Mondialisation et Mondialisme : sortir de la confusion

31 décembre 2022

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Mondialisation et Mondialisme : sortir de la confusion

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Les discussions de politique économique sont constamment plombées par des confusions de deux termes aux sonorités voisines, la mondialisation et le mondialisme. Distinguer les deux termes est pourtant nécessaire pour comprendre le fonctionnement de l’économie mondiale.

Les discussions de politique économique sont constamment plombées par des confusions de deux termes aux sonorités voisines, la mondialisation et le mondialisme.

La mondialisation économique est une situation d’ouverture qui exprime le caractère international des productions de biens et de services et des facteurs, travail, capital, technologie. Ce n’est pas une nouveauté de l’époque même si elle s’est beaucoup déployée depuis la Deuxième Guerre mondiale et il est bien difficile d’envisager l’avenir sans composer avec.

Le mondialisme est une tendance d’essence socialiste voulant confier la conduite des affaires du monde à une oligarchie publique et privée : les très grandes puissances et en particulier les États-Unis, les très grandes entreprises, les hommes d’influence de toutes les grandes organisations internationales, forment ainsi un « bouquet » de décideurs de plus en plus coordonnés. Une manifestation comme celle de Davos en est un exemple.

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Lien entre les deux notions

Y a-t-il un lien entre ces deux notions différentes ? Oui certainement, car la tendance au mondialisme est l’un des traits de la mondialisation de notre époque, qu’elle marque de son empreinte. Par exemple, la commercialisation des vaccins du Covid depuis 2020 montre à la fois la mondialisation bénéfique des échanges et le jeu mal caché du mondialisme. Les économistes doivent donc affiner leur vision des conséquences de la mondialisation en élargissant leur compréhension du marché mondial pour tenir compte d’un mondialisme en opération où fleurissent les collusions, les réseaux, le lobbying … et prendre des cours de géopolitique.

Y a-t-il des précédents historiques au mondialisme ? Il en est un évident, celui du XIXe siècle. Les spectateurs des séries Victoria et même The Crown savent que les dynasties régnantes en Europe avaient entre elles des liens familiaux et d’intérêt serrés. C’était le mondialisme d’alors, circonscrit géographiquement à l’Europe et moins économique que politique. Il fut organisé au Traité de Vienne de 1815 pour faire barrage aux poussées des peuples (populistes ?) qui voulaient s’émanciper des Empires. Toutes proportions gardées, nos traités de coopération-fusion internationale et le dernier d’entre eux, le Traité de Lisbonne, reconstruisent le Traité de Vienne. Même les images familiales, tel le « couple franco-allemand », sont convoquées sur fond de défense des « valeurs ».

Considérons donc que le mondialisme infiltre la mondialisation ou plus exactement qu’il veut la diriger. Prenons par exemple la question si sensible de l’immigration.

Le principe du « libre échangisme » des économistes nous dit simplement que si l’on ouvre les frontières aux mouvements de personnes, de capitaux et de biens, on rehausse le niveau de vie dans l’ensemble du monde.

Pour les personnes, ceci vaut si les États ne faussent pas le jeu du libéralisme en déconnectant les revenus de l’apport en travail, notamment par un assistanat généralisé.

C’est par ce mécanisme libre-échangiste que les États-Unis ont réussi à intégrer une quantité d’immigrants depuis le XIXe siècle. Mais c’est en vertu du même principe libre-échangiste que le Brésil, l’Australie, l’Europe de l’Est… ont profité de l’apport de capitaux qui leur ont permis de se développer. Et c’est encore en vertu du même principe que le Japon, la Chine, l’Inde et toute l’Asie du Sud-Est ont développé une production de biens industriels banals d’exportation avant de franchir des étapes technologiques décisives vers la puissance économique. On voit que l’ouverture et la mondialisation spontanée proposent plusieurs fortes options partiellement différentes et toutes les stratégies intermédiaires dérivées pour réaliser le développement économique mondial.

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Constructivisme social

Au contraire, le mondialisme décide de choisir et d’imposer le déplacement des populations comme une solution prédominante à la pauvreté, un bon exemple de « constructivisme » social dénoncé par Friedrich Hayek. Réfugié dans sa vision de simple répartition, le Pape François lui-même s’est rallié à cette vue qui fait bon marché de la diversité des cultures de la planète. Les mondialistes ont une vision économique fausse parce qu’ils prennent les personnes pour des pions interchangeables et de peu d’importance, dotés de surcroît d’un capital humain professionnel mal défini, une donnée de départ comparable d’un pays à l’autre. Dans ces conditions, quelques dizaines de millions de personnes en plus ici et en moins là émaillent le récit privilégié des rapports internationaux sur le Développement.

À l’inverse, certains populistes nationaux ne comprennent pas qu’ils ont à choisir entre promouvoir une industrie nationale à faible productivité et l’immigration, l’une n’allant pas sans l’autre ; ils doivent admettre que la spécialisation internationale de la France ne peut affermir notre niveau de vie et nous éviter la tiers-mondisation que si elle se maintient au moins au degré actuel de productivité du travail ; ceci exclut le retour des industries de main-d’œuvre.

Aussi particulier qu’il soit cet exemple a le mérite de montrer que les exigences de la mondialisation ne sont pas forcément celles du mondialisme, à condition de les comprendre et d’y adapter le pays. Autant il paraît suicidaire de s’opposer à la mondialisation autant il est souhaitable de refuser le mondialisme pour préserver nos chances de plein développement économique futur.

Bernard Landais est l’auteur de Réagir au déclin ; une économie politique pour la Droite française, VA éditions, 2021.

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À propos de l’auteur
Bernard Landais

Bernard Landais

Bernard Landais est professeur émérite de Sciences Economiques à l’Université de Bretagne-Sud et auteur de « Croissance économique et choix politiques », L’Harmattan 2020.
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