Éditorial du hors-série Armée de Terre : le saut vers la haute intensité

25 novembre 2021

Temps de lecture : 3 minutes

Photo : Le saut vers la haute intensité. Crédits : Unsplash

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Éditorial du hors-série Armée de Terre : le saut vers la haute intensité

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Armée de terre : la grande inconnue

Il est loin le temps où l’on allait récolter « les dividendes de la paix ». Ce temps où certains crurent à la fin des guerres voire à l’inutilité des armées, qui devaient servir uniquement pour le maintien de l’ordre. Si le désir de paix perpétuelle est louable, la sagesse des siècles nous apprend qu’il n’y a pas de pays en paix sans armée puissante. Les Finlandais ont coutume de dire qu’il y a toujours une armée dans un pays : si ce n’est pas celle du pays, c’est celle du voisin. Ils savent de quoi ils parlent, eux qui ont souvent vu passer les Suédois et les Russes. Les guerres ethniques dans les Balkans et au Liban, puis les guerres africaines et aujourd’hui les menaces que font peser d’anciens empires en quête de renouveau ont fait litière de l’idée farfelue de la paix sans fin. Voici revenue la réflexion sur la haute intensité, sur l’affrontement d’État à État et donc sur la nécessité de disposer d’une armée solide et capable d’affronter la nouveauté technologique et stratégique. De l’hoplite grec au robot d’aujourd’hui, le matériel change, l’essence de la guerre reste la même.

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Après un numéro spécial consacré à l’armée de l’air (2020), Conflits consacre ce hors-série d’automne à l’armée de terre. Fidèles à notre ligne, nous avons convié des officiers et des civils, des Français et des étrangers afin que chacun puisse apporter ses éléments de réflexion à une contribution commune. Le monde universitaire français a souvent été accusé d’être en retard dans l’étude de l’histoire militaire, notamment par rapport aux Anglo-Saxons. Depuis une dizaine d’années, on assiste toutefois à un renouveau et à un essor des études sur la guerre. Cette réflexion est permise par des centres de recherche et des universités dynamiques, mais aussi par plusieurs éditeurs qui renouvellent le genre et permettent à des auteurs peu connus du grand public de publier leurs travaux et de porter ainsi leurs analyses sur la place publique. Le débat et la confrontation des idées doivent permettre de mieux préparer l’armée de terre à la guerre à venir, qui est par principe imprévisible et dont on ne connaît ni l’heure ni l’adversaire. Ce n’est que par l’étude et l’entraînement qu’il sera possible de relever le défi des guerres, qui ont toujours leurs lots de surprises.

Il n’y a pas d’armée sans nation et l’armée n’appartient pas uniquement aux militaires, mais à l’ensemble des Français, celle-ci étant au service de leur protection et du maintien de la continuité historique du territoire et de son peuple. Or l’armée, pour beaucoup de Français, ne va plus de soi : elle est une grande inconnue. Parce que la menace est lointaine, parce que perdure l’idée pacifiste erronée que c’est en baissant les armes que l’on évite l’attaque de l’ennemi, parce que le territoire métropolitain n’a plus été envahi par l’Allemagne depuis quelques décennies, une part non négligeable de la population estime que l’armée est secondaire. Pour beaucoup de Français, l’armée se limite à des tenues de camouflage et à des uniformes bigarrés sur les Champs-Élysées, quand ils regardent le défilé annuel. Le défi de l’armée de terre est de se faire comprendre de la nation, d’expliquer comment elle fonctionne, comment elle s’adapte aux nouvelles menaces et comment elle est en mesure de protéger les Français d’un danger qui n’est pas imaginaire. L’armée est une société cohérente, soudée, où les liens familiaux et amicaux sont forts, ce qui contribue à sa force, mais qui peut aussi la rendre lointaine à ceux qui n’ont aucun lien familial ou amical avec le monde militaire. Les plus anciens conservent peut-être quelques (mauvais) souvenirs de leur service militaire ; les plus jeunes n’ont bien souvent que la curieuse JDC pour justifier d’un lien avec ce milieu. Parler de l’armée de terre, expliquer comment elle œuvre aujourd’hui est donc plus que jamais une nécessité pour justifier des dépenses militaires et pour distiller l’esprit de défense dans la conscience nationale. C’est une nécessité politique qui conditionne notre survie en tant que peuple et nation libre, pour éviter que l’armée de terre ne soit une grande inconnue aux yeux des citoyens. C’est aussi l’un des objectifs de ce numéro spécial de Conflits que d’œuvrer à cette nécessité démocratique.

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À propos de l’auteur
Jean-Baptiste Noé

Jean-Baptiste Noé

Docteur en histoire économique (Sorbonne-Université), professeur de géopolitique et d'économie politique à l'Institut Albert le Grand. Rédacteur en chef de Conflits.

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