaise désireuse de transformer le rectangle portugais en une sorte de Cuba en Europe du Sud.
Le livre d’Yves Léonard nous éclaire sur la trajectoire singulière de transition portugaise et ce qui la distingue de la transition espagnole vers la démocratie. Il se veut aussi un plaidoyer pour la lucidité et le réalisme, à mesure que les témoins disparaissent et que la mémoire nationale est modulée par le pouvoir politique du moment. D’où cette belle formule, « arroser les œillets » pour que le 25 avril demeure encore et toujours un appel à la liberté.
Tigrane Yégavian
Le cardinal de Richelieu
Coline Dupuy, André Mutti et Christian Lerolle, Richelieu, Plein vent, 15,90 €, 2023.
D’abord promis au métier d’armes, Armand Jean du Plessis de Richelieu est nommé évêque par Henri IV à 21 ans avant d’être présenté par le Père Joseph, capucin réputé, à la régente Marie de Médicis qui le remarque rapidement. Peu à peu, Richelieu avance vers son grand destin de cardinal, de conseiller de la régente et de principal ministre de son fils, le futur Louis XIII.
C’est la vie de ce grand personnage de l’histoire de France que les auteurs ont décidé de retracer au travers d’une nouvelle bande dessinée riche en illustrations. Cette dernière permet de revivre de façon ludique les grands moments de la vie du cardinal notamment concernant la guerre de Trente Ans, le siège de La Rochelle, la lutte contre les Habsbourg et autres grands événements qui montrent comment le cardinal laisse à sa mort un royaume au sommet de sa gloire et de son rayonnement.
Une bande dessinée idéale pour se remémorer le parcours d’Armand Jean du Plessis, dit le cardinal de Richelieu, considéré comme le père de la diplomatie et de l’État moderne en France. Il fut également l’inspirateur de l’absolutisme français ainsi que des traités de Westphalie qui mirent fin en 1648 à la guerre de Trente Ans.
Mystères du Vatican
Yvonnick Denoël, Les espions du Vatican, de la Seconde Guerre mondiale à nos jours, Nouveau monde éditions, 11,90 €.
À cause de son histoire très ancienne, de son goût du secret et de son statut si particulier, le Vatican est une véritable machine à fantasmes, même pour les puissants de ce monde. En effet, le Saint-Siège a toujours été la cible de services secrets étrangers. Persuadés que le Vatican dispose d’un réseau de renseignement sans équivalent, il faut soit en percer les secrets, soit s’en faire un allié.
Historien et spécialiste du renseignement, Yvonnick Denoël, nous livre une étude rigoureuse et impressionnante sur les quatre-vingts années de la guerre de l’ombre, dans et autour de la curie romaine. Pendant la Seconde Guerre mondiale et la guerre froide, Rome a été un véritable nid d’espions de toutes nationalités. Les chefs d’État du XXe siècle, notamment Hitler, Mussolini, Staline, Roosevelt et Reagan ont tous consacré des moyens démesurés à faire espionner le microscopique État du Vatican. Aussi, de l’autre côté, de nombreux prêtres se sont impliqués dans des missions allant de la chasse aux « taupes » à la diplomatie secrète, en passant par des enquêtes sur les assassinats, mais aussi des missions à haut risque de l’autre côté du rideau de fer, comme les nombreux prêtres infiltrés en Union soviétique.
Un ouvrage qui se lit comme un roman d’espionnage qui fourmille d’anecdotes et nous plonge au cœur des scandales et secrets qui sont longtemps restés dans l’obscurité des couloirs du Saint-Siège.
Le personnage de Poutine
Hélène Blanc (dir), Goodbye Poutine, Ginkgo, 18 €, 2023.
Malgré des signaux clairs, le monde a refusé pendant près de quinze ans d’appréhender la réalité de la politique étrangère du Kremlin. Sous la direction d’Hélène Blanc, experte du monde slave et criminologue, vingt-sept experts décryptent l’actuelle crise ukrainienne. Si l’on peut apprécier la Russie, on peut remettre en question la politique qu’elle mène en Ukraine. C’est ce que montrent nombre de participants à cet ouvrage collectif qui comptent parmi les meilleurs analystes, universitaires, militaires, politologues et historiens de ce conflit.
Ce livre, riche de ses auteurs, est construit autour de trois grandes parties : « Europe-occident-Russie », « Le monde selon Vladimir Poutine » et « Le monde ukrainien ».
La lecture de ce nouvel opus, sous la direction engagée d’Hélène Blanc et de ses co-auteurs, permet une compréhension pédagogique et objective de cette absurde tragédie qui aura fait, de 2014 à 2023, d’innombrables victimes civiles et militaires. Un indispensable ouvrage collectif pour comprendre ce qui se joue depuis plus de 365 jours en Ukraine, prise en tenaille entre un destin politique manifestement européen et une ethnologie historiquement slave.