<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Le Royaume-Uni : le pays qui n’aime pas changer ?

2 octobre 2022

Temps de lecture : 12 minutes

Photo : Fait unique dans l’histoire du Royaume-Uni : quatre générations réunies au balcon Crédits: Alpha Press/Shutterstock

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Le Royaume-Uni : le pays qui n’aime pas changer ?

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Nos voisins d’outre-Manche sont bien curieux. Ils donnent une impression d’immobilité et de refus du changement, avec leur monarchie et leurs traditions tout en étant des adeptes de la modernité, ayant déjà opérés de multiples transformations. Vu de Paris, la politique anglaise est souvent difficile à comprendre. Éclairage avec Jeremy Stubbs pour décrypter le fonctionnement des Anglais. 

 Jeremy Stubbs, docteur ès lettres

Dans un essai écrit en 1941 sous la menace des bombes qui tombaient sur Londres, George Orwell présentait une image de l’Angleterre qui vaut pour le Royaume-Uni : « La Bourse sera démolie, la charrue au cheval de trait sera remplacée par le tracteur, les manoirs aristocratiques seront transformés en camps de vacances pour enfants, le derby de cricket entre les écoles d’Eton et de Harrow sera oublié, mais l’Angleterre sera toujours l’Angleterre : un animal vivant pérenne, tendu vers le futur sans oublier son passé, et, comme tout ce qui est vivant, doté de la capacité de changer au point d’en devenir méconnaissable, tout en restant le même. » Certes, le Royaume-Uni n’est pas la seule nation présentant un tel souci de continuité, mais chez les Britanniques cette préoccupation est poussée si loin que, vue de l’extérieur, elle paraît se réduire à un goût immodéré pour l’archaïsme, à une recherche obsessionnelle d’excentricité ou à un amour du désordre. Car, pour paradoxal que cela puisse paraître, le pays de la réforme, de la révolution industrielle, de l’impérialisme colonial, du Brexit, est le pays de la continuité. Il se caractérise par un refus de faire table rase du passé ainsi que par une insistance sur des réformes parcellaires, faites au cas par cas, plutôt que sur de vastes programmes de transformation radicale. Selon Edmund Burke dans ses Réflexions sur la Révolution de France de 1790 : « Penchant à conserver, talent d’améliorer, voilà les deux qualités réunies qui me feraient juger de la bonté d’un homme d’État. » Si, aujourd’hui, les conservateurs se sont approprié la philosophie de Burke, elle exprime néanmoins une attitude générale qui nous donne une clé pour la compréhension des institutions et de la vie politique outre-Manche.

Une monarchie, mais constitutionnelle ?

Le jubilé de platine de la reine vient de nous rappeler que le Royaume-Uni est une monarchie constitutionnelle, mais qu’est-ce à dire ? Selon une image qui remonte au xviiie siècle chez les Anglais, c’est une république avec une couronne. L’Angleterre a été une véritable république – on disait « commonwealth » – sous le dictateur puritain Oliver Cromwell entre 1649, année de l’exécution du roi Charles Ier, et 1660, année de la restauration. Le système actuel est le fruit d’une série non de révolutions brutales, mais d’évolutions organiques. Il y a une division du travail constitutionnel : la reine est le chef de l’État ; le Premier ministre est le chef du gouvernement. La fonction de la reine est d’abord de décharger les politiques du poids de la plupart des rôles essentiellement symboliques de l’État. Ce faisant, elle joue quand même un rôle diplomatique important. En tant que descendante d’une longue lignée, elle incarne cette continuité entre un passé lointain et le présent. Enfin, elle fournit au Premier ministre l’occasion d’une discussion privée hebdomadaire avec quelqu’un qui ne vote pas et qui n’appartient pas à un parti.

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On entend souvent que le Royaume-Uni n’a pas de constitution écrite. En fait, sa constitution n’est pas inscrite dans une seule charte comme l’américaine ou (plus ou moins) la française, mais repose sur quatre piliers et toute une série de documents hétéroclites :

1/ La Statute law : des lois votées par le Parlement qui portent sur son propre fonctionnement et définissent les droits des citoyens. Des exemples notoires sont la pétition des droits de 1628 et la charte des droits de 1689, qu’on a interprétées par la suite comme des affirmations des libertés fondamentales de tout sujet du monarque.

2/ La Common law, ou la jurisprudence de certaines décisions de magistrats, fondée sur la notion de précédent, notion qui peut s’appliquer au fonctionnement du Parlement lui-même : en 2019, au milieu du drame du Brexit, le président des communes a cité un précédent de 1604 concernant la procédure des votes. Angela Merkel a ironisé sur des pratiques aussi vétustes ; il est vrai que la démocratie en Allemagne est plus récente…

3/ Des documents faisant autorité, comme la Grande Charte (Magna Carta) dont la première version date de 1215, et des magna opera de grands spécialistes constitutionnels comme Henry de Bracton (xiiie siècle) et sir Edward Coke (xviie), ainsi que Thomas Erskine May, Walter Bagehot et A. V. Dicey (tous xixe). À partir des années 1980, on assiste à la rédaction d’une série de codes, régulièrement mis à jour, destinés à régir les activités des fonctionnaires, des ministres et du bureau du cabinet, l’organe de décision collective du gouvernement présidé par le Premier ministre.

4/ Des conventions non écrites, qui comprennent non seulement le rituel des cérémonies telles que l’ouverture du Parlement, mais aussi des pratiques comme la désignation du Premier ministre. Selon la convention, ce dernier, bien que nommé par la reine, est toujours le chef du parti qui a le plus de sièges aux communes. Quand, le 6 juin, Boris Johnson a fait face à un vote de défiance de ses propres députés, l’enjeu était national, car s’il cessait d’être chef de parti, il cesserait automatiquement d’être chef de gouvernement.

La définition la plus courte de la souveraineté au Royaume-Uni tient dans une formule traditionnelle très courte : The Queen in Parliament (la reine dans le Parlement), et la Constitution pourrait être résumée dans une phrase succincte : « Ce que décide la reine dans le Parlement est la loi. »

Trompettes aux armoiries d’Elizabeth II lors du National Service of Thanksgiving à la cathédrale St Paul, le 3 juin 2022 Crédits : Dan Kitwood/WPA Pool/Shutterstock

Un Royaume-Uni ?

Puisque nous parlons de la Constitution du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et de l’Irlande du Nord, en quoi ce royaume est-il « uni » ? On pourrait définir cette entité curieuse par une formule presque commerciale : « Quatre pays pour le prix d’un seul ! » Au cours des siècles, les quatre pays ont été unis de gré ou de force. Selon une supposition fréquente chez les Français, les méchants Anglais auraient conquis les autres, mais la réalité est plus nuancée. Le pays de Galles a été largement assujetti par les Normands, après la conquête de l’Angleterre, avant d’être absorbé sur le plan administratif par son grand voisin sous les rois Tudor, une dynastie d’origine… galloise. Après des siècles de luttes et de querelles, l’Écosse et l’Angleterre ont enfin trouvé un point commun : le protestantisme, permettant d’unir les deux couronnes à partir de 1603, année où Jacques VI d’Écosse devient aussi Jacques Ier d’Angleterre. C’est en 1707 que les Parlements des deux pays consentent librement et légalement de fusionner en une seule assemblée à Westminster. L’Irlande a été la scène de campagnes guerrières menées par les Normands, relayées par les Anglais, jusqu’à ce que Cromwell assujettisse la plupart du pays, opération complétée à la fin du xviie siècle par le roi d’Angleterre et d’Écosse, Guillaume III. Pour la plupart, les protestants unionistes de l’Irlande du Nord actuelle sont des descendants, non de milords anglais, mais de calvinistes écossais. Embrigadée de force dans l’union anglo-écossaise en 1801, l’Irlande a retrouvé une large autonomie en 1922 avec la partition du pays.

La question de la dévolution des pouvoirs par l’État central localisé à Londres a souvent été débattue, mais c’est finalement sous le travailliste Tony Blair, en 1998, que le gouvernement est passé à l’acte. De manière typiquement britannique, en suivant l’approche « organique » qui s’adapte aux circonstances spécifiques des uns et des autres, la dévolution a pris une forme différente dans chaque pays. L’Écosse a retrouvé un Parlement, mais pas celui d’avant 1707, car ce dernier est toujours fusionné avec l’anglais à Westminster, où le pays dispose de 59 sièges de député. Le Parlement à Édimbourg est monocaméral et possède 129 sièges. Il y a un gouvernement exécutif sous un First Minister – à ne pas confondre avec le Prime Minister à Westminster. Le Pays de Galles a son Parlement, appelé Senedd en gallois – l’identité galloise étant inséparable de la préservation de la langue, d’origine celtique – qui comporte 60 sièges, tandis que 40 lui sont réservés à Westminster. L’Irlande du Nord a une Assemblée nationale, comportant 90 sièges, tandis que 18 lui restent réservés à Westminster. L’exécutif est dirigé conjointement par un First Minister et un Deputy First Minister (son adjoint), qui sont les chefs des deux partis ayant le plus de sièges à l’Assemblée. Normalement, l’un est unioniste – qui veut maintenir l’union avec la Grande-Bretagne – et l’autre nationaliste – qui veut la réunification de toute l’Irlande. Les pouvoirs dévolus relèvent généralement de domaines ayant une dimension locale comme l’agriculture, le développement économique, l’éducation, la santé, l’environnement ou le logement. La liste s’est allongée progressivement depuis 1998. Dernière incohérence, il n’y a pas d’assemblée pour l’Angleterre. Les décisions législatives la concernant sont prises à Westminster. Par une asymétrie qu’on a surnommée la « Question de West Lothian » (d’après une question posée aux communes par le député de cette circonscription écossaise en 1977), les députés des trois autres pays peuvent voter sur des projets de loi portant, par exemple, sur l’éducation en Angleterre, tandis que le contraire est impossible, puisque, par définition, il n’y a pas de députés anglais dans les assemblées dévolues. On a suggéré que le vote en faveur du Brexit en 2016 exprimait une frustration spécifiquement anglaise vis-à-vis du système politique, mais les Anglais ne réclament pas une assemblée dédiée pour les représenter. La population de l’Angleterre est beaucoup plus grande que celle des trois autres pays, dont la population combinée (environ 10,5 millions) est inférieure à celle de la région de Londres (plus de 14 millions). Le calcul des budgets alloués par l’exécutif londonien à chaque gouvernement dévolu pour leurs dépenses en matière de services publics donne toujours des chiffres par tête plus élevés dans les trois autres pays qu’en Angleterre. Peu importe, les problèmes que connaissent les exécutifs dévolus sont presque toujours mis par eux sur le compte de Westminster.

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Est-ce à dire que la désagrégation du Royaume-Uni est imminente ? Les travaillistes ont la moitié des sièges au Parlement gallois et la moitié des 40 sièges à Westminster. Le parti nationaliste, Plaid Cymru, est donc minoritaire et, selon les sondages, seul un tiers des Gallois est en faveur de l’indépendance. En revanche, l’Écosse y est plus favorable, puisque le Parti national écossais (SNP) domine le Parlement d’Édimbourg depuis 2007 et a actuellement 45 des 59 sièges aux communes. Dans le référendum de 2014, 55 % des Écossais ont voté contre l’indépendance, mais le SNP affirme que le Brexit, contre lequel une majorité d’Écossais a voté en 2016, justifie un nouveau référendum. Pourtant, le gouvernement de Westminster n’est pas disposé à donner sa permission, et d’ailleurs les sondages indiquent que, sur le long terme, le soutien pour l’indépendance est en déclin : actuellement, une légère majorité y est défavorable. La dévolution en Irlande du Nord est en partie le fruit de deux accords, dits de Belfast (on dit aussi l’Accord du Vendredi saint et l’Accord de paix pour l’Irlande du Nord), l’un entre les gouvernements du Royaume-Uni et la République d’Irlande, et l’autre entre la plupart des partis politiques de la province (dans le jargon officiel). Ces accords prévoient la réunification de l’Irlande si deux référendums, l’un tenu au nord de la frontière et l’autre au sud, donnent un avis favorable. Les accords ne stipulent rien concernant l’occasion et la manière de tenir un tel référendum dans la République. Quant à l’Irlande du Nord, le ministre britannique responsable de la province doit donner son consentement si les sondages indiquent qu’une majorité des citoyens y est favorable. Or, si jusqu’à présent les unionistes protestants ont joui d’une majorité dans la population nord-irlandaise, la tendance démographique à long temps favorise les catholiques. Dans les élections cette année, le parti des nationalistes, Sinn Féin, a eu la majorité à l’Assemblée pour la première fois. Pourtant, il n’a pas fait campagne sur la réunification de l’Irlande, mais sur le coût de la vie. Et il n’a pas augmenté le nombre de ses sièges : c’est son rival, le Parti unioniste démocrate (DUP), qui en a perdu. La vraie nouveauté, c’est la progression du Parti de l’Alliance qui a plus que doublé le total de ses sièges. Ce parti représente un nombre grandissant de Nord-Irlandais qui sont indifférents au fait de vivre dans le Royaume-Uni ou la République et qui s’accommodent très bien d’habiter une sorte d’entre-deux. Le hic, c’est que l’exécutif, qui pour la première fois devrait avoir un First Minister nationaliste, est bloqué, car le chef du DUP refuse d’y participer tant que les négociations à propos de l’application du protocole sur l’Irlande du Nord ne seront pas terminées. Ce qui nous ramène au Brexit. Car l’Irlande du Nord reste dans le marché unique de l’UE, tout en participant à une union douanière avec la Grande-Bretagne. L’objectif du protocole est de régir les échanges de biens à travers la mer d’Irlande. Son application s’est révélée problématique, dans la mesure où les procédures concernant ces exportations sont relativement lentes et coûteuses. La frontière douanière qui se dessine ainsi ne plaît pas aux unionistes, car les Accords de Belfast ont invisibilisé la frontière entre les deux Irlande, ce qui plaît aux nationalistes. L’affaire du protocole représente, en microcosme, toutes les négociations sur le Brexit. En juin, Londres a présenté un projet de loi destiné à renier certains aspects du protocole. Le Brexit restera donc inachevé pour une durée indéterminée.

Westminster

D’un point de vue français, toutes ces dispositions différentes manquent d’ordre et de méthode. Mais l’élasticité « organique » de l’approche britannique permet à sa manière de gérer la complexité des évolutions de la société moderne, ainsi que les rivalités entre les institutions de gouvernement. La branche législative, le Parlement de Westminster, est bicamérale. La Chambre des communes est composée de 650 députés qui sont élus selon le système dit « first-past-the-post » – en français, le scrutin uninominal majoritaire à un tour – qui est loin d’être proportionnel. En 2015, le conservateur David Cameron gagne les élections avec 36,9 % des votes et 330 sièges, lui donnant une majorité de 10. En 2017, son successeur Theresa May a 42,4 % des votes, mais seulement 317 sièges, un nombre insuffisant pour une majorité. En 2019, Boris Johnson, avec un pourcentage de plus, a une majorité de 80. La Chambre des lords a actuellement 768 pairs dont le nombre n’est pas spécifié par une loi ou une convention. Ils sont majoritairement nommés par les partis politiques qui fonctionnent un peu comme les grands électeurs en France. Il y a aussi jusqu’à 26 Lords Spiritual qui sont des évêques et archevêques de l’Église d’Angleterre. Ces derniers sont loin de constituer un élément réactionnaire : ils confondent souvent christianisme et socialisme, voire wokisme. Tony Blair a essayé de bannir des lords tous les pairs héréditaires, mais aujourd’hui il en reste 92 : deux qui y sont d’office par leur fonction administrative ; 15 qui sont élus par la Chambre ; et 75 qui sont choisis par les autres pairs héréditaires groupés selon leur parti politique. Jusqu’en 2009, il y avait aussi des Law Lords, les principaux magistrats du pays qui, siégeant ensemble dans le palais de Westminster, constituaient la plus haute cour d’appel. Prétendant que la branche judiciaire était ainsi trop influencée par la législative, c’est encore Tony Blair qui a créé une nouvelle institution autonome, la Cour suprême, avec 12 juges. À la différence de la Cour suprême américaine, la britannique n’a pas le droit de contester des lois votées par le Parlement, mais a le pouvoir de contester les décisions des ministres. Les membres de l’exécutif sont presque tous choisis parmi les élus des communes, selon une convention qui souligne le besoin de légitimité démocratique. Ils ont à leur service des fonctionnaires qui, selon un cliché traditionnel, ont pour objectif de bloquer leurs réformes. C’était le sujet d’une série comique de la BBC des années 1980, Yes, Minister, très appréciée de Mme Thatcher. Le Parlement peut contrôler les actions des ministres à travers ses Select Committees ou commissions d’enquête, mais dans la période après 1945 certains spécialistes trouvaient que l’exécutif avait trop de pouvoir. En 1976, un magistrat éminent, lord Hailsham, a parlé d’« une dictature élue », dans la mesure où le gouvernement pouvait faire ce qu’il voulait pendant la durée de son mandat.

La démocratie britannique post-Brexit

Pourtant, ces dernières décennies avaient vu un affaiblissement progressif des pouvoirs de l’exécutif. Les facteurs y ayant contribués sont l’expansion du contrôle juridictionnel, l’intégration au droit britannique du droit de l’UE et de la Convention européenne des droits de l’homme, la dévolution, la création de la Cour suprême et, en 2011, la promulgation du « Fixed-term Parliaments Act », une loi qui privait le gouvernement du pouvoir de dissoudre le Parlement et de tenir des élections quand il voulait. Le Brexit est la revanche de l’exécutif. Non seulement le Royaume-Uni est sorti de l’UE, mais le rapatriement des pouvoirs autrefois concédés à Bruxelles a profité à Westminster qui les a accaparés aux dépens des assemblées dévolues. À l’automne 2019, au plus fort de la crise du Brexit au Parlement, on a assisté à un conflit entre l’exécutif et la Cour suprême, cette dernière décidant que la tentative du nouveau gouvernement de Boris Johnson pour proroger le Parlement n’était pas conforme à la loi. Ce conflit a été provoqué par cette loi de 2011 qui empêchait le gouvernement de dissoudre un Parlement ne pouvant pas se mettre d’accord sur la voie à suivre. Cette année, une nouvelle loi rend ce pouvoir à l’exécutif : retour à la tradition. Quant à la Cour suprême, ses jugements récents tendent à respecter les décisions prises par des ministres en tant qu’élus. On a souvent dit que le Brexit était un phénomène populiste qui exprimait une insatisfaction profonde vis-à-vis des institutions démocratiques traditionnelles. En fait, tout le processus du Brexit – de la loi créant le référendum à la loi approuvant l’accord de retrait, en passant par l’engagement de la plupart des élus à respecter le résultat du référendum – est resté entre les mains des parlementaires. Quand ces derniers se sont montrés incapables de se mettre d’accord, la solution a été de nouvelles élections en décembre 2019. C’est ainsi que, aujourd’hui, le Royaume-Uni se trouve gouverné par trois gouvernements dévolus et un gouvernement central à Westminster partagé entre un exécutif redevenu très puissant, un pouvoir judiciaire désormais plus autonome, et un Parlement qui reste le ring pour les combats pour les deux partis politiques principaux, le Parti conservateur, fondé en 1834, et le Parti travailliste, qui date de 1900. Aucun autre parti n’est jamais parvenu à briser ce duopole. L’« animal » britannique continue à subir des changements dramatiques, mais reste plus que jamais lui-même.

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