<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> La guerre pour les matières premières

28 septembre 2020

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Photo : Exploitation à ciel ouvert de pétrole © Pixabay

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La guerre pour les matières premières

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Fascinés par les dynamiques transverses de la mondialisation, certains internationalistes annonçaient, il y a peu de temps encore, l’avènement de la « fin des territoires ». Selon cette vision, la « logique des flux », en s’imposant, allait mécaniquement entraîner une dilution du contrôle territorial.

Dans la logique libérale, les États, se concentrant sur des stratégies de « hub » ou de « réseau », auraient tout intérêt, pour gérer leurs richesses naturelles, à s’en remettre aux lois du marché et à la fluidité généralisée des échanges. Cette vision assez idéologique semble aujourd’hui décrédibilisée. Les territoires ont résisté, et avec eux la notion de « contrôle ». La crise de 2008 a fini de mettre à mal la confiance généralisée dans les mécanismes d’autorégulation des marchés. Et parmi les déterminants de la puissance, la possession et l’exploitation des richesses des sous-sols, des fonds marins ou des terres arables tiennent une place de plus en plus éminente.

Un nationalisme des ressources

Dans un monde qui s’achemine vers les 9 milliards d’habitants à l’horizon 2050, la logique de l’autosuffisance ou de la moindre dépendance pousse plus que jamais les nations à rivaliser pour sécuriser leurs approvisionnements en matières premières. La compétition pour leur contrôle, qui n’avait jamais cessé de structurer les relations internationales, connaît ces dernières années une intensification particulièrement remarquable.

Dans le domaine agricole, les émeutes de la faim survenues en 2008, suite à la très forte hausse du prix des matières premières agricoles, ont accéléré le mouvement mondial de rachat de terres arables (« land grabbing ») par des investisseurs étrangers. Les États-Unis, les Émirats arabes unis, l’Arabie Saoudite et la Chine figurent parmi les principaux acheteurs. Leurs cibles : l’Afrique et l’Amérique latine, où se situent 90 % des surfaces arables non exploitées dans le monde. Ces appétits engendrent tensions et méfiance.

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La question des hydrocarbures, quant à elle, est toujours au centre des jeux de pouvoir, de captation et de contrôle des ressources. Parvenus à exploiter intensément leurs réserves de gaz de schiste, les États-Unis sont redevenus autosuffisants. L’Arabie Saoudite, ex-fournisseur important, craint à présent un relâchement du lien qui l’unissait à l’Amérique et la protégeait de l’Iran. Son comportement fébrile dans les crises irakienne et syrienne est en partie dû à cette nouvelle équation politico-énergétique. Autre exemple d’évolution sensible, le cas du Groënland, où les réserves de pétrole sont dorénavant évaluées à la moitié de celles d’Arabie Saoudite. Se combinant au référendum d’autonomie élargie de 2008 (75 % de oui), cette perspective nouvelle va accélérer le mouvement vers une éventuelle indépendance. Déjà, les manœuvres d’approche des grandes puissances se multiplient autour de l’île, qui joint à sa position stratégique des perspectives énergétiques désormais appétissantes.

Un domaine, entre tous, apparaît particulièrement emblématique des tensions futures autour des matières premières, ce qui justifie qu’on l’étudie plus spécifiquement : celui des ressources minérales. Ainsi que le pointent des spécialistes de ce secteur, « la dissociation partielle entre pôles producteurs et consommateurs de ressources engendre un enjeu central pour les relations internationales. Depuis la fin des années 1990, la croissance économique mondiale soutenue, tirée par les pays émergents depuis la crise financière de 2008, stimule le cours des matières premières, notamment extractives. La fin des ressources aisément accessibles a des implications géopolitiques fortes : elle déclenche la course à des ressources nouvelles jusque-là protégées par l’hostilité de leurs environnements écologiques (pôles, offshore ultra‐profond, forêts denses) ou géopolitiques[1] ». « La guerre des métaux stratégiques est-elle déclarée ? » s’interroge ainsi un colloque tenu à l’Assemblée nationale française le 13 février 2014. Dans une étude de la même année, le cabinet de conseil américain Ernst & Young évalue les dix plus grands risques courus par les sociétés minières pour les sept prochaines années : entre 2008 et 2014, le « nationalisme des ressources » passe de la 8e à la 4e place des tendances les plus « préoccupantes » pour cette industrie, qui a le globe entier pour terrain d’action.

Nationalisme des ressources ? Il dépasse aujourd’hui les cas bien documentés de la Russie, de la Bolivie ou de la Chine. L’information est ainsi passée inaperçue, mais Madagascar, longtemps terrain d’exploitation passif pour les appétits des multinationales extractives, a annoncé en septembre 2014 la création d’une compagnie publique minière pour exploiter en toute souveraineté les ressources du pays.

Titane, terres rares et affrontements géopolitiques

Le lien entre les crises géopolitiques et les enjeux liés aux matières premières reste direct.

Les sociétés Boeing et United Technologies Corporation viennent de décider de stocker du titane, une substance indispensable pour l’aéronautique, puisqu’il représente 15 à 20 % des métaux utilisés dans un appareil moderne. Qui est le principal fournisseur de titane dans le monde ? Le groupe russe VSMPO. Les deux sociétés américaines, dont la décision a été révélée au mois d’août, craignent-elles d’éventuelles représailles dans le contexte de la crise ukrainienne ? Rappelons que la loi américaine interdit en théorie aux sociétés travaillant pour le Département de la Défense d’acheter leur titane à l’étranger, mais que les deux groupes, en l’occurrence, produisent aussi bien pour le secteur civil que pour leurs clients militaires. Le titane, c’était aussi, symboliquement, la matière du drapeau que la Russie avait planté en 2007 par 4 200 mètres de profondeur pour affirmer sa souveraineté sur son plateau continental arctique… Le gaz est donc bien loin de résumer les leviers dont compte jouer Vladimir Poutine dans la partie qui se joue actuellement entre Washington, Bruxelles, Kiev et Moscou.

Du reste, l’Ukraine n’est pas le seul exemple géoéconomique intéressant dans le cadre nouveau de la « guerre » pour les ressources minérales, qui semble prendre un tour de plus en plus âpre. Entre la Chine et le Japon, le chantage aux approvisionnements est régulièrement brandi dans le cadre des tensions territoriales qui opposent les deux pays en mer de Chine. Dans cette zone, le niveau d’interdépendance économique entre nations majeures (Corée du Sud, Japon, Chine populaire, Taïwan) est certes croissant et selon Paul Tourret, directeur de l’Institut supérieur d’économie maritime, une telle imbrication tendrait, sous un certain angle, à réduire les risques de déflagration régionale : « Les acteurs économiques semblent assez matures pour dépasser les approches de défiance qu’entretiennent les États. » Mais, comme il le précise immédiatement lui-même en contrepoint, la mutualisation des enjeux géoéconomiques n’apparaît pas suffisante à elle seule pour « construire une stabilité régionale[2] ».

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L’affrontement sino-japonais de 2010 autour des îles Senkaku, ravivé en 2012 et 2013, a ainsi conduit Pékin à raréfier ses exportations de terres rares vers le Japon. Ce groupe de 17 métaux, dont la production est dominée par la Chine, est indispensable à la fabrication des produits de haute technologie, l’un des points forts de l’économie japonaise. Tokyo s’est brutalement retrouvé fragilisé. Et n’a pas tardé à réagir. Le 13 mars 2012, le Japon, appuyé par les États-Unis et l’Union européenne, a déposé une plainte devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dénonçant les limitations imposées par la Chine à l’exportation de ses terres rares. Pékin a été condamné en mars 2014, sans que cela modifie réellement sa politique.

Loin de se contenter de ces procédures, les Japonais comptent également sur le JOGMEC (Japan Oil, Gas and Metals National Corporation), récemment créé. Avec un financement annuel de 15 milliards d’euros, cette entité agit sur trois volets : elle soutient les entreprises minières japonaises à l’étranger (en particulier dans leurs achats ou leurs prises de participation) ; elle sert de véhicule diplomatique pour la conclusion de contrats de long terme d’État à État ; enfin, le JOGMEC s’applique à soutenir la recherche nationale dans le domaine énergétique et minier. Dès 2012, le ministère de l’Industrie japonais annonçait que de nouveaux partenariats avec le Kazakhstan et l’Australie lui permettaient désormais de réduire drastiquement la dépendance nationale aux terres rares chinoises. Le secteur privé relaie cet effort national : à travers ses filiales, le constructeur automobile Toyota est l’une des sociétés investissant le plus dans le secteur minier au Canada et en Australie, là aussi pour réduire la dépendance du Japon aux terres rares chinoises.

Le marché ou la géopolitique

Face aux problématiques géoéconomiques d’approvisionnement en métaux et en minéraux, et au chantage à l’approvisionnement susceptible de compliquer une crise géopolitique, plusieurs options existent donc pour les nations.

La première est de s’en remettre aux marchés. Néanmoins, comme le remarque le spécialiste Didier Julienne, ceux-ci sont « […] fragmentés, opaques, avec beaucoup de gré à gré, des stocks cachés, une absence fréquente d’informations fiables et chiffrées[3] ». Certaines sociétés industrielles occidentales utilisent certes des « couvertures », qui sont des assurances financières garantissant un achat de substance à prix fixe sur une période donnée. Mais ces garanties pèsent peu face à la défense de leurs intérêts par des États parfois décidés à peser sur tous les leviers pour remporter un bras de fer régional. Pour Patrice Christmann, directeur adjoint de la stratégie du Bureau de recherches géopolitiques et minières (BRGM), « le temps est révolu où il était suffisant de se tourner vers son entreprise de négoce préférée pour gérer ses approvisionnements. Nous vivons, et vivrons de plus en plus dans un monde complexe, multipolaire où les ressources naturelles seront un enjeu majeur du développement durable[4] ».

La deuxième option, une fois le fétichisme du marché dépassé, consiste à prendre en compte les nécessités géopolitiques du contrôle territorial, en choisissant une stratégie de long terme de diversification des approvisionnements. Mais toutes les puissances ne font pas montre de la même énergie que celle déployée par le Japon dans le cas des terres rares. L’Europe, en particulier, se situe dans une position particulièrement critique. D’une part, l’essentiel de la croissance de la demande mondiale de métaux et minéraux est aujourd’hui le fait des nouveaux pays industrialisés (Chine, Inde, Brésil), autant pour répondre aux besoins de leur propre développement que du fait de la délocalisation d’une partie des industries lourdes et manufacturières de l’Europe vers ces pays. D’autre part, la production des ressources métalliques est assurée à plus de 80 % dans des pays extérieurs à la zone européenne : Amérique du Nord et du Sud, Russie, Asie ou Australie.

Une Europe désarmée ?

Un pays comme la France n’a ainsi cessé, depuis plus de vingt ans, de désinvestir dans son secteur minier, se rendant dépendant de filières de production aux mains de multinationales étrangères (de Rio Tinto à BHP Billiton). En même temps, la France perd ses compétences en matière de prospection et de recherche : « La France, explique Patrice Christmann, a négligé la politique des ressources minérales. Et aujourd’hui il y a de moins en moins de spécialistes en ingénierie des mines, ce qui peut poser problème dans les années à venir[5]. »

L’industrie extractive non énergétique approvisionne pourtant des secteurs tels que la construction, la chimie, l’automobile, l’aérospatiale ou encore la construction de machines et d’équipements, qui génèrent en Europe une valeur ajoutée d’environ 1 324 milliards d’euros au total, pour quelque 30 millions d’emplois. Malgré cela, les tenants d’un nouveau patriotisme économique européen rencontrent des difficultés à convaincre leurs interlocuteurs, en raison de la diversité du tissu industriel du Vieux Continent.

La problématique des approvisionnements en ressources stratégiques diffère en effet en fonction du niveau d’intégration d’une société dans l’économie mondialisée. Ainsi, les sociétés françaises ayant une forte implantation internationale ont une appréciation des risques sur les approvisionnements radicalement différente des sociétés peu ou pas implantées à l’étranger. Les premières peuvent en effet se fournir directement auprès de leurs pays-hôtes, alors que les secondes sont dépendantes des filières françaises.

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Un élément est cependant partagé par les groupes mondialisés et les sociétés nationales : les uns et les autres ont en réalité une très faible visibilité sur l’ensemble de leurs chaînes d’approvisionnement. Après deux décennies d’immobilisme, certaines initiatives positives voient le jour sur le Vieux Continent, dans le sens d’une meilleure autonomie, et d’une moindre naïveté. En septembre 2014, plus de 170 sociétés se sont réunies pour créer « Metallurgy Europe », un complexe européen de recherche-développement dans le domaine des métaux. Airbus, Thalès, Siemens, Thyssenkrup ou encore BAE Systems font partie du tour de table. La Commission européenne, dont la soumission à la doxa libérale semble diminuer dans certains domaines, a produit quelques documents d’orientation, comme l’Initiative « matières premières » de 2008[6]. Sur le volet prospectif, l’European Rare Earth Competency Network (ERECON), mandaté par la Commission, est chargé de définir une politique qui garantirait l’accès aux terres et métaux rares pour l’ensemble du continent.

Les risques de dépendance

Les tensions futures sur la disponibilité de certains matériaux posent finalement la question de la sécurité des approvisionnements en ressources critiques, indispensables aux filières industrielles stratégiques (nucléaire, défense, aéronautique, électronique, automobile). Qu’une forte tension sur certains éléments se produise, et ce sont des secteurs entiers des industries nationales qui sont menacés. D’autant que certains pays se retrouvent parfois, du fait de leur potentiel naturel et du manque d’investissement de leurs partenaires, dans une situation de monopole : si la Chine fournit 97 % des terres rares mondiales ainsi que 93 % du magnésium et 90 % de l’antimoine, Brasilia fournit 90 % de la demande mondiale de niobium, et les États-Unis 88 % de celle de béryllium.

Pour faire face à ce risque, les grandes puissances mondiales ont déjà défini des stratégies spécifiques pour s’assurer que les ressources qu’elles considèrent comme stratégiques demeureront disponibles, quelles que soient leurs relations diplomatiques respectives avec les États dominant la production de chaque substance.

Les États-Unis, la Russie et la Chine ont mis en place des politiques de gestion des stocks, de contrôle des flux et de sécurisation des zones de production, notamment par le biais d’achats de sociétés et de gisements. Des investisseurs chinois s’intéressent en 2014 à l’exploitation minière de terres rares en Grèce. Début septembre 2014, la chaîne d’information américaine NBC a révélé que l’organisme scientifique du gouvernement américain, l’U.S. Geological Survey, avait réalisé une étude aérienne du sol afghan en 2006, qui aurait permis de cartographier les ressources minérales du pays, qui en regorge. Les chercheurs américains estiment qu’il y aurait 60 millions de tonnes de cuivre, 2,2 milliards de tonnes de minerai de fer, 1,4 million de tonnes d’éléments de terres rares (notamment du lanthane, du cérium et du néodyme), ainsi que de l’aluminium, de l’or, de l’argent, du zinc, du mercure et du lithium. Qui s’assurera de ce pactole, une fois les Occidentaux évacués du Royaume de l’insolence ?

Dernier exemple : en arrière-fond de la crise ukrainienne, les Russes réfléchissent à la création d’un cartel de terres rares avec les Chinois. La Russie a les plus grandes réserves (estimées à 20 % des réserves connues) derrière la Chine. De plus, les zones potentielles d’exploitation en Russie contiendraient la totalité des 17 terres rares, au contraire de beaucoup d’autres réserves connues dans le monde. Les Russes ont donc toutes les raisons de les exploiter, compte tenu de la baisse de la production chinoise, qui va forcer Pékin à devenir importateur, mais aussi de la crise avec les États-Unis et l’UE, qui incite Moscou à jouer sur tous les leviers de rétorsion à sa disposition.

Les États ont repris la main

À ces exemples majoritairement pris dans le domaine des ressources minérales, il faut ajouter les tensions sur les matières premières agricoles et les hydrocarbures. Le monde semble bien entré dans une période de tensions sur les matières premières.

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Pour un auteur comme Bernard Nadoulek, avec cette « guerre économique », « il ne s’agit plus seulement d’un affrontement entre des entreprises mais entre des États, ceci est particulièrement illustré par la rivalité des États-Unis et de la Chine [] » Selon lui, « compte tenu des enjeux de cette guerre, notamment en termes de ressources et d’énergie, aucune entreprise, même à dimension mondiale, n’a les moyens d’agir toute seule. C’est pourquoi les États, qui ont toujours agi dans le sens de leurs intérêts nationaux, ont repris la main sur le plan de l’économie mondiale[7] ».

Il est permis de penser que l’interdépendance complexe qui lie les grandes puissances empêchera des acteurs comme Pékin et Washington de basculer d’une compétition pour les ressources à un affrontement militaire déclaré. Il n’en reste pas moins que, du point de vue des décideurs politiques, les aspects géostratégiques de cette tendance générale au nationalisme des ressources ne peuvent plus être ignorés.


  1. Marie Chéron, Fanny Deléris, « Ressources minérales : le renchérissement de l’extraction face à une demande exponentielle », dans Fanny Déléris, Pierre Radanne, Jean-Luc Redaud, Jacques Vare, État des lieux des controverses sur les ressources naturelles, Association 4D, juin 2012.
  2. Paul Tourret, « Dans les mers d’Extrême-Orient, plus de partages que de divergences », Le Monde, 22 août2014.
  3. Didier Julienne, « Matières premières : le grand retour des stratégies publiques », ParisTech Review, 14 mai 2012.
  4. « Les industriels doivent mettre plus d’intelligence dans les matières premières », L’Usine nouvelle, 23 mai 2012.
  5. « La réflexion progresse sur l’exploitation de terres rares en Europe », Euractiv, 23 mai 2014.
  6. http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2008:0699:FIN:fr:PDF.
  7. Bernard Nadoulek, propos recueillis par Lucas Didier, « La guerre économique mondiale pour le contrôle des ressources naturelles », Géoéconomie 2/ 2008 (n° 45), p. 21-32.

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Olivier Zajec

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