Nouvelle constitution haïtienne : un levier de développement déterminant

6 février 2021

Temps de lecture : 3 minutes

Photo : Les enfants, l'espoir d'Haïti (c) Pixabay

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Nouvelle constitution haïtienne : un levier de développement déterminant

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En termes d’instabilité, peu de pays peuvent se mesurer à Haïti. Doù le consensus de la classe politique locale sur la nécessité de faire évoluer une constitution considérée comme sclérosante. Et ainsi permettre au pays de revenir dans le concert des nations émergentes ?

Conçue à l’aune de la dictature duvaliériste, la constitution de 1987 a été pensée pour empêcher tout retour à un régime dictatorial. Parlementariste à souhait, elle est marquée par l’instabilité et l’émiettement des partis politiques, à l’image de la Quatrième République en France. Face à la paralysie institutionnelle, la classe politique et l’intelligentsia du pays sont unanimes sur la nécessité de modifier une loi fondamentale rigide et peu adaptée au contexte national.

En effet, en trente-trois ans, le pays a connu une véritable valse politique voyant se succéder quatorze chefs d’État, dont seuls six ont mené à terme leur mandat, et vingt-cinq Premiers ministres.  Élu au suffrage universel, le Président dispose d’une légitimité politique importante, mais de peu de pouvoirs et n’a pas la main sur l’administration. Un statut inadapté au vu du poids écrasant exercé par le Parlement, dont les deux chambres (Sénat et Assemblée nationale) doivent valider la nomination du Premier ministre, sans instance de contrôle constitutionnelle, le tout dans le cadre d’un jeu politique historiquement très divisé – on recense près de 250 partis dans le pays.

Équilibrer les institutions

Une situation qui débouche régulièrement sur des cohabitations, voire de longues périodes durant lesquelles le pays est dépourvu de gouvernement. Dès lors, le Président se voit soit réduit à l‘impuissance malgré une légitimité démocratique forte, soit dans l’obligation de gouverner par décrets. Dans les deux cas, il cristallise, souvent malgré lui, la déception et le mécontentement des élites économiques – qui contrôlent les syndicats professionnels.

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C’est fort de ce constat que le Comité consultatif indépendant (CCI) pour l’élaboration d’une nouvelle Constitution a conclu la première partie de ses travaux débouchant sur un avant-projet, dont l’équilibre général est à saluer. « Il est d’une facture classique et appartient sans conteste à la grande famille des Constitutions démo-libérales, souligne ainsi Julien Boudon, professeur de droit constitutionnel à l’université Paris Saclay. Les droits et libertés répondent aux standards internationaux, les institutions sont celles d’un régime présidentiel qui met en équilibre un président de la République et une assemblée nationale. »

Si le projet consacre un renforcement de la fonction présidentielle – dans laquelle le chef de l’État serait désormais épaulé par un vice-président, sur le modèle américain -, cela doit être interprété à la lumière d’une fonction présidentielle symbolique. Le texte propose ainsi de supprimer la fonction de Premier ministre afin de limiter la paralysie à chaque changement de gouvernement, l’approbation de sa politique générale par le pouvoir législatif ayant toujours fait l’objet de longues tractations.

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Prendre en compte la diaspora

Avec cette nouvelle constitution, le Parlement, désormais monocaméral, disposerait d’un pouvoir de contrôle sur le gouvernement et participerait aux nominations des responsables des institutions constituées telles que la Cour constitutionnelle. Au-delà du renforcement de la fonction présidentielle donc, ce projet de loi-mère garantirait de solides équilibres démocratiques. Dans cette dynamique de normalisation des institutions, « trois points retiennent particulièrement l’attention de l’observateur : les conditions liées à la nationalité et à la citoyenneté sont assouplies ; le processus électoral est confié à un Conseil électoral permanent qui s’intéresse uniquement à l’organisation des scrutins et une véritable Cour constitutionnelle est enfin créée », relève Julien Boudon.

Autre avancée majeure à souligner : la constitution prendrait en compte les membres de la diaspora dans la vie politique du pays. Ils seraient désormais représentés à l’Assemblée nationale et pourraient bénéficier de la double nationalité. Selon le sociologue Louis-Naud Pierre, membre du CCI : « c’est un moment historique pour Haïti qui peut retrouver près d’un quart de sa population et, par là même, le sentiment d’une vraie communauté de destin national ». Puisse l’adoption de ce texte par référendum populaire, le 25 avril, permettre au pays de prendre le chemin de la stabilité et du développement.

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À propos de l’auteur
Helena Voulkovski

Helena Voulkovski

Helena Voulkovski travaille sur les risques pays pour un cabinet international d’assurances.
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