Subordonnée aux intérêts nationaux, la stratégie navale sert avant tout un pouvoir et des enjeux qui s’incarnent à terre, où vivent les populations. Elle s’est précisée au fil des progrès technologiques et des besoins de l’Etat. Retour sur ces évolutions, de l’Antiquité aux temps modernes.
« La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Cette formule bien connue de Clausewitz[1] met en valeur le rôle propre de la stratégie, processus de traduction des buts politiques (« objectifs de la guerre ») en actions militaires (« objectifs dans la guerre »)[2]. L’histoire de la stratégie s’est longtemps confondue avec la seule guerre terrestre, les Princes concentrant leurs efforts sur les conquêtes territoriales. Avec l’importance croissante des océans pour la puissance étatique, une stratégie spécifiquement maritime a néanmoins vu le jour au fil du temps. Si la tactique navale fait l’objet de traités dès l’Antiquité, une appréhension politico-stratégique des océans n’apparaît que beaucoup plus tard en Occident. Cette prise de conscience advient en effet au tournant de la Renaissance et de l’avènement de l’État moderne, parallèlement à l’essor des empires coloniaux européens.
La stratégie navale étant évidemment subordonnée aux intérêts nationaux, elle sert avant tout un pouvoir et des enjeux qui s’incarnent à terre, où vivent les populations. En mer, la puissance étatique s’exprime par une « stratégie maritime » plus large qui englobe la stratégie navale à proprement parler, selon la distinction établie par le théoricien britannique Sir Julian Corbett[3]. La première vise en effet l’exploitation générale de la mer, permise notamment par la marine marchande pour le développement du commerce. Les flottes militaires représentent alors un outil au service de cette politique générale : intrinsèquement liée aux opérations terrestres (les « servitudes » de la guerre sur mer selon l’amiral Castex[4]), la stratégie navale constitue une condition voire un préalable à ce but politique en garantissant, sinon la maîtrise des mers, du moins la liberté de navigation.
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La stratégie navale, une stratégie de milieu
La stratégie navale constitue une stratégie dite « de milieu », toute action militaire devant tenir compte des avantages et contraintes particuliers de l’environnement marin.
La mer en premier lieu n’est pas un territoire : espace de transit, elle ne peut être annexée comme une portion terrestre, aussi son occupation demeure toujours relative. Lors, une victoire militaire n’y assure aucun contrôle permanent, des navires rivaux ayant libre champ d’y revenir par la suite. Plutôt qu’un gain immédiat, la supériorité navale octroie ainsi avant tout un avantage qu’il convient d’exploiter dans un second temps. Elle peut notamment être un préalable à une action tactique, telle qu’un débarquement de troupes ou un blocus localisé, ou servir à un niveau plus global, par exemple par l’attrition du soutien adverse[5]. Cette traduction terrestre des actions navales faisait d’ailleurs écrire à l’officier de marine français Bigot de Morogues qu’« il n’y a pas d’affaires décisives à la mer, c’est-à-dire d’où dépende entièrement la fin de la guerre »[6].
Les océans se caractérisent ensuite par leur fluidité. Représentant 71 % du globe, la mer offre des capacités de déplacement incomparables, donnant accès à la grande majorité des pays (sur les 197 États reconnus par les Nations Unies, 153 ont en effet un accès à la mer). Grâce à la poussée d’Archimède, mer constitue par ailleurs le vecteur privilégié de transport de charges importantes sur de très longues distances. Le principe de liberté et la fluidité du milieu marin ont pour implication tactique une liberté de mouvement sans égal. Facilitant l’effet de surprise de même que la fuite, la mer offre un effet de levier à l’attaque, car il est traditionnellement plus aisé de choisir son point d’attaque depuis le large que de défendre l’intégralité d’un littoral[7]. Le marin britannique sir Francis Drake soulignait à cet égard que « le choix du moment et de l’endroit fait la moitié de la victoire »[8], et les tacticiens navals se sont généralement accordés pour reconnaître qu’en mer l’avantage est à l’offensive et à la rapidité[9].
Par ailleurs, si certains passages (détroits ou zones littorales) sont denses en trafic civil, la haute mer permet aux les flottes d’évoluer sans crainte de dommages collatéraux. Cette liberté de manœuvre est d’autant plus importante que les marines exploitent aujourd’hui les trois dimensions (sous-marine, de surface et aérienne).
L’immensité des océans peut cependant contrarier ces avantages tactiques, l’une des principales difficultés consistant souvent à repérer, identifier et suivre un mobile en mer. Le progrès technique a évidemment vu le développement de senseurs de plus en plus sophistiqués : radars modernes, aéronefs et même satellites permettent aujourd’hui de « voir » très loin. En mer de Chine méridionale par exemple, la République populaire de Chine dispose de nombreuses stations radar, lesquelles, associées notamment aux passages de satellites, offrent des moyens de préavis tels qu’il est aujourd’hui difficile d’entrer dans cette zone sans que Pékin n’en soit informé. Néanmoins, localiser et suivre en temps réel une unité au-delà de l’horizon reste une entreprise ardue, les technologies demeurant sensibles à l’environnement[10] et rencontrant par ailleurs leurs contre-mesures (brouillage, signature radar réduite…). Plus simplement, un navire se cachant dans un rail de navigation fréquenté reste difficile à identifier au-delà de la portée visuelle. Ceci inspira au romancier Monssarat que « l’océan est la meilleure cachette du monde »[11], assertion renforcée de nos jours par la figure du sous-marin.
Enfin, la mer n’étant pas le milieu naturel de l’homme, la force des éléments demeure un obstacle majeur. Les navires restent vulnérables aux courants, vents et tempêtes quels que soient les progrès techniques[12]. La guerre navale est en outre particulièrement coûteuse en vies humaines, les bâtiments touchés au combat ou victimes d’une fortune de mer pouvant entraîner leur équipage entier par le fond. Si l’incertitude est consubstantielle de la guerre, elle revêt ainsi une intensité particulière en milieu marin.
Une des conséquences de cette confrontation aux éléments est que la guerre sur mer représente un coût d’entrée majeur. Les navires peuvent faire appel aux technologies parmi les plus sophistiquées, coûteuses pour les finances publiques. Les programmes de construction navale s’étalent en outre sur plusieurs années, nécessitant de ce fait une bonne anticipation politique et un investissement important en R&D[13]. En ajoutant à cela l’effort de formation des marins, l’on comprend que disposer de flottes hauturières pleinement opérationnelles requiert des moyens technologiques et financiers pouvant aboutir à l’apparition d’un « club » relativement fermé de grandes marines mondiales, auxquelles répondent des marines uniquement littorales, voire des forces asymétriques.
Ces particularités ont de tout temps influencé la pensée navale, laquelle s’est structurée autour de quelques oppositions conceptuelles devenues classiques. Le premier débat théorique concerne la centralité de la technologie. Le navire, dont les capacités dépendent des savoirs et matériels disponibles, constitue bien l’unité centrale de la guerre navale, faisant dire au maréchal Foch : « Nous terriens, nous avons des armes pour équiper nos hommes : vous marins, vous avez des hommes pour armer vos bateaux »[14]. La technique occupe une place prépondérante dans la théorie, ce qui explique que les grandes innovations s’accompagnent généralement de discours prônant une rupture avec les stratégies précédentes, jugées obsolètes. Deux types de visions s’affrontent ainsi généralement, l’une centrée sur les technologies nouvelles (courant techniciste), l’autre partisane de principes immuables (courant historiciste).
Un autre débat récurrent tend à opposer puissance et vitesse. Un navire est constitué d’un flotteur (dont dépend la mobilité) et d’un système d’armes (dont dépend la puissance de feu). L’équilibre entre les deux est autant fonction des technologies disponibles que de choix stratégiques. L’on peut privilégier la puissance (canons, missiles, blindage), qui induit un tonnage plus important, ou bien la manœuvrabilité, associée au contraire à un bâtiment plus léger mais moins armé. Ce choix influe notamment sur le format des flottes : à budget contraint, une marine peut choisir de disposer de vaisseaux lourds et puissants, mais peu nombreux, ou d’une multitude de navires plus légers.
Enfin, l’emploi de la force en mer se répartit globalement en deux grands domaines : la haute mer et les zones littorales. La première consacre le théâtre des batailles navales par excellence, selon l’image traditionnelle d’escadres s’affrontant en lignes. La haute mer ne pouvant être annexée, l’enjeu qu’elle représente vise principalement la maîtrise toujours relative des voies de communication. La guerre littorale, quant à elle, comprend les actions dirigées vers ou depuis la terre, qu’il s’agisse de débarquements de troupes, de frappes (au canon ou au missile) ou de blocus.
Les évolutions historiques de la guerre sur mer
Antiquité et Moyen-Âge, les fondements de la guerre navale
Les premières batailles impliquant des navires spécifiquement militaires dont on conserve un témoignage écrit remontent au IIe millénaire av. J.-C.[15]. Contrairement aux lourds bateaux de commerce, les navires de guerre nécessitent d’être rapides et manœuvrables. Ils se spécialisent alors progressivement, s’allègent et s’affinent, et surtout reposent sur la force des rameurs, un mode de propulsion beaucoup plus réactif que les voiles. La trière, qui permet d’embarquer trois rangées de rameurs superposées (soit quelque 170 personnes) apparaît dans l’Antiquité, et la galère plus généralement constitue le modèle typique du vaisseau de guerre pendant plus de deux millénaires, jusqu’à la bataille de Lépante en 1571.
Durant l’Antiquité et le Moyen-Âge, les combats navals sont globalement littoraux et déterminés par les opérations terrestres. La première fonction des marines de guerre est en effet de transporter les troupes, à l’image de la guerre de Troie ou des Croisades.
L’objectif naval ne vise alors pas encore la maîtrise de la haute mer, mais certaines puissances se forgent néanmoins de véritables empires maritimes. Au Ve siècle av. J.-C., Athènes contrôle par exemple le commerce en mer Égée sous l’égide de la Ligue de Délos, créée à l’issue des guerres médiques. Du Xe au XVe siècle, les cités-États de Venise et Gênes étendent leur influence et fondent leur richesse par le développement de comptoirs et de flottes de commerce, rapidement soutenus par des galères armées.
Concernant les modes d’action, les principales attaques navales sont déjà identifiées sous l’Antiquité – elles évolueront certes radicalement avec la technologie, mais pas dans leur essence. On peut distinguer trois armes proprement navales et deux modes de combat indirects (les « pièges » d’une part, tels que les brûlots et plus tard les mines, et les débarquements et blocus d’autre part).
Les trois grands modes d’offensive navale consistent en l’éperonnage, l’abordage, et l’attaque à distance. L’apparition de la trière consacre l’éperon comme système d’arme principal : fixé à la proue, il doit enfoncer la coque des navires adverses en dessous de la ligne de flottaison. C’est la tactique mise en œuvre lors de la victoire stratégique de Salamine (480 av. J.-C.), lors de laquelle les Grecs détruisent la flotte perse et s’assurent la maîtrise des mers. L’éperon connaît également un bref retour en grâce au XIXe siècle.
C’est néanmoins l’abordage qui constitue pour longtemps le moyen d’action privilégié des marines. Sa particularité est qu’une fois le bateau adverse abordé, la logique redevient similaire à celle d’un affrontement terrestre, avec des combats au corps à corps. Les Romains notamment remportent ainsi leurs premières victoires navales : force principalement terrestre, Rome invente le « corbeau », sorte de passerelle mobile que les marins abattaient sur les navires ennemis pour les accrocher et faire passer les légionnaires. La première utilisation avérée eut lieu lors de la bataille de Mylae (260 av. J.-C.), lors de laquelle la flotte de Carthage, qui dominait alors les mers, fut défaite. L’abordage n’est abandonné en France qu’au XIXe siècle, laissant en héritage des sabres aux marins pour leurs tenues d’apparat.
L’artillerie fait enfin très tôt son apparition : les navires embarquent d’abord des archers, puis sous le règne d’Alexandre apparaissent les premières catapultes montées sur des galères. Quant au mythique feu grégeois, il date du VIIe siècle avant J.-C. Évidemment, la tactique navale n’aura de cesse que d’améliorer la portée et la précision de ses armes de jet. Au Moyen-Âge, les archers sont placés sur les châteaux en proue et poupe des navires, pour surplomber l’ennemi et l’assaillir de flèches, étape souvent préliminaire à l’abordage. Un saut technologique est franchi grâce aux canons, dont on trouve la première occurrence en mer sur des navires français à la bataille d’Arnemuiden (1338)[16]. Egalement situés sur les châteaux à l’avant des navires, ils sont cependant très imprécis, voire dangereux à cause de leur instabilité, de leur recul, et surtout des risques d’explosion et d’incendie.
La véritable révolution technique intervient avec l’invention du sabord, qui permet de placer les canons dans les flancs du bâtiment – sans que celui-ci ne prenne l’eau – et non plus à l’avant, améliorant la stabilité en descendant du même coup le centre de gravité général. Surtout, cela permet d’embarquer beaucoup plus d’armes en les alignant dans toute la longueur des navires, lesquels vont peu à peu s’alourdir pour supporter une telle charge. C’est ainsi que les galères médiévales cèdent peu à peu la place aux grands vaisseaux des États modernes.
Les marines de l’État moderne, modèles de la stratégie navale classique
L’Antiquité et le Moyen-Âge n’ont pas laissé de traités de stratégie navale en tant que tels. Les écrits qui nous sont parvenus sont plutôt dédiés à la tactique et forment une littérature guerrière proche des stratagèmes. C’est l’avènement de l’État moderne qui inspire les premières théories de stratégie, dans le sens de l’usage de la force armée à des fins politiques[17], parallèlement à l’apparition en Europe de marines de guerre spécialisées. Au Moyen-Âge, il était en effet courant de réquisitionner les navires marchands pour répondre à des besoins militaires temporaires, en les armant simplement de soldats. Les Princes de l’époque moderne commencent au contraire à penser une force navale spécifique et dédiée.
En France, notamment, le cardinal de Richelieu souligne dès les années 1630 l’importance de la mer pour la puissance d’un pays dans son Testament politique[18]. Théorisant une véritable stratégie maritime, il recommande au roi Louis XIII de construire une marine militaire puissante, laquelle permettrait de fragiliser les royaumes ennemis (Angleterre, Espagne) en contrôlant, ou du moins en perturbant, les voies de communication maritimes. Il considère que les puissances européennes telles que la Hollande tirent leurs richesses de leurs colonies, et, partant, des océans. Les premières escadres navales françaises permanentes naissent ainsi sous son égide. Cette politique est approfondie sous le règne de Louis XIV par Colbert, ministre de la Marine, qui refonde aussi l’administration navale.
La prise de conscience européenne de l’importance des océans est concomitante des grandes découvertes et du développement des empires européens. Si le Portugal, l’Espagne et les Pays-Bas établissent les premiers, dès la Renaissance, des comptoirs et des colonies en Amérique et en Asie, c’est l’empire britannique qui inspire ensuite le modèle typique de la puissance navale. Au XVIe siècle, sir Walter Raleigh affirme que « celui qui commande le commerce de la mer, commande la richesse du monde donc le monde lui-même »[19]. Ce modèle est ensuite théorisé par le stratège américain Alfred Mahan dans son ouvrage The Influence of Sea Power Upon History, 1660-1783 (1890), qui bénéficie d’une renommée mondiale jusqu’à nos jours. Prenant l’empire britannique en exemple, il soutient que la puissance d’un État dépend largement de sa puissance navale, laquelle repose sur deux piliers complémentaires que sont le commerce maritime (flotte marchande) et la maîtrise des mers (flotte militaire). Les empires coloniaux, et le commerce maritime en général, garantissent ressources et débouchés, tandis que les navires de guerre assurent la libre navigation ou imposent un monopole commercial.
Dans cette perspective, le pendant militaire de la stratégie maritime développée par Mahan vise la maîtrise des mers, se concentrant sur le modèle de la bataille. Idéalement, en respectant le principe de concentration des forces, une flotte puissante doit rechercher la « bataille décisive » permettant de détruire la flotte adverse : une telle victoire donne durablement l’ascendant sur ses rivaux pour maîtriser les communications maritimes. La théorie mahanienne privilégie alors les unités lourdes et bien armées destinées à la haute mer, un modèle qui influence pour longtemps la stratégie navale classique, notamment anglo-saxonne. Parallèlement, l’apparition des sabords et le perfectionnement des canons fait tomber l’éperonnage en désuétude, pour ne plus se concentrer que sur la puissance de feu. Moins mobiles que les galères, les hauts vaisseaux de l’époque moderne sont de véritables batteries flottantes qui s’affrontent en duels d’artilleries, en lignes parallèles.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, lors d’un état de guerre quasi-permanente baptisée « Seconde Guerre de Cent Ans », la rivalité entre la France et l’Angleterre s’exprime largement sur les océans, sur fond d’essor de leurs colonies respectives. Cependant, si l’Angleterre insulaire concentre ses forces militaires dans la marine, pour des raisons culturelles, géopolitiques et institutionnelles[20], la France privilégie ses frontières continentales. Opposée malgré tout aux Anglais pour la défense de ses territoires ultra-marins et du commerce maritime afférent, la France n’a pas les moyens de soutenir une flotte équivalente en tonnage, et privilégie alors une stratégie du faible au fort, déjà élaborée par Vauban à la fin du XVIIe siècle. Dans la lignée de Richelieu, il souligne que la puissance des deux plus grands ennemis de la France, l’Angleterre et les Provinces-Unies, provient de leurs richesses tirées des colonies et transportées par la mer. Il convient alors d’attaquer en priorité leurs approvisionnements, donc les voies de communication maritimes. Faute de posséder une flotte supérieure à la leur, la France doit privilégier « la course, qui est une guerre de mer subtile et dérobée, dont les coups seront d’autant plus à craindre pour eux qu’ils vont droit à leur couper le nerf de la guerre »[21].
Ainsi le long XVIIIe siècle (1689 à 1815) met en lumière deux modèles typiques de stratégie navale : la guerre d’escadre et la guerre de course. La première vise la maîtrise de la mer et repose sur d’imposants vaisseaux supérieurs en combats singuliers, tandis que la seconde requiert des bateaux légers et rapides capables d’harceler les navires marchands. Le risque permanent pesant sur les convois entrave en outre les escadres adverses, en les obligeant à se concentrer sur la défense de ces derniers. À l’époque moderne, la guerre de course est principalement le domaine des corsaires. Subordonnée aux priorités politiques nationales, la stratégie navale française cherche ainsi non pas à défaire l’Angleterre sur les mers, mais à s’assurer un meilleur pouvoir de négociations à l’issue des guerres en cours[22].
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[1] Carl von Clausewitz, De la guerre, livre I.
[2] Joseph Henrotin, Olivier Schmitt, Stéphane Taillat, « Histoire de la pensée stratégique », Guerre et stratégie, Presses Universitaires de France, 2015.
[3] Sir Julian Corbett, Principes de stratégie maritime [1911], Economica, Paris, 1993.
[4] Raoul Castex, Théories stratégiques, 1929.
[5] La bataille de l’Atlantique, durant la Seconde Guerre mondiale, visait spécifiquement ce point : la stratégie navale allemande, notamment sous-marine, ciblait les convois logistiques transatlantiques et mit sérieusement à mal les capacités alliées. De la même manière, la guerre de Sept ans entre la France et l’Angleterre, au XVIIIe siècle, s’est en partie jouée en mer par la capture de navires de pêche français avant même le déclenchement des hostilités.
[6] Bigot de Morogues, Tactique navale, 1765.
[7] Le débat actuel autour des bulles dites « A2/AD » (Anti-Access/Area Denial) semble aujourd’hui contredire ce principe ; néanmoins, la protection efficace d’une côte étendue requiert des moyens financiers et technologiques qui demeurent hors de portée de nombreux États.
[8] Drake, cité par Martin Motte in La Mesure de la force, Traité de stratégie de l’Ecole de guerre, Martin Motte (dir.), Georges-Henri Soutou, Jérôme de Lespinois, Olivier Zajec, Editions Tallandier, Paris, 2018, p.137.
[9] Dans cette veine, à la question de savoir ce qui distinguait un bon chef d’un mauvais, l’amiral américain Arleigh Burke avait répondu : « Environ dix secondes ».
[10] Difficultés techniques d’une part : les senseurs (caméras, radars, sonars) sont sensibles aux conditions météorologiques et ne sont pas infaillibles.
[11] Nicolas Monsarrat, La mer cruelle, 1951, Paris, Phébus, 1999.
[12] L’opération du Débarquement du 6 juin 1944 a par exemple été plusieurs fois reportée du fait de mauvaises conditions météorologiques.
[13] Pour les navires modernes, a fortiori, la conception de systèmes d’armes et leur implémentation requiert des besoins en R&D particulièrement longs et coûteux. À titre d’exemple, le programme de porte-avions américains de classe Gerald Ford a été lancé en 2005 et doit courir jusqu’en 2058. Alors que certains de ses systèmes, et notamment les catapultes électromagnétiques, sont encore inachevés, la tête de série a déjà coûté plus de 13 milliards de dollars.
[14] Maréchal Foch, cité par Hervé Coutau-Bégarie, Traité de stratégie, Economica, 4e édition, Paris, 2003, p.573.
[15] Récits relatant notamment les batailles contre les mystérieux « Peuples de la mer », qui participèrent à la chute de l’empire hittite ou de la civilisation mycénienne.
[16] En Asie également, les canons font leur apparition sur des navires au XIVe siècle : c’est ainsi que la marine coréenne réussit à repousser une importante flotte japonaise lors de la bataille de Chinpo, par exemple.
[17] À l’image des écrits de Machiavel, par exemple.
[18] Armand Jean du Plessis de Richelieu, Testament politique, cité par Colomban Lebas, Les Larmes de nos souverains, Études Marines n°6, Centre d’études stratégiques de la Marine, mai 2014, p.17.
[19] Sir Walter Raleigh, cité par François Caron, « De la maîtrise de la mer », Stratégique, 2008.
[20] L’Angleterre incite sa population à investir dans les entreprises coloniales, et notamment dans les compagnies maritimes : le commerce maritime se développe rapidement et justifie la construction d’importantes flottes marchandes et militaires. Au contraire, la France valorise la propriété terrienne, l’économie demeure centrée sur le secteur agraire et favorise les grands propriétaires.
[21] Sébastien le Prestre de Vauban, Mémoire concernant la caprerie (1695), cité par Colomban Lebas, Les Larmes de nos souverains, Études Marines n°6, Centre d’études stratégiques de la Marine, mai 2014, p.28.
[22] « L’attitude historique de la marine française est l’expression d’une pensée navale différente de celle de l’Angleterre, mais non moins cohérente et plus compatible avec la situation de la France. Après Fachoda, le commandant Vignot fait ainsi l’éloge des méthodes navales du XVIIIe siècle : « D’Estaing, de Grasse et d’autres profitèrent de leur supériorité comme tacticiens pour renoncer à l’anéantissement des escadres ennemies et lui préférer une série d’opérations particulières à la conservation de certains points ou à la réussite de certains projets stratégiques ultérieurs. (…) Qu’importerait à l’Angleterre la perte de quelques vaisseaux ? Le point essentiel est de l’attaquer dans ses possessions, source immédiate de sa richesse commerciale et de sa puissance maritime. » », Martin Motte, « L’influence de Mahan sur la marine française », dans Hervé Coutau-Bégarie (dir.), L’évolution de la pensée navale, vol. IV, Economica, Paris, 1994.