Officier et journaliste, conseiller ministériel, porte-parole de la Défense, enseignant à l’Ecole de guerre pendant vingt ans, colonel de la réserve opérationnelle, Pierre Servent a servi comme officier dans les Balkans, en Afghanistan et en Afrique. Il a publié de nombreux ouvrages sur l’histoire militaire et les questions de défense : Les Guerres modernes expliquées aux civils et aux militaires (Buchet-Chastel), Le Siècle de sang 1914-2014 (codir. Perrin), Extension du domaine de la guerre (Tempus). Son premier roman, Le Testament Aulick (Robert Laffont) est paru en 2016. Voilà qu’il a enrichi son étude, notamment à la lumière de l’engagement français en Syrie et dans le Sahel.
Au-delà de cette brûlante actualité son analyse s’inscrit dans la durée ; depuis 1958, sept présidents de la République ont porté le titre de chef des armées qui figure à l’article 15 de la Constitution du 4 octobre 1958, l’article 5 disposant qu’« il est le garant de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire ». Tous ont porté l’uniforme à un moment ou à un autre de leur vie. Cinq ont fait la guerre. Un seul, Charles de Gaulle a combattu et commandé au feu à deux reprises en 1914 et en 1940. Il s’est même heurté, durant la guerre d’Algérie, à ses anciens compagnons au premier chef le général Raoul Salan, le militaire le plus décoré de France, qui a participé au putsch des généraux de 1961.Trois présidents ont été des civils mobilisés ou engagés volontaires durant la seconde guerre mondiale : Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand. Un seul a fait la guerre d’Algérie, Jacques Chirac qui n’a jamais cessé de dire qu’il s’agissait des années les plus captivantes de sa vie. Les benjamins, Nicolas Sarkozy et François Hollande ont effectué tous les deux un service militaire de douze mois. Dans l’examen précis de cette délicate relation des présidents à l’armée, aux opérations militaires et aux guerres, Pierre Servent serre au plus près ce qui a pu façonner leur histoire, leur identité et leur psychologie dans leurs années de jeunesse et de formation. Il montre ensuite en quoi cette matrice offre des clés de compréhension de leurs décisions comme chef des armées. Un constat s’impose : à l’exception du normalien Georges Pompidou, amoureux des lettres et des arts tous les présidents de la République ont enfilé la tenue de combat avec une délectation certaine. Ce livre explore également une face occultée dans nos sociétés convaincues que le phénomène belligène avait disparu et que la guerre avait disparu comme modalités de règlement des contentieux inters étatiques : or comme l’avait décrit Clausewitz, la guerre est un caméléon et elle revêt bien des aspects de la cyber guerre à la guerre commerciale.
Le positionnement très particulier et très efficace qu’occupent les grands chefs militaires français à l’articulation du politique et du militaire reste au cœur des réflexions de Pierre Servent. Pour la première fois, plusieurs d’entre eux ont accepté de s’exprimer dans ces pages, avec une grande liberté.